Intervention de Pascale Boistard

Délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes — Réunion du 13 novembre 2014 : 1ère réunion
Audition de Mme Pascale Boistard secrétaire d'état chargée des droits des femmes auprès de la ministre des affaires sociales de la santé et des droits des femmes

Pascale Boistard, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes :

secrétaire d'État chargée des Droits des femmes, auprès de la ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes. - Concernant l' « éga-conditionnalité », Mme Marisol Touraine et moi-même avons pris connaissance du rapport du Haut Conseil à l'égalité sur la question. Je vous rappelle que d'ores et déjà, ce concept est mis en oeuvre par la loi du 4 août 2014, puisque le non-respect de leurs obligations légales en matière d'égalité professionnelles par les entreprises sera soumis à des sanctions, dès 2017 pour les plus grandes entreprises, en 2020 pour les autres.

S'agissant de la représentativité chez les partenaires sociaux, des avancées restent à faire. Il est notable, à cet égard, que les syndicats envoient des femmes quand il s'agit de discuter de sujets concernant les femmes, comme par exemple la représentation des femmes au sein de leurs instances, mais que ce soient des hommes qui viennent lorsqu'il s'agit d'aborder des questions plus générales.

Dans le domaine du sport, la question est actuellement d'actualité, alors que les fédérations continuent de signer avec le ministère des sports des conventions d'objectifs, qui doivent prendre en compte l'obligation légale de représentation égale des femmes et des hommes, quel que soit le nombre d'hommes ou de femmes au sein des fédérations. Ayant travaillé au ministère des sports, je sais également qu'il est possible de conditionner l'agrément des associations, notamment celles intervenant dans le domaine de l'éducation populaire, à des seuils d'égale représentation des femmes et des hommes au sein des instances dirigeantes.

Concernant le « désert médical » du mois d'août, Marisol Touraine et moi-même travaillons à améliorer l'information des femmes qui se retrouvent, pas seulement l'été d'ailleurs, dans des lieux où elles n'ont pas leurs contacts médicaux habituels. À cet égard, nous avons lancé un site internet répertoriant les lieux ouverts en France susceptibles d'accueillir les femmes désirant pratiquer une IVG. N'oublions pas que, sur notre territoire, existe un tissu d'associations dont la principale mission est d'informer, accompagner et soutenir les femmes dans ces démarches compliquées pour elles.

Le développement de la prostitution en milieu universitaire est directement lié à la question de la précarité. Le 25 novembre 2014 sera aussi, à cet égard, l'occasion de faire le point sur les violences faites aux femmes dans les milieux universitaires. La Secrétaire d'État à l'Enseignement supérieur et à la Recherche, Geneviève Fioraso, et moi-même avons décidé, par exemple, de maintenir un haut niveau de vigilance sur les « soirées » universitaires, dont on sait que les organisateurs, pour attirer les jeunes, n'hésitent pas à se servir de messages sexistes. Parallèlement, nous travaillons à mettre en place, au sein des Universités, et en particulier au sein des Centres régionaux des oeuvres universitaires et scolaires (CROUS) des points d'accueil où les jeunes femmes peuvent trouver une écoute auprès d'assistantes sociales, mais aussi de personnels médicaux. Ces dispositifs existent dans certaines universités, mais de façon très inégale en fonction des lieux et des territoires. Or, il est essentiel de pouvoir établir un lien de confiance pour « détecter » des situations que les jeunes filles ont parfois tendance à garder sous silence. Ce n'est pas évident à mettre en place dans les grandes universités où l'anonymat reste la règle. Et ceci est également vrai dans la relation avec les enseignants : la règle du « dépaysement » des plaintes déposées dans les « affaires » de harcèlement, posée dans la loi du 4 août 2014, devrait permettre de libérer la parole des étudiants.

Sur la question de la mixité dans les espaces publics, je suis d'accord avec vous pour reconnaître le retard de la France sur le sujet, notamment en matière d'urbanisme. La loi du 4 août 2014 invite les collectivités locales à définir des budgets « genrés ». C'est déjà reconnaitre que « l'espace public neutre » n'existe pas : c'est donc une première avancée. Mais il faut aller plus loin, car certaines femmes vont jusqu'à ressentir l'espace public comme un lieu hostile, ce qui les conduit parfois ne plus sortir de chez elles. Nous avons donc décidé, avec la secrétaire d'État chargée de la ville, Myriam El-Khomri, de lancer des « marches exploratoires » de femmes dans onze villes expérimentales. Ces marches exploratoires, menées sous l'égide d'une association, consistent en des enquêtes de terrain conduites, en lien avec les instances locales concernées, par des groupes de femmes résidant dans le quartier. Les courriers viennent d'être envoyés. Par ailleurs, nous prévoyons de rencontrer prochainement des architectes pour les sensibiliser à la nécessité de proposer aux collectivités des constructions mixtes.

Le sentiment d'insécurité, notamment dans les transports, ne touche pas que Paris. La diffusion récente par une association d'un « clip » de sensibilisation a fait l'effet d'une opération « coup de poing ». C'est pourtant un sujet de fond. J'ai pris la semaine dernière l'initiative d'une rencontre avec les membres du cabinet du secrétaire d'État chargé des transports, Alain Vidalies. Notre objectif, en coordination avec l'ensemble des opérateurs de transport sur le territoire, est de renforcer la prévention, bien sûr, mais aussi de fournir des outils permettant de répondre à des situations d'urgence, face auxquelles il nous arrive parfois de ne pas savoir quoi faire.

Vous m'interrogiez sur les « débaptisations » de rues. Même si ces décisions relèvent, vous le savez, des collectivités territoriales, j'espère que la prochaine « panthéonisation » de deux femmes incitera les collectivités publiques à mettre des femmes à l'honneur et à leur rendre hommage.

La question de la formation des enseignants à l'égalité est un sujet crucial. Ils sont souvent volontaires, mais il leur manque parfois les outils pour répondre à des situations de violence qui, à l'école, sont le reflet de ce qui se passe dans le reste de la société. Si je peux me permettre une réflexion personnelle, il me semble qu'on ne peut demander aux enseignants de pallier toutes les lacunes de l'éducation des enfants, et que, sur ce point, le recul des actions d'éducation populaire explique un certain « déversement » sur l'école de missions qui étaient traditionnellement prise en charge dans ces réseaux. On ne pourra, par conséquent, résoudre cette question que de façon globale.

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