Intervention de Alain Bertrand

Réunion du 18 novembre 2014 à 14h30
Débat sur le thème « ruralité et hyper-ruralité : restaurer l'égalité républicaine »

Photo de Alain BertrandAlain Bertrand :

Quand vous rencontrez un élu, le brave homme se tient souvent courbé, comme tous les hyper-ruraux, parce qu’il a pris l’habitude de revoir à la baisse tous les projets ou à y renoncer, que sa lourde tâche est seulement d’essayer d’éviter la fermeture d’un service public, le départ d’une entreprise. Cet élu, semblable à nous tous et qui aime l’hyper-ruralité, a malheureusement la culture de la reculade, alors que sa vocation est de bâtir et de proposer un avenir à ses concitoyens.

Ce que les habitants de ces territoires revendiquent, au travers de leur vote, très fortement protestataire ces derniers temps, ce n’est pas la création d’un métro à Guéret, à Saint-Flour, à Duras, à La Broque, à Aubusson, à Forcalquier ou à Tonnerre, c’est simplement l’accès à un socle de services minimum et la création d’outils législatifs nouveaux, ici à Paris, rendant possible la concrétisation de leurs initiatives, là-bas dans leur village, les mettant en situation de rebondir !

Il est urgent de donner de nouveaux droits à ces territoires. L’inaction les ferait entrer en complète récession et agir dans dix ou vingt ans coûterait beaucoup plus cher à la nation que mettre en place aujourd'hui des mesures de bon sens, adaptées à leur réalité.

Nombre des mesures proposées dans le rapport sur l’hyper-ruralité ne coûtent rien, madame la ministre ! Ce sont des mesures de bon sens, qui concernent 26 % du territoire et n’engendrent pas de coûts supplémentaires : c’est tout de même remarquable ! Elles sont de nature à rétablir l’égalité républicaine, dont l’État est seul garant.

Rétablir l’équilibre républicain ne sera possible que par un volontarisme à toute épreuve, une prise de conscience ; j’appelle l’ensemble de mes collègues ici présents à s’unir pour peser sur l’avenir.

Nous pouvons tous nous entendre sur le principe suivant : pas de sous-territoires, pas de sous-citoyens ! Il est temps que l’État engage une politique claire et assumée en faveur de ces territoires. Ce peut être à travers un pacte national en faveur de l’hyper-ruralité, comme je le propose dans mon rapport, ou par une loi portant sur l’égalité des territoires. Je suis certain, mes chers collègues, que vous saurez faire bloc.

Il est urgent que l’État assume l’échec des politiques nationales dans les territoires les plus ruraux. Certains disent qu’il n’y a plus d’aménagement du territoire. Nous devons accepter de repenser notre conception de l’égalité, car l’uniformité de traitement pour tous les territoires ruraux ne serait pas productive.

L’obligation de traiter de l’hyper-ruralité dans toutes les lois est l’objet de deux des propositions que je formule dans mon rapport. Cela ne coûte pas un euro, mais s’il était obligatoire de faire référence à l’hyper-ruralité dans toute loi, qu’elle porte sur l’enseignement supérieur, sur les infrastructures ou sur la défense, cela permettrait certainement des implantations nouvelles et la prise en compte des besoins de ces territoires. Prendre en compte l’hyper-ruralité dans toutes les lois, tous les actes de planification et de programmation, serait un acte fort. Je pense en particulier aux schémas régionaux d’aménagement du territoire et aux contrats de plan État-région : si la loi ne l’impose pas, ils ne traiteront pas de l’hyper-ruralité ! §

Cette mesure aurait deux vertus : empêcher que l’on oublie les territoires hyper-ruraux en les ramenant sur l’écran radar de la République et permettre l’adaptation de la loi à leurs spécificités. Elle ne coûterait pas un euro de plus, parce que tout cela se ferait à moyens égaux.

Grâce à une simple étude d’impact, cette mesure aurait, par exemple, évité l’application de la tarification à l’activité aux territoires ruraux, en matière de santé, ou l’adoption d’un plan national « France très haut débit » pénalisant encore davantage les territoires hyper-ruraux, qui seront les derniers couverts.

L’ouverture d’un droit à l’expérimentation et à la pérennisation des expérimentations qui ont marché est nécessaire.

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