Intervention de Jean-François Longeot

Réunion du 18 novembre 2014 à 14h30
Débat sur le thème « ruralité et hyper-ruralité : restaurer l'égalité républicaine »

Photo de Jean-François LongeotJean-François Longeot :

Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, je tiens à remercier les membres du groupe du RDSE d’avoir inscrit ce débat à l’ordre du jour de notre assemblée. Il est important que nous nous saisissions de façon récurrente de cette thématique liée à l’aménagement du territoire, et en particulier à la ruralité.

Notre rôle, au sein de la chambre des territoires, est non pas d’être misérabilistes ou en demande permanente, mais bien de trouver des solutions pour les citoyens qui vivent dans des zones définies comme hyper-rurales.

Les territoires ruraux sont une richesse pour notre pays, en termes non seulement d’espace et de qualité de vie, mais également de développement économique et de vie sociale.

L’hyper-ruralité est une problématique fondamentale pour les élus que nous sommes. Elle est à la source d’inégalités profondément injustes. Le Sénat doit retrouver toute sa place dans les territoires, en particulier dans ceux qui sont ruraux et hyper-ruraux.

Ce débat est pleinement d’actualité. Après le rapport rendu en juillet dernier par notre collègue Alain Bertrand, fruit d’un très bon travail d’analyse, après la campagne sénatoriale, qui a été l’occasion, dans les départements ruraux, d’entendre tous les élus qui animent notre territoire, notre assemblée doit faire entendre sa voix, alors que se déroulent les assises des ruralités.

Le Sénat doit être le garant de l’égalité territoriale. Parce que les difficultés rencontrées sont les mêmes dans les banlieues des métropoles et dans les zones les moins denses de notre pays, nous devons proposer des solutions qui soient à la hauteur des attentes des citoyens.

Le sentiment d’abandon est de plus en plus présent parmi les habitants et les élus locaux de ces territoires, entre la disparition de services publics, la suppression parfois de gendarmeries et de sous-préfectures, le développement de la délinquance, l’apparition de déserts médicaux, l’inégalité devant la mise en place de la réforme des rythmes scolaires, la suppression de l’ATESAT – l’assistance technique de l’État pour des raisons de solidarité et d’aménagement du territoire aux communes –, la fin de l’instruction des permis de construire par les services de l’État ou la diminution des dotations aux collectivités.

La situation se dégrade fortement depuis plusieurs mois.

L’État ne fait pas confiance aux élus ruraux, alors que le dynamisme des communes rurales repose sur une politique d’aménagement du territoire volontariste de l’État et la mobilisation de tous, collectivités locales, acteurs économiques, sociaux ou associatifs.

Il est indispensable que les pouvoirs publics accordent leur confiance aux élus de proximité, qui connaissent parfaitement les besoins de leurs concitoyens.

Il faut accorder plus de souplesse aux élus pour discuter, réfléchir et définir, au sein d’un cadre général, les conditions les plus favorables à une meilleure organisation de l’administration territoriale. La France est multiforme, tant sur le plan géographique que sur celui de la densité de population. Vouloir imposer le même cadre structurel à tous est un non-sens. Il faut au contraire que soient privilégiés les accords locaux chaque fois que cela est possible. La réforme territoriale devrait respecter ce principe essentiel.

L’un des sujets majeurs, pour l’avenir de l’hyper-ruralité, c’est le développement du numérique. Couvrir l’ensemble du territoire en infrastructures de télécommunications est un objectif essentiel. L’accès à internet n’est plus seulement un facteur d’attractivité pour ces territoires ruraux ; il devient une condition essentielle de la vie de nos communes.

Les usages des outils numériques se développent et les territoires ruraux sont sans doute ceux qui pourraient le plus en bénéficier. C’est la garantie du maintien des populations, mais aussi des bases économiques. Dans cette perspective, l’État ne doit pas asphyxier les communes.

Dans mon département du Doubs, le conseil général vient de lancer un plan de déploiement du réseau optique, qui nécessitera un investissement de 184 millions d’euros sur quinze ans. Les communes devront apporter une forte contribution. Comment pourront-elles le faire, à un moment où leurs budgets sont très contraints, où l’État, le Gouvernement se désengagent chaque jour un peu plus ?

Madame le ministre, c’est un cri d’alarme que nous voulons pousser : il ne faut pas laisser mourir les communes comme vous le faites. Nous sentons s’installer une situation de blocage et d’incompréhension entre le Gouvernement et les élus locaux. La semaine prochaine, lors du congrès de l’Association des maires de France, j’espère que le Gouvernement saura entendre ceux qui se dévouent pleinement pour améliorer la vie quotidienne des Français.

Un autre sujet d’inquiétude touche à l’accès aux services publics.

C’est un aspect déterminant de la politique d’aménagement du territoire, qui ne peut être sacrifié. Il faut mettre un terme au délitement et à l’éloignement des services publics qui constituent l’armature de nos territoires.

Maintenir une présence de proximité est impératif : on ne peut pas déshumaniser le service public dans les territoires pour des raisons budgétaires. Le service public a un coût, qu’il faut assumer si l’on veut maintenir une égalité entre les citoyens et leur permettre de vivre en milieu rural. L’État doit en être le garant.

En conclusion, je dirai que nos 30 000 communes rurales et hyper-rurales sont l’avenir de la France. Ce n’est pas là un langage convenu, c’est l’affirmation que notre pays doit exploiter l’atout considérable constitué par son vaste territoire, le plus étendu de l’Union européenne. Il faut le rééquilibrer et faire en sorte que les communes rurales soient au cœur de la relance économique et sociale de notre pays. §

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