Intervention de Hugues Portelli

Réunion du 18 novembre 2014 à 14h30
Durée du mandat du président de la république — Discussion d'une proposition de loi constitutionnelle

Photo de Hugues PortelliHugues Portelli, rapporteur :

C’est ce qui s’est passé en 1969, avec le fameux référendum du 27 avril, le non l’emporte avec 53 % des suffrages. Le 28 avril, le général de Gaulle démissionne.

Autrement dit, d’un côté, le septennat assure un pilotage à long terme de l’action publique et, de l’autre, il confère au chef de l’État une responsabilité permanente : à tout moment, celui-ci peut être conduit à démissionner lorsqu’il perd la confiance du peuple.

Cette conception, qui était celle du général de Gaulle, ne pouvait évidemment pas être étrangère aux rédacteurs de la Constitution de 1958, puisque ce sont les mêmes qui l’ont rédigée et qui l’ont mise en œuvre et que, en particulier, c’est le même qui, élu Président de la République en décembre 1958, a recouru au référendum à trois reprises pour interroger le peuple sur des questions essentielles, avant d’être réélu au suffrage universel direct en 1965.

De sorte que le septennat faisait partie d’un ensemble, dans lequel le texte et sa pratique étaient liés, le trait d’union étant le Général de Gaulle lui-même, qui était à la fois le principal rédacteur de la Constitution et celui qui la mettait en œuvre.

Or, cette conception, aucun des successeurs du général de Gaulle ne l’a partagée – je dis bien aucun –, si bien que le septennat a changé de nature. C’est si vrai que, dès 1973, le successeur du général de Gaulle, Georges Pompidou, a soulevé la question de la réduction de la durée du mandat présidentiel. En vérité, mes chers collègues, la question du quinquennat a commencé de se poser quelques années à peine après le départ du général de Gaulle !

En 1973, la procédure a même été très loin, puisque le projet de loi constitutionnelle a été adopté par les deux assemblées, avant que Georges Pompidou ne renonce à le soumettre au Congrès parce qu’il savait qu’il n’y obtiendrait pas la majorité des trois cinquièmes.

Reste que, dès cette époque, la question du quinquennat était posée. Cette question était en réalité celle de la manière de gérer l’érosion de la confiance populaire, dès lors que l’on renonçait à la vision du général de Gaulle, dans laquelle cette confiance était régulièrement mise à l’épreuve.

Du reste, le général de Gaulle lui-même s’était interrogé, en 1967, sur l’éventualité de ne pas disposer d’une majorité à l’Assemblée nationale. Georges Pompidou s’est posé la même question à la veille des législatives de 1973, et Valéry Giscard d’Estaing également à la veille de celles de 1978, dans son fameux discours de Verdun-sur-le-Doubs. Après quoi le problème a été réglé, si je puis dire, par le peuple, avec les trois cohabitations qui se sont succédé.

Je le répète : la question de la nécessité de réduire la durée du mandat présidentiel s’est posée dès 1973.

Revenons à présent sur les conditions du passage au quinquennat, en particulier sur la façon dont le débat a été lancé.

À cet égard, il est intéressant de remarquer que le principal responsable de l’instauration du quinquennat est le Premier ministre de l’époque : le Premier ministre de cohabitation qui, pendant cinq ans, a exercé les pouvoirs de chef du Gouvernement les plus importants de l’histoire de la Ve République, face à un Président de la République amoindri dont les pouvoirs étaient réduits aux « acquêts » de ses prérogatives constitutionnelles.

C’est ce Premier ministre, qui ambitionne d’exercer la fonction présidentielle, qui met en œuvre une double réforme destinée, dans son esprit, à rendre l’autorité présidentielle pérenne et à prévenir la plupart des risques de cohabitation, même si, comme M. Mézard l’a souligné, le risque ne peut jamais être complètement écarté, le Président de la République pouvant démissionner, être destitué ou décéder – sans oublier l’éventualité d’une dissolution ratée…

Ainsi, c’est Lionel Jospin qui propose le quinquennat et qui, l’ayant fait voter, propose d’assurer la primauté du Président de la République en prolongeant le mandat des députés.

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