Intervention de Jean Germain

Réunion du 20 novembre 2014 à 15h00
Loi de finances pour 2015 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Jean GermainJean Germain :

Dans ce projet de loi de finances, qui n’est, certes, guère « sexy » – mais nous sommes tout de même dans une période particulière –, le Gouvernement propose un certain nombre de mesures précises, notamment des mesures qui visent à faire des économies, comme nous l’avons vu voilà quelques jours lors de l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques. Il fait également des propositions fiscales, concernant l’impôt sur le revenu, ainsi que, par exemple, en faveur de la transition énergétique. On peut approuver ou non ces propositions, mais elles ont le mérite d’exister.

Le Gouvernement fait en outre des propositions en matière de logement, sur la rétention foncière, sur la TVA dans les zones urbaines sensibles, et il améliore un certain nombre de dispositifs.

Enfin, le Gouvernement tient bon sur le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi, le CICE, ce qui est selon moi une bonne chose, car ce genre de politique a besoin de durer pour aboutir à des résultats.

Nous essaierons de démontrer sans relâche que notre position est guidée par le souci d’une répartition équitable de l’effort demandé, avec cependant des priorités dans la recherche de l’efficacité de l’action publique, à travers quelques leviers essentiels : l’éducation nationale, la justice, la sécurité, ainsi que l’investissement au plus près des besoins du terrain, qui est assuré par les collectivités territoriales.

Monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d'État, sur ce dernier point, qui préoccupe tout particulièrement notre assemblée, je veux dire quelques mots au nom du groupe socialiste.

Les appels des élus locaux sont forts et ils doivent être entendus. Il y va de la crédibilité du pacte républicain : les responsables élus par nos concitoyens doivent avoir les moyens d’exercer les responsabilités qui leur sont doublement confiées par la loi et par les électeurs.

Il faut rappeler qu’entre 2002 et 2012 l’endettement de notre pays a doublé. Dans une perspective d’assainissement de nos comptes publics, un effort historique est demandé à l’ensemble des administrations, et les collectivités territoriales ne souhaitent pas s’en exonérer. Toutefois, il convient de ne pas oublier que l’évolution de leurs budgets est importante pour amorcer une reprise économique encore trop modérée. C’est en tout cas notre conviction.

Nous n’ignorons pas les difficultés actuelles, mais lorsqu’un cri se fait entendre, en provenance d’un peu partout, il convient de l’écouter. Le groupe socialiste espère donc vous convaincre, au cours des débats à venir, d’atténuer la contribution qui sera demandée aux collectivités en 2015.

Notre groupe propose d’y parvenir en lissant sur quatre ans au lieu de trois l’effort des 11 milliards d’euros sur les dotations : la DGF diminuerait de 2, 75 milliards d’euros par an entre 2015 et 2018, au lieu de 3, 67 milliards d’euros entre 2015 et 2017, comme il est aujourd’hui prévu. Bien entendu, cette souplesse sera gagée pour rester dans les cadres que nous nous sommes fixés, il y a dix jours, lors du débat sur la programmation des finances publiques, et elle n’entraînera ni suppression de dépenses ni augmentation de la fiscalité ; sur ce dernier point, nous sommes certes contraints, mais c’est aussi une volonté de notre part.

Il nous semble qu’il s’agit là d’un ballon d’oxygène nécessaire au regard des différents objectifs que l’on se fixe : poursuivre la réduction des inégalités territoriales, donc continuer à renforcer la péréquation ; ne pas entraver la reprise économique en risquant de porter un coup à l’investissement local.

Nous adhérons à la logique d’une répartition équitable des économies à réaliser entre l’État, la protection sociale et les collectivités locales, et nous assumons les conséquences de ce choix. Dire ou faire croire que les collectivités locales pourraient, même pour partie, être exonérées de cet effort n’est ni réaliste ni raisonnable. Ce n’est pas non plus conforme à l’idée de la décentralisation fondée sur le principe de subsidiarité : si les élus locaux sont les mieux placés pour savoir ce qu’il faut pour leurs territoires, ils sont alors les mieux à même de conduire dans leurs collectivités les politiques qui réduiront l’impact négatif des efforts demandés à l’ensemble de la nation, et aux administrations en particulier.

Mais la spécificité des collectivités locales doit également être prise en compte. La rigidité de leurs dépenses de gestion tout comme les réformes territoriales en cours impliquent de « laisser du temps au temps » : l’amendement que nous présenterons est destiné à donner des marges de manœuvre supplémentaires aux élus locaux, afin qu’ils s’adaptent au mieux à cette nouvelle donne, plus contrainte pour les deniers publics.

Globalement bien gérées et faiblement endettées, les collectivités locales assument la nécessité de contribuer de manière solidaire à l’effort engagé par le pays. Le groupe socialiste souhaite se faire le porteur de ce message de responsabilité et de la nécessité de donner plus de temps aux territoires, pour que l’effort d’économie ne se traduise pas par un repli important de l’investissement local.

J’en reviens à la critique selon laquelle les efforts d’économies prévus ne seraient pas suffisants.

Là où, globalement, le Gouvernement annonce une diminution de 50 milliards d’euros d’économies sur toute la dépense publique, d’aucuns en réclament, dans leurs meetings, au moins le double, soit 100 milliards : qui peut croire que cela n’emporterait pas des conséquences désastreuses pour nos territoires, notre économie et la nation ?

Comme la semaine dernière, lors de l’examen du projet de loi de programmation des dépenses publiques, le « Sénat d’opposition constructive » avance là encore masqué, sans détailler ses intentions. La majorité sénatoriale de droite ne construit que très peu. On est alors en droit de se demander si, au-delà de l’exercice imposé de la critique, l’absence de véritable contre-proposition ne constitue pas, de la part des auteurs du rapport, une approbation tacite de la politique du Gouvernement. §

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