Intervention de Gisèle Printz

Réunion du 16 octobre 2007 à 16h15
Société coopérative européenne et protection des travailleurs salariés — Adoption d'un projet de loi

Photo de Gisèle PrintzGisèle Printz :

En effet, notre droit du travail, malgré les opérations déjà réalisées depuis 2002, notamment par l'actuel Premier ministre, et celles que nous annonce le Président de la République, demeure l'un des plus protecteurs pour les salariés. Les règles de la négociation collective y sont encore précisées notamment dans le code du travail.

Il est donc regrettable que, depuis que l'Union européenne se penche sur le droit du travail, toutes les dispositions prises aient été en retrait par rapport à la clarté de notre droit, sauf en matière d'hygiène et de sécurité.

Il est également regrettable que les gouvernements français n'aient pas su faire de propositions plus conformes aux avancées sociales que nous avons connues depuis une cinquantaine d'années, qui permettent un dialogue social organisé à l'échelle européenne, avec des institutions représentatives clairement identifiées et proches des salariés.

Les textes de compromis qui émanent régulièrement des instances européennes sont d'une complexité qui les rend difficilement compréhensibles. En outre, ils ne font pas l'objet d'une appropriation par les salariés, qui ignorent d'ailleurs le plus souvent leur existence.

L'exemple le plus éclairant à cet égard est celui des comités d'entreprise européens, qui étaient pourtant riches de promesses. En réalité, ils se réunissent peu et sont mal informés par les directions. Leurs membres se plaignent de ne pouvoir se former suffisamment pour faire face à leurs responsabilités.

Une première procédure de révision de la directive sur les comités d'entreprise européens a été lancée, mais elle n'a pu aboutir, malgré de nombreuses demandes de la Confédération européenne des syndicats : préciser les procédures d'information et de consultation ; permettre aux membres du comité d'avoir accès à tous les sites des groupes ; mettre en oeuvre un droit à la formation élargi ; obtenir des sanctions à l'égard des entreprises qui ne respectent pas les procédures juridiques lors des restructurations.

Une nouvelle procédure de consultation des partenaires sociaux européens doit être lancée prochainement afin de réviser la directive sur les comités d'entreprise. Souhaitons qu'elle aboutisse à des mesures concrètes de relance du dialogue social à l'échelon européen.

En l'espèce, que nous propose-t-on ? Les dirigeants et les représentants des salariés négocieront eux-mêmes les modalités de leur implication dans la société coopérative.

En cas de désaccord, la directive prévoit, à titre subsidiaire, la création d'un organe de représentation des salariés, informé et consulté sur les questions globales ou transnationales intéressant la société coopérative européenne. Ce point est d'ailleurs trop restrictif dans la mesure où ce qui se passe dans un État peut avoir des répercussions dans les établissements des autres États.

Et en cas, à nouveau, de désaccord, il sera possible de s'en remettre à la législation nationale relative à l'information et à la consultation des travailleurs.

Certes, ce régime d'implication ne peut être inférieur à l'existant. Néanmoins, il ne constitue ni une nouveauté ni une amélioration.

En réalité, nous sommes face à une nouvelle législation européenne de compromis, donc floue. La transposition stricte de ce texte aux contours incertains permet une adaptation dans notre droit jusqu'alors plus précis.

Par conséquent, notre droit national en ressortira une nouvelle fois affaibli. Quant au droit européen en matière sociale - je fais référence à l'Europe sociale -, il n'en apparaîtra ni plus clair ni plus proche des citoyens.

Si, comme l'on prend soin de nous le rappeler, le texte législatif ne retranche rien par rapport à l'existant, son apport est cependant négligeable. Dans un contexte si peu favorable aux salariés et à leurs représentants, un tel dispositif n'apporte aucune protection ni garantie contre un nouveau recul de notre législation nationale.

En l'état actuel, si le projet de loi n'appelle pas de critique virulente, il ne saurait non plus recueillir notre adhésion. C'est la raison pour laquelle nous nous abstiendrons.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion