Intervention de Bernard Cazeneuve

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 19 novembre 2014 : 3ème réunion
Loi de finances pour 2015 — Missions « administrations générale et territoriale de l'état » « immigration asile et intégration » et « sécurités » - Audition de M. Bernard Cazeneuve ministre de l'intérieur

Bernard Cazeneuve, ministre :

Je vais tout d'abord répondre à la première série de questions de la sénatrice Esther Benbassa.

Le nombre de places en CADA : l'objectif de 4 000 places sera atteint fin 2014. Cet effort, dans un contexte budgétaire difficile, mérite d'être souligné. 3 066 de ces 4 000 places créées sont déjà ouvertes, le reste sera effectif avant la fin de l'année. En 2015, 5 000 places supplémentaires seront créées, dont 1 000 par transformation de places d'hébergement d'urgence grâce à la simplification des systèmes de location en 2015 et 2016.

Je sais bien que les milieux associatifs disent qu'il faudrait 35 000 places, mais vous connaissez les contraintes.

J'insiste sur l'importance de ce que nous faisons pour que la France retrouve sa vocation en matière d'asile. Avec franchise, je dis que les déboutés du droit d'asile n'ont pas vocation à rester sur le territoire sinon, il n'y a plus d'asile. Mais il faut que ceux qui sont déboutés puissent quitter le territoire dans de bonnes conditions avec des garanties de destination. Je ne suis pas naïf et je pressens que lors des débats parlementaires, toutes les dispositions visant à améliorer les droits aux demandeurs d'asile seront approuvées par tous, mais que celles tendant à améliorer l'efficacité des mesures d'éloignement ne le seront que par une partie des parlementaires.

Pour ce qui concerne l'ATA, je souhaiterais, Madame Benbassa, vous fournir des éléments très précis qui, je l'espère, vous rassureront. En 2011, les crédits d'ATA en loi de finances initiale représentaient 34 % de la dépense réelle ; l'inquiétude que vous avez formulée dans votre question était donc légitime. En 2013 - et je pense que cela sera encore plus significatif en 2014 -, 93 % de la dépense est satisfaite. Vous mesurez donc le progrès accompli. L'objectif du Gouvernement est de faire en sorte que ce nous budgétons corresponde effectivement à ce que nous dépensons. Dans la mesure où la réforme de l'asile devrait permettre de réduire les délais, nous pouvons légitimement espérer que tout ce que nous ferons en termes de réduction des délais aura un impact sur le volume de l'enveloppe. Cela ne sera certes pas instantané, mais la tendance est bien celle-ci. Tel est le pari de la réforme que nous proposons au Parlement.

Pour ce qui concerne l'hébergement d'urgence des demandeurs d'asile et la baisse de l'ATA, vous avez exprimé une préoccupation globale à laquelle je viens de répondre en vous renvoyant à la réforme de l'asile.

Pour ce qui concerne l'OFII, qui a des missions extrêmement importantes, nous confortons ces missions comme nous confortons celles de l'OFPRA. L'OFPRA verra ainsi ses effectifs croître de 55 ETPT, effectifs qui viendront s'ajouter à des efforts de réorganisation interne de l'Office, conduits par le très remarquable directeur général de l'OFPRA, M. Pascal Brice. Cela permet d'améliorer les délais de traitement des dossiers.

Pour le reste des réponses à vos questions, Madame Benbassa, vous les recevrez par écrit.

Monsieur Buffet m'a interrogé au sujet des centres de rétention administrative.

Je saisis cette occasion pour vous indiquer que sont parus aujourd'hui dans la presse quelques articles sur les durées de retenue dans ces centres, qui mériteraient presque des communiqués de correction tant ils laissent à penser que nous sommes dans une situation très dégradée par rapport aux autres pays de l'Union européenne. Ce n'est absolument pas le cas puisque nous sommes au contraire l'un des pays pour lesquels la durée en centre de rétention est la plus courte possible. Je souhaite d'ailleurs, compte tenu de ces articles d'aujourd'hui, que tous les membres de la commission des lois disposent d'un document extrêmement précis sur ce qu'est la réalité des conditions de rétention dans les CRA, car je constate sur ce sujet, comme sur d'autres, que le décalage est abyssal entre ce qu'on lit dans la presse et la réalité. J'invite d'ailleurs, sans vouloir m'ingérer dans des affaires qui ne me regardent pas, les rapporteurs pour avis du budget à venir vérifier la véracité de ce que j'avance par des contrôles sur pièces et sur place, et autres procédés de contrôle de l'action de l'administration à leur disposition.

Un groupe de travail interministériel a été mis en place pour étudier, dans un souci d'économies de gestion, les possibilités d'améliorer les conditions de gestion des marchés de maintenance, d'entretien des locaux et de restauration. Sur ce dernier point, le projet de rattacher pour la fourniture de plateaux-repas le marché des CRA à celui des gardés-à-vue a été abandonné, les plateaux ne constituant pas des repas adaptés aux conditions de rétention. Je vais vous faire passer toute une série d'éléments sur les marchés relatifs au fonctionnement des CRA qui vous permettront de constater, poste par poste, les économies que nous nous efforçons de réaliser.

Monsieur Collombat me pose des questions de toute nature. Je vais commencer par celles auxquelles il attend des réponses depuis longtemps sans les avoir obtenues.

Vous avez souhaité la remise en service sur votre territoire d'un hélicoptère de la sécurité civile pendant la période estivale. Ce qui a été fait durant cette période pour des raisons de risque spécifiques. Puis l'hélicoptère est reparti.

De fait, il nous faut reconnaître qu'il y a un problème dans ce pays sur la gestion des flottes d'hélicoptères. Nous disposons d'hélicoptères bleus relevant de la gendarmerie, de blancs relevant du ministère de la santé et de rouges de la sécurité civile, auxquels correspondent autant de contrats de maintenance et autant de gestion qu'il y a de ministres fiers de la flotte d'hélicoptères dont ils disposent dans un contexte où pourtant on demande des sacrifices à chacun. Il n'existe pour l'heure aucune réflexion sur une éventuelle mutualisation de la maintenance ou sur la mise en commun d'éventuels marchés de location ou d'acquisition, ce qui, en tant qu'ancien ministre du budget et actuel ministre de l'intérieur gestionnaire d'une flotte, m'agace au plus haut point. Si nous avions une gestion commune des hélicoptères, nous pourrions répondre plus facilement aux sollicitations dans un cadre plus rationnel. Je souhaite pour ma part que nous fassions cet effort de rationalisation. Les hélicoptères, qui sont des moyens de secours d'urgence à la personne et auxquels tiennent beaucoup les élus, ne sont pas forcément nécessaires sur les territoires dès lors qu'il existe d'autres moyens de secours à la personne mobilisables. C'est le cas par exemple au Touquet où les moyens très importants qui peuvent être mobilisés n'empêchent pas le maire du Touquet de m'adresser un mot à chaque séance de questions d'actualité au Gouvernement. Mais dans le contexte de contrainte budgétaire qui est le nôtre, on ne peut fournir autant d'hélicoptères qu'il y a d'élus pour en réclamer.

C'est pourquoi, actuellement j'essaye de rationaliser l'utilisation de la flotte d'hélicoptères, de regarder bassin de vie par bassin de vie les moyens de secours d'urgence à la personne dont les territoires ont besoin afin d'identifier les zones dans lesquelles un hélicoptère est indispensable et celles dans lesquelles on peut mobiliser d'autres moyens moins coûteux. Sans cela, je manquerais à mon devoir de responsabilité eu égard aux contraintes budgétaires, mais également de l'efficacité du service public.

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