Intervention de Éric Bocquet

Réunion du 21 novembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015 — Article 2

Photo de Éric BocquetÉric Bocquet :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, l’article 2 du projet de loi de finances est bien évidemment au cœur de nos réflexions, puisqu’il porte sur le barème de l’impôt sur le revenu. C’est donc l’occasion idéale de parler de justice fiscale !

Ce barème connaît cette année une évolution sensible, puisque la tranche imposée à 5, 5 % disparaît au profit d’une tranche commençant légèrement plus haut, à 14 %.

Pour le Gouvernement, il est clair qu’il convient de faire oublier les dernières lois de finances où le gel du barème, entamé sous la législature précédente, avait précipité dans l’impôt nombre de détenteurs de revenus modestes jusque-là non imposables. Cela mérite tout de même d’être rappelé.

Pour autant, l’orientation fixée par l’article 2 du présent projet de loi de finances présente plus d’un défaut.

Elle contribue tout d’abord à réduire à la portion congrue l’impôt progressif dans l’ensemble de notre fiscalité, laissant une place de plus en plus importante aux droits indirects, dont on sait pertinemment qu’ils frappent plus durement les couches les plus modestes.

Elle contribue ensuite à faire de la contribution sociale généralisée, la CSG, le véritable impôt sur le revenu, proportionnel au demeurant, touchant plus largement chaque contribuable, et pour un rendement autrement plus spectaculaire que celui qui résulte de l’impôt progressif. Ainsi, nous aurions, en 2015, d’un côté, 69, 5 milliards d’euros de produit de l’impôt sur le revenu et, de l’autre, plus de 100 milliards d’euros de rendement de la contribution sociale généralisée, majorée par la contribution au remboursement de la dette sociale, la CRDS.

À force de polariser l’attention sur le barème de l’impôt, on en oublie le véritable débat : celui qui porte sur l’assiette même de l’impôt et qui, de fait, en restreint dangereusement le rendement. On s’en rend compte encore cette année sur le produit de l’impôt 2014.

Quand à peu près 85 % de l’assiette de l’impôt sur le revenu demeure constituée par les salaires ou revenus assimilés et les pensions de retraite, chacun mesure aisément que toute baisse des taux du barème n’est pas une avancée de la justice sociale et fiscale, contrairement à ce que l’on essaie de nous vendre !

Il convient de poser, encore une fois, la question de la prise en compte, dans l’assiette de l’impôt, des revenus du capital et du patrimoine – ils se portent, nous dit-on, de mieux en mieux -, dans un véritable respect du principe constitutionnel d’égalité devant l’impôt.

Malgré les mesures prises depuis 2012, nous sommes, en la matière, encore loin du compte, et force est de constater que l’essentiel de la dépense fiscale liée à l’impôt sur le revenu ne concerne aucunement les salaires ou les retraites.

Nous pourrions être ouverts à toute réflexion sur l’évolution des taux d’imposition, respectant, au demeurant, la progressivité et l’efficacité de l’impôt, si, dans le même temps, des efforts étaient accomplis pour une extension de son assiette, visant notamment à rapprocher celle de l’impôt progressif de celle de la CSG.

Enfin, il convient de mieux prendre en compte la situation des contribuables pour ce qu’elle est et de cesser, en particulier, de modifier les données quand on se retrouve avec un foyer fiscal « bénéficiant », à quelque titre que ce soit, d’une demi-part supplémentaire.

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