Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 21 novembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015 — Article 3

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

J’interviens sur l’article 3 non pour en contester l’utilité, mais pour poser, à ce moment du débat, un certain nombre de questions assez essentielles.

Comme nous avons déjà eu l’occasion de le dire, le recours à la fiscalité n’est pas la panacée. Il me semble cependant qu’il se trouve encore quelques collègues, sur les travées de notre assemblée, pour penser qu’une incitation fiscale généreuse et coûteuse suffit à donner l’impulsion nécessaire aux agents économiques pour investir, agir ou interagir et que la voie de la croissance passe par l’expansion des niches et des dispositifs fiscaux dérogatoires.

La fiscalité ne suffit pas à tout : nous en avons la preuve concrète, tous les jours ou presque, avec les questions liées à la transition énergétique.

Ainsi, ce n’est pas parce que le prix des carburants augmente que les gens remisent forcément leur véhicule au garage. C’est d’ailleurs encore pire quand l’Europe s’en mêle, puisque nous avons, par exemple, découvert que l’Union européenne, certainement sous la pression du lobby des « dieselistes », accepte la déductibilité de la TVA pour le gazole, mais la refuse pour le carburant sans plomb ou le super.

Si nous voulons changer les règles du jeu en la matière, il va donc nous falloir convaincre M. Juncker, et peut-être aussi son commissaire à l’énergie, un ancien du secteur pétrolier, que la position de l’Union européenne est aberrante…

L’Europe est un combat ! Et cette Europe, malgré ses limites et les turpitudes de ses dirigeants passés et présents, devrait aider les pays de l’Union à mener le combat décisif contre le réchauffement climatique.

Alors que l’Union européenne est aujourd’hui la risée du monde entier en raison des politiques d’austérité menées dans presque tous les pays de la zone euro, et même dans ceux qui n’en font pas formellement partie ou n’ont pas adopté la monnaie unique, elle devrait chercher à être à la pointe de la lutte contre les dérèglements climatiques, enjeu décisif du XXIe siècle, comme le rappelait, le 1er octobre dernier, notre collègue Paul Vergès.

La France, pour l’heure, renforce et simplifie son dispositif de crédit d’impôt développement durable, devenu crédit d’impôt pour la transition énergétique, ou CITE.

Le concept change, mais les caractéristiques demeurent. Il s’agit, en travaillant notamment sur les questions d’isolation et de ventilation, de créer les conditions d’une moindre dépense d’énergie pour chaque habitation concernée et de résoudre les problèmes de consommation énergétique liés à l’habitat.

Cette démarche, que nous approuvons, mérite, nous semble-t-il, un effort particulier non seulement sur le plan fiscal, mais aussi sur le plan économique et financier.

Il faut, en effet, favoriser la réalisation de travaux d’amélioration des performances énergétiques dans les logements, individuels comme collectifs, en tenant compte des spécificités de certains territoires – nous soutenons, de ce point de vue, les amendements déposés par nos collègues ultramarins, portant notamment sur les normes climatiques et sismiques – et en mettant en place des financements dédiés, peu onéreux pour les emprunteurs et susceptibles de favoriser la réalisation d’un diagnostic complet des logements et une intervention globale.

Je crois me souvenir que de telles dispositions existent en Allemagne, avec des prêts spéciaux distribués par la banque publique KfW, dont on sait qu’elle a servi de modèle pour notre « petite » Banque publique d’investissement.

Il convient donc d’ouvrir une ligne de crédit accessible à moindres frais aux contribuables et aux organismes bailleurs sociaux pour mettre en œuvre la politique de transition énergétique.

Je souligne ici, par ailleurs, la portée de l’article L. 221-5 du code monétaire et financier, qui dispose que « les ressources collectées par les établissements distribuant le livret A ou le livret de développement durable et non centralisées en application des alinéas précédents sont employées par ces établissements au financement des petites et moyennes entreprises, notamment pour leur création et leur développement, ainsi qu’au financement des travaux d’économie d’énergie dans les bâtiments anciens ».

Cela signifie qu’une modification marginale de cet article, lors de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances ou de celle du projet de loi relatif à la transition énergétique pour la croissance verte, permettrait de créer les conditions d’une allocation particulière des ressources du livret A et du livret de développement durable au financement des travaux visés à l’article 3.

Une telle démarche, soulignons-le, permettrait de compléter utilement un dispositif de crédit d’impôt dont le défaut essentiel est d’exiger du contribuable une avance de frais.

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