Intervention de Thierry Foucaud

Réunion du 21 novembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015 — Article 4

Photo de Thierry FoucaudThierry Foucaud :

La France connaît une grave crise du logement, c’est une lapalissade que de le dire.

Toutefois, assez étonnamment, alors que nous comptons des centaines de milliers de mal-logés, plusieurs dizaines de milliers de sans-abri, moult familles endettées dans des logements privés hors de prix, et je ne sais combien de familles prioritaires au titre du droit au logement opposable, les trois articles 4, 5 et 6 de ce projet de loi de finances ne se placent que du point de vue des investisseurs.

Encore une fois, c’est au travers du prisme de la rentabilité des opérations foncières et immobilières que l’on se situe et non au travers de celui, pourtant autrement plus large, des demandeurs de logement.

Je ne sais pas si l’on peut taxer d’incohérence et d’amateurisme un gouvernement qui nous propose aujourd’hui ces trois dispositions, et notamment celle de l’article 4, et si l’on peut en déduire que la position adoptée cette année est plus « juste » et plus « responsable ». Néanmoins, j’ai tout de même l’impression que les seuls qui y trouveront un intérêt seront toujours les mêmes, à savoir les propriétaires fonciers et les investisseurs immobiliers.

En 2013, les plus-values de cession de biens meubles et immeubles ont concerné moins de 62 000 ménages, pour un montant total de 806 millions d’euros environ.

Dans cet ensemble figuraient des plus-values, réalisées par environ 1 100 foyers fiscaux, ouvrant droit à exonération sous condition de réemploi, pour un montant d’un peu plus de 61 millions d’euros.

Le dispositif visé à l’article 4, me semble-t-il, ne devrait pas concerner une population fiscale beaucoup plus importante et est donc assez éloigné d’une solution durable au problème du logement dans notre pays. En fait, dans l’absolu, il ne devrait que créer un effet d’aubaine pour quelques propriétaires fonciers.

S’agissant des conséquences de la mesure proposée, plusieurs défauts peuvent être évoqués.

D’abord, nous l’avons dit, elle s’adresse à une population fiscale plutôt réduite.

Ensuite, elle risque, dans certaines zones tendues, d’avoir quelques effets pervers en multipliant l’offre foncière relativement chère et en raréfiant l’offre foncière abordable.

Cet effet sans doute inverse de celui des intentions d’origine risque donc de rendre difficile la construction sociale dans les zones tendues.

Enfin, elle risque de favoriser une « minéralisation » accrue des villes, les terrains à bâtir disponibles étant, bien souvent, soit des terrains en attente d’affectation, soit des terres à vocation agricole souffrant d’une absence de succession.

Quoi qu’il en soit, en faisant confiance au seul « bon sens » des acteurs économiques, on se retrouve avec une grande disparité de situations.

À la vérité, seule la disposition votée par l’Assemblée nationale et donnant un relief particulier à l’article en priorisant la cession de terrains à bâtir à destination des bailleurs sociaux pourrait trouver grâce à nos yeux.

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