Les producteurs européens de bananes sont Madère (20 000 tonnes), les Canaries (400 000 tonnes), la Guadeloupe et la Martinique (280 000 tonnes). 70 % de la production antillaise est écoulée sur le marché français et 30 % exportée vers les pays de l'Union. Les producteurs des Canaries vendent l'intégralité de leur production sur le marché espagnol.
On compte 650 producteurs à la Guadeloupe et en Martinique, avec 7 000 emplois directs non saisonniers, la filière constitue le premier employeur privé des Antilles. Elle joue aussi un rôle essentiel pour l'aménagement du territoire en contribuant à fixer dans les zones rurales des populations qui autrement migreraient vers Fort-de-France ou Pointe-à-Pitre, déjà surchargées.
Le marché français de la banane s'établit à 500 000 tonnes, le marché européen à 5,5 millions. La croissance de celui-ci (350 000 tonnes) a été captée par la « banane dollar » en raison des accords négociés depuis 2009. Nous avons obtenu en échange une compensation financière one shot, alors que ces accords ont un effet durable. L'impact des accords est difficile à évaluer car de nombreux paramètres entrent en jeu à court terme : droits de douanes, taux de change, volume de l'offre, etc. Les conséquences ne sont perceptibles que dans la durée, mais les dégâts sont alors irréparables.
Et les mécanismes de sauvegarde sont une imposture. Des seuils d'intervention sont progressifs jusqu'en 2020 : en cinq ans seront autorisés 1,3 million de tonnes supplémentaires, soit 25 % de notre marché. Quand bien même les seuils seraient-ils atteints, le dispositif ne s'appliquerait qu'au dépassement, d'où un effet peu dissuasif... En outre, les clauses de sauvegarde sont difficiles à activer : il faut établir que les dépassements de seuil aboutissent à déstabiliser le marché, ce que est pain bénit pour les avocats internationaux. Le Pérou a ainsi dépassé son quota de 75 %, sans que le mécanisme soit activé...
Nous en sommes réduits à solliciter des compensations financières. Nous préférerions que les questions soient posées en amont. Eurodom s'efforce de faire reconnaître par l'Union européenne qu'il y a des productions tropicales sur son territoire. En outre, ces accords ne portent que sur les prix et laissent de côté les normes environnementales et phytosanitaires. Or la filière, qui a tourné la page du chlordécone, est devenue la plus propre du monde : l'utilisation de produits phytosanitaires a chuté de 75 % et les traitements aériens ont cessé. Il est dommage que nos produits soient concurrencés par des pays où règne le moins-disant social et environnemental.