Intervention de Cécile Cukierman

Réunion du 2 décembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015 — Article 58, amendements 277 58

Photo de Cécile CukiermanCécile Cukierman :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, l’article 58 fait écho à l’article 9, qui consacrait la réduction sensible de la dotation globale de fonctionnement et le mariage forcé des collectivités locales avec la stratégie de désendettement de l’État.

Certes, la minoration des concours budgétaires aux collectivités territoriales s’avère pour l’heure moins importante que prévu, la majorité de droite du Sénat s’étant abritée derrière les travaux et conclusions de la commission consultative d’évaluation des normes pour atténuer d’environ 1 milliard d’euros la ponction réalisée sur les ressources dédiées au secteur public local. La pilule est donc un peu moins amère, mais le fait demeure.

Malgré les 13 000 pétitions de l’Association des maires de France délibérées par les conseils municipaux ou communautaires, les élus de la majorité du Sénat ont admis, dans les faits, le principe d’une réduction des concours de l’État aux collectivités locales.

Nous allons examiner plusieurs amendements dont le seul point commun est de tendre à « limiter la casse », tant l’on sait que la révision à la baisse des concours aux collectivités locales constitue un recul, au regard tant des moyens des politiques locales que du principe de libre administration des collectivités territoriales. Et cette baisse est, a minima, prévue pour encore deux ans.

Parmi les auteurs des amendements, certains portent les revendications des communes rurales, d’autres s’interrogent sur le contenu de la solidarité urbaine, d’autres encore s’interrogent sur la péréquation intercommunale et les compensations de la réforme de la DGF ou nous interpellent sur la situation de l’outre-mer, notamment des communes guyanaises.

Sur ce dernier point, soyons clairs : le plafonnement de la dotation superficiaire doit être abandonné. La superficie des communes de Guyane étant plus grande que celle d’un département métropolitain, il importe qu’elles disposent des moyens de développer des services publics locaux à la hauteur de leur situation.

Par ailleurs, quelle est la place des communes rurales –de loin les plus nombreuses – au regard d’une dotation dont elles sont pour l’heure insuffisamment pourvues, du fait d’un indice logarithmique défavorable ? Nous le savons tous : deux habitants d’une commune de moins de 500 habitants ne comptent que pour un habitant d’une plus grande collectivité. Cet indice est en outre insuffisant pour résoudre les problèmes de ressources, au regard des besoins collectifs, des communes urbaines.

Comment les réalités géographiques et démographiques, par exemple celles des communes ultramarines ou celles des communes de montagne, sont-elles prises en compte ? Qu’adviendra-t-il des nombreux bourgs ruraux que la réforme territoriale va bientôt déposséder du statut de chef-lieu de canton, avec tout ce que cela impliquera in fine ?

Dans ce contexte, mes chers collègues, il fallait au moins voter pour le maintien en euros courants de la dotation forfaitaire pour l’exercice 2015 au niveau de 2014, mais il n’en a pas été ainsi.

Quelques pistes, de notre point de vue, sont toutefois à explorer.

Les efforts opérés en faveur des communes rurales ne peuvent se concrétiser autrement que par la remise en cause profonde et globale de l’indice logarithmique.

Cependant, à la vérité, nous ne sortirons pas de ce débat sans conclure à la nécessité de disposer d’un nouvel outil de péréquation – si tant est que cela soit le sujet, puisque, jusqu’à présent, ladite péréquation a surtout servi de variable d’ajustement à la baisse des concours budgétaires –, et donc de trouver de nouvelles ressources fiscales partagées.

La quasi-disparition de la taxe professionnelle, qui n’a pas, contrairement à ce qui avait été annoncé, résolu les inégalités devant l’impôt entre les entreprises, a bel et bien constitué et constitue encore le point crucial du débat.

Sans impôt économique suffisamment rentable, efficace et juste, il ne peut y avoir de solution totalement acceptable pour les finances locales, notamment en termes d’autonomie des collectivités, c'est-à-dire de capacité à agir au plus près des besoins des habitants, à participer au mouvement général d’une croissance économique repensée.

Donnons donc du temps au temps, mes chers collègues, et respectons l’échéance de 2016 arrêtée par le Gouvernement pour la réforme de la dotation globale de fonctionnement. Cela paraît d’autant plus nécessaire qu’une mission parlementaire va être constituée en 2015 aux fins d’aborder l’ensemble des problématiques évoquées.

C’est sous le bénéfice de ces observations que nous proposons, au travers de l’amendement n° II-277, la suppression de l’article 58 du projet de loi de finances et que nous voterons contre les différents amendements ne visant qu’à de simples ajustements. Il importe de revoir globalement la question du financement et des recettes, afin de permettre à nos collectivités de répondre aux besoins des populations.

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