M. le secrétaire d’État a raison de dire que la question financière n’est pas la seule à expliquer le blocage de la construction de logements. J’ai affirmé la même chose lors de mon intervention dans la discussion sur le budget du logement. Il y a des freins. C’est d’ailleurs pourquoi j’expliquai que, malgré l’engagement du Président de la République de doubler l’aide à la pierre, nous considérions que le niveau d’aide à la pierre, qui n’est pas élevé, qui pourrait paraître insuffisant, était néanmoins raisonnable au regard du nombre de constructions réelles que nous étions en mesure de bâtir cette année. Je n’ai donc pas fait de la surenchère quant à l’inscription du niveau de l’aide à la pierre qui était nécessaire.
La question qui nous occupe est tout autre : qui doit financer cette aide à pierre ? Je le sais, monsieur le secrétaire d’État, chaque ministre, à Bercy ou ailleurs, pense qu’il dirige effectivement son administration. Or quand on a la malchance, comme moi, de suivre un sujet sur vingt ou trente ans, on se rend compte qu’il existe des stratégies administratives qui, en dépit des choix gouvernementaux, reviennent, avec des coups d’accélérateurs selon les gouvernements en fonction de leurs choix politiques, mais qui in fine inscrivent ce que la haute administration a essayé de faire. On a beau résister et résister encore, peu à peu, grignotage par grignotage, elle atteint son but.
Que se passe-t-il avec la CGLLS ? Il s’agit de cotisations. Jean-Claude Boulard a raison de le dire, c’est chaque organisme qui cotise à la CGLLS. Voilà des années, monsieur le secrétaire d’État, que le monde HLM demande la baisse de ces cotisations afin de reconstituer les fonds propres dans les organismes. Mais l’État étant majoritaire, il refuse de les baisser. §Il nourrit donc la bête, si je puis dire, CGLLS au-delà du raisonnable. Pendant longtemps, Bercy a expliqué qu’en raison des risques bancaires des fonds devaient être stockés à la CGLLS. Le jour où l’État a besoin de cet argent, il prétend que, finalement, il n’était pas nécessaire de le stocker et que le risque était mal évalué !
Les organismes d’HLM sont donc sans cesse ponctionnés pour donner de prétendues garanties financières, et une fois que les caisses de la CGLLS sont pleines, le risque disparaît, et l’État y puise ce dont il a besoin.
L’argent de la CGLLS pourrait néanmoins servir à autre chose : il pourrait financer le logement HLM accompagné. En effet, vous le savez bien, mes chers collègues, le niveau des loyers est, dans nombre de secteurs, inadapté à la situation des très pauvres. Nous aurions donc besoin de stocks de financements complémentaires afin d’accompagner le niveau de loyer pour la partie du parc correspondant aux personnes très pauvres. Obtenir 10 000 logements HLM accompagnés pour les très pauvres a été le drame du siècle ! Regardez tous les gens à la rue, mes chers collègues, regardez tous ceux qui relèvent du DALO, le droit au logement opposable, que nous n’arrivons pas à placer dans le parc existant et voyez à quel point ce type de logements est nécessaire et quelle est l’ampleur de l’enjeu !
Il y a peut-être de l’argent à utiliser à la CGLLS. Le mouvement HLM est prêt à examiner avec l’État comment l’employer ; il avait même passé avec lui un contrat portant sur une partie de cet argent. Pourtant, aujourd’hui, alors qu’un contrat a été signé, on vire de bord, la CGLLS nous explique que l’on va prendre cet argent. Pardonnez-moi, monsieur le secrétaire d’État, mais ce n’est pas conforme à l’engagement que François Hollande avait pris et devant le mouvement HLM et devant la Fondation Abbé Pierre. §