Seulement voilà ! les temps changent, et le rôle de l’État est de relever le défi de la formation d’un nombre toujours plus important de jeunes, selon des rythmes scolaires adaptés.
Disons-le clairement : on peut légitimement protester contre le transfert aux collectivités locales de l’organisation d’une bonne partie du temps scolaire ou périscolaire, mais on n’a pas le droit, alors, de proposer des suppressions massives de postes d’enseignants !
Limiter ne signifie pas rejeter : cela suppose même d’accepter ! Je fais là référence à la position de la droite sénatoriale sur la question de la DGF. Alors même que près d’un conseil municipal sur deux dans notre pays s’est exprimé, avec l’Association des maires de France, contre la baisse de la DGF, la majorité du Sénat a accepté une sorte de pis-aller en se contentant de limiter la réduction de cette dotation.
Vous n’avez pas, mes chers collègues, ni d’un côté ni de l’autre, respecté les demandes de vos propres mandants !
En acceptant la réduction des dotations budgétaires aux collectivités locales, au nom du calcul « fumeux » faisant du secteur public local l’un des responsables de la crise des finances publiques, vous avez exprimé votre position de fond, c’est-à-dire le respect aveugle des orientations européennes, de la trajectoire de réduction de la dette et des déficits publics, qui nous mène, nous le constatons tous les jours, droit dans le mur !
Il est plus facile de « taper » dans le budget des collectivités locales ou dans la poche des salariés et des retraités que d’aller chercher l’argent là où il se trouve.
Très symboliquement, au travers de son dernier amendement, M. le rapporteur général nous proposait d’inviter le Gouvernement à remettre au Parlement un rapport sur l’imposition des patrimoines et des revenus patrimoniaux, sans doute au motif que certains, dans la bourgeoisie de ce pays, estiment payer trop en impôt sur la fortune, en taxation des plus-values, en contributions sociales sur leurs biens fonciers, immobiliers et mobiliers.
Monsieur le rapporteur général, je vous pose la question : un salarié disposant de vingt-deux ans d’ancienneté dans la même entreprise bénéficie-t-il, au moment de payer l’impôt sur le revenu, d’une décote de 3 % par année de présence ? Je ne le crois pas. Et le seul acquis de ce salarié, en cas de licenciement, ce sera le niveau de l’indemnité qui pourra lui être versée !
Les votes de la droite sénatoriale n’ont qu’un avantage : non pas donner au projet de loi de finances pour 2015 des couleurs de gauche qui ne sont pas les siennes, mais montrer que la baisse des dépenses publiques n’est pas la voie de la réduction du déficit et de la dette publique.
Mes chers collègues, pour effacer la dette publique, il faudrait trente à quarante années de la purge budgétaire que s’apprête à voter la majorité du Sénat pour l’année prochaine ! Autant dire que c’est du côté des recettes, de la justice fiscale et de l’efficacité économique des prélèvements qu’il faut aller chercher la solution à nos problèmes.
Monsieur le secrétaire d’État, vous savez que nous avons formulé des propositions en ce sens : vous nous avez entendus les défendre dans cet hémicycle. Du reste, vous avez suivi nos travaux en permanence, et je vous en remercie.
Je conclurai sur cette question des recettes en citant les mots prononcés par Gilles Carrez à l’Assemblée nationale le 1er décembre dernier, lors de l’examen du collectif budgétaire. Face aux multiples diminutions de taxation, il a conclu : « À force d’accumuler les crédits d’impôt, comme le crédit d’impôt compétitivité recherche ou le crédit d’impôt recherche, à ce rythme-là, bientôt, il n’y aura plus du tout d’impôt sur les sociétés ! » Ce propos peut s’étendre à l’impôt sur le revenu.
En supprimant moult crédits d’impôts et mesures diverses, nous avons de quoi remettre d’aplomb les recettes de l’État et améliorer l’état des comptes publics. Toutefois, cela suppose d’autres choix, des choix de gauche, là où, pour l’heure, nous ne trouvons que des mesures d’austérité.
Vous l’aurez compris : nous n’aurions pas voté le texte du Gouvernement…