Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce débat intervient entre le vote final, hier soir, sur le projet de loi de finances et le début de l’examen du projet de loi de finances rectificative, prévu demain.
Or, déjà, nous nous projetons dans les textes financiers de l’année prochaine, puisque, lors du Conseil européen des 18 et 19 décembre, la Commission européenne présentera son examen annuel de croissance.
Cette présentation marque le début du semestre européen, au cours duquel la France exposera son programme de stabilité et son programme national de réforme et qui se conclura en juin ou en juillet par l’adoption des recommandations du Conseil, dont nous devrons tenir compte pour l’élaboration de notre prochain budget.
Le Conseil examinera la semaine prochaine « de nouvelles mesures pour stimuler la croissance, l’emploi et la compétitivité européenne ».
Pour atteindre cet objectif, le plan d’investissement proposé par le nouveau président de la Commission est important, mais son impact macroéconomique, même s’il représentait 0, 8 point de produit intérieur brut comme envisagé, ne nous dispenserait pas de conduire à l’échelle européenne une politique économique adaptée aux circonstances.
Les finances publiques constituent un élément essentiel de la politique macroéconomique, et si la poursuite du redressement budgétaire constitue une nécessité, la consolidation budgétaire ne doit pas être obtenue au détriment de la croissance économique, sauf à devenir inefficace. La Commission européenne elle-même appelle à des « politiques budgétaires responsables et propices à la croissance ».
C’est ce à quoi s’attache le Gouvernement à travers la baisse de la fiscalité des ménages, le déploiement du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi et la mise en œuvre du pacte de responsabilité. Une telle logique nous paraît devoir être défendue et étendue au sein de la zone euro.
La France, elle l’a montré avec l’effort supplémentaire de 3, 6 milliards d’euros consenti pour 2015, joue le jeu européen. Toutefois, la croissance européenne sera menacée si, dans le même temps, les États qui disposent de marges de manœuvre budgétaires ne suivent pas les recommandations qui leur sont adressées. Je vous rappelle que, dans son avis sur le projet de budget de l’Allemagne, la Commission européenne invite cette dernière, eu égard à ses marges budgétaires et à ses taux d’intérêt, à accroître ses investissements publics. Le fera-t-elle ?
En tout état de cause, la France doit continuer de soutenir au sein des institutions européennes l’idée que le rythme de réduction des déficits ne doit pas compromettre la reprise.
Pour stimuler la croissance et l’emploi dans la zone euro, la politique monétaire est évidemment essentielle, mais c’est l’initiative de la Commission visant à mobiliser 310 milliards d’euros en faveur de l’investissement sur la période 2015-2017 qui est à l’ordre du jour du Conseil. La part des investissements dans le produit intérieur brut de la zone euro a reculé de plus de 3 points entre 2007 et 2013, et il ne fait aucun doute qu’une relance est indispensable.
À une semaine du Conseil, ce plan d’investissement ressemble à un ensemble de poupées gigognes, puisque 8 milliards d’euros issus du budget européen deviendraient 16 milliards, puis 21 milliards d’euros de garanties accordées par l’Union européenne et la Banque européenne d’investissement, qui émettrait 60 milliards d’euros d’obligations, destinés à être investis dans des projets d’un montant de 315 milliards d’euros. L’effet de levier, cela a été dit à plusieurs reprises, serait de 1 à 15.
Au-delà des modalités pratiques qui devront être trouvées pour orienter les fonds levés vers les projets qui en ont le plus besoin, la question qui se pose est de savoir dans quelles conditions un tel dispositif parviendra à susciter plus d’investissements que ceux que le secteur privé avait de toute façon prévu de réaliser.
Je conclurai en évoquant le sujet de la réforme bancaire, car la Commission européenne a laissé entendre qu’elle pourrait ne plus faire partie des priorités de l’agenda. Cette réforme, qui séparerait également l’activité de tenue de marché opérée par les banques françaises, n’a pas les mêmes contours que celle qui a été adoptée en France en 2013.
Faut-il laisser vivre notre dispositif français ou faut-il déjà le modifier en mettant en œuvre la réforme qui était envisagée par Michel Barnier ? Je souhaite que la commission des finances étudie les conséquences de la mise en œuvre de la réforme votée en 2013, qui est applicable depuis cette année.
Monsieur le secrétaire d’État, disposez-vous d’informations sur les intentions de la Commission européenne s’agissant de l’inscription à l’ordre du jour européen de cette réforme proposée par l’ancienne Commission ?
Je compte sur vous pour nous indiquer dans quelles dispositions d’esprit le Gouvernement aborde l’ensemble de ces sujets, à une semaine du Conseil européen.