Intervention de Laurence Rossignol

Réunion du 11 décembre 2014 à 9h00
Protection de l'enfant — Discussion d'une proposition de loi dans le texte de la commission

Laurence Rossignol, secrétaire d'État :

Le soutien à la parentalité n’est en aucun cas antinomique avec la défense des droits des enfants.

Pour réussir cette démarche ambitieuse, qui requiert minutie, attention et discernement, j’ai la conviction que nous devons renouveler notre approche, nous inscrire dans un processus atypique, qui va, dans les faits, au-delà de la concertation.

Il faut pousser encore la démarche de concertation, proche d’une forme de conférence de consensus. Nous aurons besoin non seulement d’intégrer les acteurs à la démarche, mais aussi de les faire adhérer aux conclusions auxquelles nous aboutirons.

Aujourd’hui, ce que je souhaite, c’est que soit envoyé à l’Assemblée nationale un texte qui aura rassemblé le Sénat. Je souhaite que la Haute Assemblée porte le consensus.

Être capable de remettre en question ses pratiques, permettre à chacun de s’exprimer, écouter la parole des premiers qui sont concernés, c'est-à-dire des enfants : nous devons mettre tous les sujets sur la table. Pour aller au bout de cette démarche, il nous faut également parler des angles morts, des non-dits.

Aux deux finalités de la protection de l’enfance, qui sont, d'une part, protéger l’enfant, et, d'autre part, restaurer une autorité parentale défaillante, j’en ajoute une troisième, que j’érige à la hauteur des deux autres : assurer aux enfants un cadre affectif stable. Cette troisième finalité doit nous amener à réfléchir à ce que nous pouvons proposer à l’enfant, lorsqu’il n’est pas possible de restaurer l’autorité parentale défaillante.

Bien sûr, nous sommes interpellés par ces situations, et la question du droit des personnes se pose. Notre optimisme, notre foi en l’homme nous poussent à refuser le déterminisme, à croire aux prises de conscience, à l’évolution, à l’éducation, au travail social. Pour autant, nous ne pouvons pas sacrifier l’enfant sur l’autel de ces principes.

À nous donc d’être créatifs, de repenser peut-être l’autorité parentale, d’en distinguer l’exercice et l’attribut, d’inventer une troisième voie. En effet, on peut être le parent sans être l’éducateur de l’enfant ; on peut maintenir le lien entre l’enfant et les parents tout en confiant à un tiers l’exercice de l’autorité parentale.

Je vois fréquemment les anciens mineurs de l’ASE, l'aide sociale à l'enfance. L’un d’entre eux m’a dit : « Moi, j’avais un père et un papa » ; une autre a eu cette phrase : « Ma mère m’a mise au monde, ma maman m’a élevée ». Avons-nous le droit de rester insensibles à ces réalités, d’être en quelque sorte psychorigides face à des réalités que les enfants acceptent et auxquelles ils s’adaptent naturellement, tout simplement parce qu’il s’agit de leur vie ?

Ces non-dits – ils le sont moins, maintenant que j’en ai parlé – feront, j’en suis sûre, l’objet de riches débats au sein de cette assemblée, débats que je souhaite apaisés et mus par l’unique intérêt de l’enfant.

Mesdames, messieurs les sénateurs, si les amendements du Gouvernement n’ont pas pu être examinés en commission, ce n’est pas par un manque de respect à l’égard de cette assemblée, que j’aime particulièrement, comme vous le savez. Cela tient plutôt au déroulement de la concertation que j’ai engagée, dans un souci de cohérence du travail, des démarches et des calendriers. Je préfère que nous étudiions ensemble ces amendements avant la prochaine séance, afin que nous prenions le temps de construire ces consensus que j’appelle de mes vœux.

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