Intervention de Bernard Seillier

Réunion du 30 novembre 2007 à 15h00
Loi de finances pour 2008 — Travail et emploi

Photo de Bernard SeillierBernard Seillier :

Monsieur le président, madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, lors de ce débat budgétaire sur les crédits de la mission « Travail et emploi », je souhaiterais aborder le sujet de la formation professionnelle, qui s'inscrit notamment dans le cadre des programmes « Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi » et « Accès et retour à l'emploi ».

Comme vient de le rappeler voilà quelques instants ma collègue Catherine Procaccia, la mission commune d'information sénatoriale sur le fonctionnement des dispositifs de formation professionnelle, dont j'étais le rapporteur, a mis en évidence la complexité, les cloisonnements et les corporatismes dont souffre notre système.

L'insuffisance de nos dispositifs a une conséquence majeure : la formation ne va pas à celles et à ceux qui en ont aujourd'hui le plus besoin. Le taux de départ en formation dans les TPE est de 12 %, contre 22 % dans les PME de 10 à 50 salariés et contre plus de 40 % pour l'ensemble des entreprises.

La question qui se pose à nous aujourd'hui est de savoir si les crédits de la mission « Travail et emploi » permettent d'investir avec efficacité dans la formation professionnelle et l'apprentissage.

La réforme du service public de l'emploi implique celle de la formation professionnelle.

S'agissant de la formation des jeunes, les dispositifs d'alternance seront renforcés en 2008, avec 285 000 contrats d'apprentissage, soit 10 000 de plus que cette année, et avec 140 000 contrats de professionnalisation, soit 5 000 de plus que le nombre inscrit dans le budget pour 2007.

Quant aux personnes les moins qualifiées, elles devront pouvoir accéder plus facilement à la formation professionnelle continue. Le budget pour 2008 prévoit par conséquent une augmentation très sensible des crédits destinés aux demandeurs d'emploi en fin de droits, qui passent de 115 à 200 millions d'euros, soit une progression de près de 80 %.

L'institution qui naîtra de la fusion entre l'ANPE et l'UNEDIC, souhaitée par la mission commune d'information, jouera un rôle majeur non seulement dans les régions les plus touchées par les restructurations, mais aussi dans celles où les offres d'emploi ne sont pas satisfaites.

L'expérimentation du contrat de transition professionnelle constitue un élément fondamental dans le cadre de cette réforme, puisqu'il allie prise en charge matérielle, mise en situation d'emploi et actions de formation.

La mission commune d'information a souhaité que soit poursuivie de façon volontariste la mise en place de guichets uniques, dédiés, d'une part, à l'information et à l'accueil, et, d'autre part, à la prescription, afin d'améliorer le service rendu aux personnes et donc les conditions d'accès de ces dernières à la formation.

Le besoin de formation professionnelle concerne également les adultes. Une réflexion sur l'avenir de l'AFPA est sur le point d'être lancée, une fois achevé le processus de décentralisation initié en 2004. Dans la même logique, il me semble indispensable de tenir compte de l'avis de la mission commune d'information, qui préconise de rapprocher les services d'orientation de l'AFPA de ceux qui résulteront de la fusion de l'ANPE et de l'UNEDIC.

Le plan régional de développement des formations professionnelles doit, quant à lui, jouer un rôle pivot, en favorisant la coordination de l'ensemble des acteurs dans les domaines de l'accueil, de l'information, de l'orientation ou de la définition des programmes, afin de rendre la formation professionnelle accessible à l'ensemble des publics et adaptée aux besoins sur l'ensemble du territoire régional.

La baisse de 12 % des crédits relatifs à l'accès à la qualification s'explique par la suppression, proposée à l'article 53 du présent projet de loi de finances, des exonérations spécifiques liées aux contrats de professionnalisation, ce qui entraînera une économie estimée à 140 millions d'euros. Ces exonérations, portant notamment sur les cotisations au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles, ont effectivement soulevé une critique de fond, eu égard à la stratégie de prévention mise en place.

Mais, dans l'urgence, je me félicite de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement tendant à maintenir le régime d'exonérations spécifiques au profit des groupements d'employeurs pour l'insertion et la qualification de jeunes de moins de vingt-six ans ou de demandeurs d'emplois de quarante-cinq ans ou plus sous contrat de professionnalisation.

En attendant une réforme de fond du mécanisme de financement et de soutien de ces groupements d'employeurs, il était indispensable de donner à ces derniers des assurances sur le court terme, mais aussi, cela va de soi, sur le long terme. Ils jouent en effet un rôle essentiel en matière d'insertion et devraient connaître un développement important, car ils associent harmonieusement la stimulation dans l'effort en situation de professionnalisation et l'accompagnement dans l'adaptation à l'emploi.

Madame, monsieur les ministres, mes chers collègues, je souhaiterais maintenant aborder deux points qui peuvent faire débat.

Le premier concerne la suppression de l'aide au remplacement des salariés en formation, aide accordée aux entreprises de moins de 50 salariés pour leur permettre d'assurer le remplacement d'un ou plusieurs salariés en formation.

Je n'ignore pas que seules 776 conventions ont été conclues en 2005, 828 en 2006 et 711 de janvier à septembre 2007. Je n'ignore pas non plus que le recours par les employeurs à l'aide au remplacement de salariés en formation est resté extrêmement limité, et d'un niveau comparable à celui qui était observé avant la réforme.

Pour autant, cette suppression est-elle justifiée ?

Comme je viens de le rappeler, notre effort de formation bénéficie surtout aux grandes entreprises et pas assez aux petites. Or, dans celles-ci, le départ en formation d'une seule personne peut créer un vide impossible à supporter. Je souhaiterais savoir comment le Gouvernement compte pallier la suppression de ce dispositif et favoriser l'accès à la formation professionnelle dans les entreprises de moins de dix salariés, pour lesquelles la formation est incontestablement un gage de pérennité.

La mission commune d'information sénatoriale a clairement exprimé la volonté d'encourager et de développer, au profit des TPE et PME, un service de remplacement des salariés partis en formation. C'est une question qui nous a semblé cruciale et à laquelle il faudra absolument trouver des réponses.

Il est par ailleurs indispensable de développer la fonction de conseil, d'ingénierie et d'accompagnement pour la formation professionnelle. De notre point de vue, les « organismes paritaires agréés » peuvent jouer un rôle important, et ils ont d'ailleurs pris conscience de cette nouvelle orientation qui s'impose à eux.

Le second point qui peut faire débat concerne l'amputation des crédits de la formation professionnelle consacrés à la validation des acquis de l'expérience, la VAE.

Il faut en effet noter une réduction de 18 millions d'euros de la dépense d'intervention pour la VAE, dans le cadre de la politique de certification mise en oeuvre par l'AFPA pour permettre à toute personne de faire valider ses acquis en vue de l'obtention d'un diplôme ou d'un titre.

La validation des acquis de l'expérience connaît un rythme de développement soutenu : depuis 2003, 300 000 personnes ont assisté à des réunions d'information. Toutefois, comme l'a relevé l'Inspection générale de l'éducation nationale dans un récent rapport, seulement 0, 5 % de la population active a participé à une réunion d'information sur la validation des acquis de l'expérience en 2004, et il est par conséquent indispensable de donner un nouvel élan à cette voie de certification.

En effet, la mission commune d'information a pu identifier, au cours de ses auditions, certaines limites au dispositif.

Tout d'abord, la démarche de la validation des acquis de l'expérience s'inscrit dans un processus lourd, long et complexe. Ainsi, en 2005, plus de 30 % des candidats ont abandonné la procédure en cours. Par ailleurs, cette procédure, qui repose sur la présentation d'un dossier écrit, peut décourager ceux qui ont été marqués par un échec à l'école. Il faut, sur ce point, avoir une approche plus pragmatique et moins académique que celle qui a prévalu jusqu'ici dans la conception de la validation des acquis de l'expérience.

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