Intervention de Vincent Delahaye

Réunion du 17 décembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015– programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 — Rejet en nouvelle lecture de deux projets de loi

Photo de Vincent DelahayeVincent Delahaye :

Optimiste, vous l’êtes depuis le début !

Vous en revenez toujours à l’opposition entre optimisme et pessimisme, on discute toujours à partir de vos propres hypothèses et, à la fin, nous ne sommes jamais d’accord avec vous !

La prévision que vous nous avez annoncée le 15 décembre se réalisera, nous dites-vous, le 31 décembre. Sur ce point, je suis d’accord avec vous : oui, nous atteindrons sans doute 0, 4 % de croissance pour 2014 !

Mais, au début de l’année, vous parliez d’une croissance à 1 %, avant d’annoncer, au mois de juillet, qu’elle serait de 0, 7 % ; nous vous avions alors répondu que nous n’atteindrions pas ce taux.

Aujourd’hui, vous pariez sur un taux de 0, 4 %. Nous ne vous contredirons pas sur ce point, mais je crois qu’il faut tout de même faire preuve sérieux en matière de prévisions.

Pour élaborer un projet de loi de finances ou un projet de loi de programmation des finances publiques, il faut se fonder sur des hypothèses prudentes. Tant que ce ne sera pas le cas, nous n’aurons jamais de bonnes nouvelles, nous n’en aurons que des mauvaises, qu’il s’agisse du projet de loi de finances rectificative ou du projet de loi de règlement.

Vous nous proposez un projet de loi de programmation des finances publiques. Pour notre part, nous sommes favorables à la programmation, mais elle suppose de la crédibilité, et non pas, toujours, de l’instabilité.

Le programme de stabilité de la France a été présenté à Bruxelles au mois d’avril dernier. Six mois plus tard, en novembre, il est complètement contredit par le projet de loi de programmation des finances publiques, en termes de croissance, de déficit ou de retour à l’équilibre ; celui-ci, annoncé pour 2017, est désormais repoussé à 2019 ! Comment pourrions-nous vous suivre sur ce terrain, monsieur le secrétaire d’État ?

Il est écrit dans le projet de loi de programmation des finances publiques qu’il a fallu revoir complètement la copie budgétaire en raison de circonstances exceptionnelles. Lesquelles ? Au cours des six derniers mois, je ne les ai pas vues !

Le même texte prévoit une croissance de 1 % pour 2015, de 1, 7 % pour 2016, de 1, 9 % en 2017 et de 2 % par la suite. Cette hypothèse est hyperoptimiste ! Et nous ne sommes pas les seuls à le dire ! Un mois plus tard, dans le projet de loi de finances pour 2015, vous l’aviez d’ailleurs corrigée : il ne s’agit plus de 1 % de croissance, mais de 0, 9 %...

Il faudrait cesser de poser des hypothèses aussi optimistes. Pour ma part, j’avais proposé à plusieurs de vos prédécesseurs de retenir un taux de croissance faisant consensus, puis de lui soustraire 0, 5 point. Ainsi, nous serions plus proches de la vérité et les éventuelles erreurs seraient en fait de bonnes nouvelles puisqu’il faudrait les corriger dans un sens positif.

Nous ne pouvons pas approuver ce projet de loi de programmation des finances publiques dans la mesure où il retarde le retour à l’équilibre et ne contient aucune des réformes de structure que nous attendons depuis fort longtemps.

Pour ce qui concerne le projet de loi de finances pour 2015, nous constatons que les amendements adoptés au Sénat n’ont reçu un accueil favorable ni du Gouvernement ni de l’Assemblée nationale, ce que l’on peut regretter.

Ce projet de budget prévoit toujours des déficits très élevés. Je ne dis pas qu’ils n’existaient pas avant vous, monsieur le secrétaire d’État, ni que vous êtes responsable de la situation budgétaire actuelle de la France. Seulement, depuis que vous êtes aux affaires, la situation est loin de s’être améliorée, contrairement à ce que vous dites : son évolution en 2014 – on l’a vu au travers du projet de loi de finances rectificative – prend la forme d’une augmentation du déficit.

En 2015, le déficit sera également très élevé puisqu’il atteindra 75 milliards d’euros. La croissance prévisionnelle et les recettes sont encore, à mon avis, surévaluées, et très peu d’efforts sont faits pour réduire les dépenses. Sur ce point, nous ne pouvons pas être d’accord avec vous, monsieur le secrétaire d’État : nous ne pourrons réduire la dépense publique qu’en mettant en place des réformes de fond.

Ces réformes, nous ne les voyons pas venir. La stratégie « météo » du chef de l’État consiste à dire qu’il fera beau demain et qu’après la pluie vient le beau temps. On a l’impression que vous attendez que la croissance revienne comme par miracle et que tout se rééquilibre. Or ce n’est pas ce qui va se passer !

Nous vivons actuellement une période de fortes tensions ; nous le voyons en Russie, en Grèce et ailleurs. Nous sommes à la merci d’un risque non négligeable, dont la survenue serait dramatique pour le financement des déficits et pour le niveau des dettes souveraines : celui d’un retournement de l’orientation des taux, qui viendrait s’ajouter à une conjoncture internationale de plus en plus déprimée.

Le jour où cela arrivera, nous n’aurons plus que nos yeux pour pleurer et nous pourrons regretter de ne pas avoir prévenu cette situation, mais il sera trop tard ! Certains diront : « C’est la faute des marchés ! » D’ailleurs, on les entend déjà, mais ils ne remercient pas lesdits marchés de nous prêter à des taux si bas !

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