Intervention de Philippe Dallier

Réunion du 17 décembre 2014 à 14h30
Loi de finances pour 2015– programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019 — Rejet en nouvelle lecture de deux projets de loi

Photo de Philippe DallierPhilippe Dallier :

Ces 100 milliards d’euros d’économies seront principalement obtenus grâce à des réformes structurelles, telle une nouvelle réforme des retraites. François Rebsamen en a parlé hier, avant d’être immédiatement recadré. À cet égard, nous sommes un certain nombre, y compris au sein même du Gouvernement, à penser qu’une telle réforme est nécessaire. Peut-être faudrait-il en parler dès à présent plutôt que d’attendre encore ?

Deux de nos régimes complémentaires sont au bord de la faillite, mais cela se produit dans un silence assourdissant… Allons-nous réduire les pensions, augmenter les prélèvements ? Ce débat n’est pas mis sur la table.

Des réformes du marché du travail seront nécessaires. Le Premier ministre a évoqué un contrat unique – le CDI ou le CDD ? –, mais, le sujet remuant la majorité, le dossier a été enterré. Ne faudra-t-il pas un jour réfléchir à cette question ?

Des réformes de la formation professionnelle, de l’enseignement scolaire et de bien d’autres secteurs encore permettraient soit de réaliser directement des économies, soit de défaire les carcans entravant notre économie. Elles favoriseraient la croissance et l’emploi et permettraient de diminuer le coût social de la crise dans laquelle la France demeure empêtrée.

Nous avons également rejeté les crédits de certaines missions pour des raisons d’insincérité budgétaire. Les rejets ont été ciblés et mesurés. Permettez-moi de rappeler, mes chers collègues, que lorsque vous étiez dans la position qui est la nôtre aujourd'hui, vous aviez rejeté vingt-deux des trente-deux missions. Ne venez donc pas nous donner de leçons aujourd'hui, alors que vous avez fait exactement la même chose que nous. Ayez un peu de mémoire !

Je reviendrai maintenant en quelques mots sur nos votes en première lecture.

Nous avons redonné du pouvoir d’achat aux familles des classes moyennes, qui sont les véritables oubliées de ce quinquennat et sur lesquelles l’effort fiscal s’est concentré.

Contrairement à ce qu’a déclaré le Gouvernement, il n’y aura pas de pause fiscale en 2015. Il faut en fait comprendre du discours qu’il tient qu’aucune nouvelle taxe ne sera votée en 2015, et encore, nous verrons. Un certain nombre de familles verront bien leurs impôts et les prélèvements de toutes natures augmenter l’an prochain. Le décalage entre l’opinion publique et vous, chers collègues de l’opposition sénatoriale, n’en sera que plus grand. Les gens ne comprendront pas : alors que vous leur aurez dit une chose, ils constateront le contraire !

La suppression de la première tranche de l’impôt sur le revenu concentrera par ailleurs encore un peu l’effort sur les classes moyennes.

Les familles, quant à elles, sont victimes de la baisse, à deux reprises, du plafond du quotient familial et de mesures fiscales, inscrites dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015, qui les affectent fortement. C’est la raison pour laquelle nous avons tenu à porter le plafond du quotient familial de 1 500 euros à 1750 euros. Cette mesure bénéficierait à 1, 3 million de foyers, soit 3 millions de personnes.

Nous avons également souhaité rendre nos entreprises plus compétitives en favorisant leurs investissements, car c’est là que se situe la clef du problème.

Le budget pour 2015 ne comporte en effet initialement aucune mesure en faveur des entreprises. Rappelons que le pacte de responsabilité et le CICE permettront juste de compenser péniblement les hausses sans précédent de la fiscalité sur les entreprises intervenues en 2012 et en 2013.

Rappelons également que les entreprises seront touchées en 2015 par les effets de mesures prises antérieurement : prolongation de la surtaxe sur l’impôt sur les sociétés – 2 milliards d’euros –, moindre déductibilité des frais financiers – 1, 3 milliard d’euros –, impact du pacte de responsabilité sur l’impôt sur les sociétés – 800 millions d’euros – et hausse des cotisations de retraite – 500 millions d’euros.

Il importait donc pour nous de soutenir davantage nos PME, dont les taux de marges n’ont jamais été aussi faibles. Nous allons probablement encore – cela a déjà été le cas en 2013 – battre un record de faillites d’entreprises en 2014. Telle est la situation, mes chers collègues.

Afin de soutenir les investissements productifs des entreprises et leur faire gagner de la valeur ajoutée – c’est le point faible des entreprises françaises –, l’amortissement des matériels pourrait ainsi se faire sur une durée raccourcie.

Par ailleurs, nous avons souhaité préserver les capacités d’investissement des collectivités locales. Nous avons supprimé le fonds de soutien à l’investissement local, qui réalise en réalité un véritable hold-up sur les fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle. On reprenait d’une main ce que l’on avait présenté de l’autre comme un cadeau aux collectivités locales. C’était assez fort de café !

Surtout, et c’est le point le plus important pour nos collectivités territoriales, le Gouvernement réduira leurs dotations de 3, 7 milliards d’euros l’an prochain, et ce sans concertation. L’annonce a été faite immédiatement après les élections municipales, ce qui est tout de même une très mauvaise manière.

Les conséquences de ces baisses, nous les connaissons. Il en résultera, c’est une quasi-certitude, une chute d’au moins 30 % de l’investissement public. Les entreprises du bâtiment et des travaux publics sont dans la rue. Les plans de licenciement ne manqueront pas, vous le savez, mes chers collègues, car les carnets de commandes sont en train de se vider.

Il en résultera également une augmentation assez générale de la fiscalité locale. Chers collègues de l’opposition sénatoriale, vous annoncez aux Français que vous en avez fini avec les augmentations d’impôts, mais vous passez le mistigri aux maires et aux présidents de conseils généraux, qui, eux, n’auront pas d’autre possibilité que d’augmenter les impôts, …

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