Monsieur le président, mesdames les ministres, madame la secrétaire d'État, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, en ma qualité de présidente de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes, je concentrerai mon intervention sur les crédits consacrés à l'action publique en faveur des droits des femmes dans le projet de loi de finances pour 2008.
La politique menée pour promouvoir l'égalité entre les hommes et les femmes bénéficie des crédits d'un programme spécifique au sein de la mission interministérielle « Solidarité, insertion et égalité des chances ».
Les crédits de paiement prévus pour ce programme en 2008, d'un montant total de 28, 5 millions d'euros, restent stables par rapport aux crédits votés pour 2007.
En dehors des crédits affectés aux moyens de fonctionnement humains et matériels du service des droits des femmes et de l'égalité, à l'échelon national comme à l'échelon déconcentré, qui progressent faiblement, avec 10, 66 millions d'euros et 200 emplois en équivalent temps plein travaillé, ces crédits sont consacrés à des dépenses d'intervention, dont le montant - 17, 84 millions d'euros - n'augmente pas cette année. Or les besoins se font de plus en plus croissants, notamment dans le domaine des violences intrafamiliales ou dans celui de l'« imparité salariale » - j'assume le néologisme.
Ces dépenses d'intervention sont pour l'essentiel destinées à deux actions tendant à favoriser respectivement l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes et l'égalité en droit et en dignité des femmes et des hommes.
S'agissant de l'égalité professionnelle, je me réjouis que ce sujet ait été retenu comme une priorité pour l'action du Gouvernement, conformément aux engagements pris par le Président de la République, et je remercie M. Xavier Bertrand, ministre du travail, des relations sociales et de la solidarité de m'avoir invitée à participer à la très enrichissante Conférence sociale tripartite sur l'égalité professionnelle et salariale entre les hommes et les femmes, qui s'est tenue lundi 26 novembre dernier.
Je déplore que, en dépit des nombreuses lois déjà adoptées pour les résorber, les inégalités salariales restent très importantes, avec un écart moyen de rémunérations entre hommes et femmes supérieur à 20 %. J'approuve donc pleinement les mesures annoncées par le ministre aux fins de parvenir à une égalité effective, en particulier l'annonce de la présentation, l'année prochaine, d'un nouveau projet de loi tendant à instituer, dès 2010, des sanctions financières applicables aux entreprises qui ne se conformeraient pas à l'obligation de négocier prévue par la loi du 23 mars 2006 sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. En effet, nous l'avons déjà évoqué, si l'incitation ne suffit pas, il faut bien en venir à la sanction ! D'ailleurs, les pénalités financières paraissent plus appropriées que les sanctions pénales, j'ai maintes fois exprimé mon sentiment à ce sujet.
Je me félicite également de ce que la nécessité d'améliorer l'orientation ait été reconnue comme une question d'importance majeure par l'ensemble des participants à cette conférence sociale pour lutter contre la ségrégation professionnelle des femmes, qui sont aujourd'hui cantonnées dans un nombre très limité de filières. Cela permettrait de réduire ainsi les facteurs structurels d'inégalité professionnelle et aussi, ne l'oublions pas, de participer à la baisse du chômage.
À cet égard, je tiens à rappeler que la délégation aux droits des femmes du Sénat, après avoir mené de nombreux travaux et sondages sur les inégalités salariales au cours des dernières années, a choisi, dès le début de la présente session, de retenir comme thème d'étude « l'orientation et l'insertion professionnelles », afin de rechercher un rééquilibrage entre femmes et hommes dans tous les métiers. Si l'on compte de nombreuses femmes magistrates ou médecins, il est peu de femmes ingénieurs. Je n'insiste pas sur ces éléments, nous les connaissons tous. La délégation a engagé un nouveau cycle d'auditions sur ce thème. Nous pourrons ainsi, madame la secrétaire d'État, travailler en symbiose avec le Gouvernement sur ce sujet, ce dont je me réjouis.
En ce qui concerne l'action « Égalité en droit et en dignité », les crédits qui lui sont affectés permettront notamment de contribuer au financement des centres d'information sur les droits des femmes et des familles, ainsi qu'à celui de la Fédération nationale solidarité femmes, qui est très active et est chargée de gérer le numéro d'appel national « Violences conjugales info 3919 » destiné aux femmes victimes de violences conjugales.
Pour avoir participé dernièrement à la Journée internationale pour l'élimination des violences à l'égard des femmes, je peux témoigner que cette antenne doit faire face à un nombre grandissant d'appels. Il faudra donc très vite, madame la secrétaire d'État, envisager la régionalisation, pour obtenir une réactivité maximale. Pour cela, des crédits seront nécessaires, nous aurons l'occasion d'en reparler.
Les crédits de cette action serviront également à financer d'autres associations offrant différents lieux d'accueil, d'écoute et d'orientation aux femmes victimes de telles violences.
Ces crédits sont donc indispensables pour assurer la mise en oeuvre du plan de lutte contre les violences faites aux femmes que vous venez de présenter, madame la secrétaire d'État, dans la continuité du plan précédemment mis en place par Mmes Nicole Ameline et Catherine Vautrin, pour permettre aux associations de poursuivre les actions engagées sur le terrain.
À l'occasion d'un récent déplacement à la Réunion, à l'invitation de ma collègue Anne-Marie Payet, j'ai pu apprécier concrètement l'intérêt de certaines expérimentations menées par le réseau associatif, très dense sur ce territoire, pour améliorer la lutte contre les violences à l'égard des femmes.
J'évoquerai par exemple l'hébergement d'urgence des femmes victimes de violences dans des familles d'accueil qui ont peu de ressources et ont reçu une formation spécifique pour accueillir ces femmes en très grande difficulté. Je pense encore à la mise en place de groupes de parole à l'intention des hommes violents, afin que ceux-ci analysent, en présence de leurs familles et même de leurs enfants, leur comportement et les raisons qui les ont conduits à être violents afin de lutter contre la récidive. Par cet acte courageux, avec l'aide de psychologues et de personnels paramédicaux, ils se mettent en situation de ne plus jamais reproduire le même schéma.
Si j'insiste sur ce sujet, c'est parce que je tiens à vous faire part de ma surprise et de mes interrogations devant les amendements présentés respectivement, au nom de la commission des finances et de la commission des affaires sociales, par mes collègues MM. Auguste Cazalet et Paul Blanc, qui tendent à amputer les modestes crédits - 1 million d'euros - destinés à financer la création de quatre-vingt-cinq places en centres d'hébergement d'urgence, notamment à l'intention de femmes victimes de violences.
Il va de soi que je ne peux qu'être favorable à la création de nouvelles places en centres d'hébergement d'urgence. Pour autant, faut-il réduire les crédits destinés à d'autres actions de lutte contre les violences à l'égard des femmes ? Je le reconnais, le choix est difficile.
Ces crédits n'ont pas été entièrement consommés les années précédentes, en raison de l'application de mesures de « gel », et cette année, pour la première fois, ils ne bénéficient d'aucune augmentation dans le projet de loi de finances.
Au demeurant, les crédits de l'État en faveur des droits des femmes ne se limitent pas aux crédits du seul programme consacré à l'égalité entre les hommes et les femmes. Récapitulé au sein d'un « jaune budgétaire », malheureusement encore lacunaire, l'effort financier de l'État pour la promotion de l'égalité entre les femmes et les hommes bénéficie des concours d'une dizaine de ministères et s'élève à un montant total évalué à 75, 64 millions d'euros pour 2008.
En conclusion, je soulignerai que, au-delà d'une approche strictement budgétaire, l'efficacité de l'action publique en faveur des droits des femmes est aussi affaire de volonté politique, tout le monde le sait. Cela passe par un meilleur suivi des dépenses et des actions engagées, nous en sommes tous convaincus.
Par son rôle de veille sur l'ensemble des sujets intéressant les droits des femmes, la délégation que j'ai l'honneur de présider contribue à ce suivi. Je me félicite à cet égard, madame la secrétaire d'État, de l'étroite coopération que nous avons engagée depuis que vous avez pris en charge ces dossiers au sein du Gouvernement, comme l'ont fait d'ailleurs avec beaucoup de pugnacité vos prédécesseurs auxquels je rends hommage.