Intervention de Gérard Larcher

Réunion du 13 janvier 2015 à 16h20
Hommage aux victimes des attentats

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher, président :

Mesdames, messieurs les ministres et secrétaires d’État, mes chers collègues, « je préfère mourir debout que vivre à genoux ». Tels étaient les propos de Charb, au mois de septembre 2012.

Ils sont morts debout : Cabu, Wolinski, Tignous, Honoré, Bernard Maris et leurs camarades, Elsa Cayat, Michel Renaud, Mustapha Ourad, Frédéric Boisseau. Eux qui n’avaient que leur crayon, leur carton, leurs convictions, leur vie, ils ont été frappés par les balles du fanatisme, qui croit que l’on peut aussi tuer les idées, la liberté.

Oui, liberté, celle de penser, celle de s’exprimer, celle de dessiner, y compris quand cela nous dérange…

Clarissa Jean-Philippe, policière municipale, Franck Brinsolaro, Ahmed Merabet, policiers, sont morts dans l’exercice de leurs fonctions. Ils sont morts pour l’État de droit, pour l’ordre républicain, victimes de leur devoir.

Yohan, Yohav, Philippe, François-Michel, leurs vies innocentes se sont arrêtées par la haine nourrie dans l’ignorance de l’autre, à la veille de la journée consacrée par eux à la prière.

L’antisémitisme, celui de la porte de Vincennes, après celui de Créteil, de Bruxelles, de Toulouse, c’est l’antithèse du visage de la France.

Notre pays s’est rassemblé. Je voudrais saluer l’action du Président de la République, du Gouvernement, la vôtre, monsieur le ministre de l’intérieur, saluer l’esprit de responsabilité des mouvements politiques, de la majorité comme de l’opposition.

La République vient de se dresser dans cette épreuve, elle a cheminé dans un long cortège de dignité, de refus et de silence.

Oui, liberté, « J’écris ton nom ! […]

Et par le pouvoir d’un mot, je recommence ma vie ».

Oui, vivre ensemble, c’est tellement plus fort que nos différences !

Oui, « fraternité » n’est pas qu’un mot du triptyque républicain.

Samedi, dimanche, ils étaient des milliers, ils étaient des millions, partout, à Paris, dans chacune de nos villes et chacun de nos bourgs, pour crier que la France qui est la nôtre, c’est celle de la fraternité, celle qui jamais ne se laissera aller aux complaisances de la haine, du rejet, du fanatisme.

Mais cette levée en masse, cette levée de citoyens nous oblige ! Ces drames nous obligent à l’unité ; ils nous obligent au courage ; ils nous obligent à l’action.

Nos mains, nos esprits ne peuvent trembler. Il nous faut lucidement faire notre devoir d’exigence absolue.

Il nous faut analyser en profondeur comment, dans le pays des Lumières, peut se construire une telle expression de la barbarie et du crime.

Il nous faut traiter plusieurs questions concrètes, car ce sont celles auxquelles nos concitoyens attendent des réponses : la question de l’organisation du renseignement, la question du prosélytisme dans nos prisons, la question des réseaux sociaux utilisés pour véhiculer des messages de haine que l’on continue à voir bourgeonner tels des bubons, la question de l’éducation, qu’elle soit à la citoyenneté ou à la connaissance de l’autre, au travers de ses origines, de sa religion.

Ces questions-là, et d’autres encore, nous avons le devoir de les entendre et d’y répondre.

Mes chers collègues, la compassion, la tristesse vont nous étreindre encore : ce matin, elles ont été exprimées à la préfecture de police et à Jérusalem, dans quelques jours, elles le seront aux Invalides.

Mais pour que la paix soit mieux qu’une incantation répétée avec ferveur, il nous faut agir. Agir en nous écoutant les uns les autres, agir aussi dans l’exigence et sans faiblesse. C’est notre devoir de parlementaire ; et le Sénat fera son devoir ! J’y veillerai, et je prendrai les initiatives qui m’incombent.

Je vous propose maintenant de nous lever, d’observer un moment de silence et de le conclure par cet hymne qui nous a rassemblés si nombreux ces jours derniers et qui est toujours le ciment de la République.

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