Intervention de Bruno Retailleau

Réunion du 13 janvier 2015 à 16h20
Débat sur les attaques terroristes dont la france a été victime

Photo de Bruno RetailleauBruno Retailleau, président du groupe Union pour un mouvement populaire :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les ministres et secrétaires d’État, mes chers collègues, depuis dimanche dernier, plus que jamais, nous sommes fiers d’être Français. Nous en sommes fiers, car la République française s’est révélée plus forte que le terrorisme. Nous en sommes fiers, car la nation française n’est jamais aussi belle et aussi grande que lorsque les Français sont réunis.

Dimanche dernier, les Français sont redevenus un peuple, un grand peuple, à la face du monde, uni dans cette émotion nationale, uni dans l’hommage à ses morts : ceux de Charlie Hebdo, ceux qui ont été pris en otage parce qu’ils étaient juifs, les policiers. Cette mobilisation nationale, qui a rassemblé tant de Français, de toutes origines, de toutes conditions, ressemble tant à la France !

Dimanche dernier, nous avons tous marché contre le terrorisme, mais nous avons aussi marché pour la France, pour cette grande passion française qu’est la liberté.

Cette liberté, les Français la revendiquent pour eux-mêmes. La liberté d’expression est d’abord et avant tout l’affirmation d’un droit fondamental : la liberté de conscience, la liberté de croire ou de ne pas croire.

Cette liberté, les Français la revendiquent aussi pour le monde. Comme l’indiquait le général de Gaulle, « il y a un pacte vingt fois séculaire entre la grandeur de la France et la liberté du monde. » C’est au nom de ce pacte que la France est aujourd’hui attaquée, que notre pays est aujourd’hui en guerre. Il faut le dire car « mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde », comme l’écrivait si bien Camus. Après cette tragédie, les représentants de la nation que nous sommes n’ont pas le droit d’ajouter au malheur de la France.

Bien sûr, cette guerre n’est pas une guerre conventionnelle, une guerre entre les nations. C’est une guerre radicalement nouvelle. Notre ennemi se moque des frontières ; il frappe en Orient, en Occident, au cœur même de Paris.

Ce n’est pas non plus une guerre de religion, car la barbarie n’a pas de religion ! Jamais ceux qui professent la haine de l’autre ne pourront parler au nom d’une espérance.

Mais c’est bien d’une guerre qu’il s’agit, d’une guerre nouvelle, qui prospère eu égard à une situation inédite, à l’échelle nationale et internationale.

Nationale d’abord, car notre société est aujourd'hui aux prises avec de nouvelles formes de radicalité. J’en veux pour preuve cette jeunesse déboussolée, fanatisée, hypnotisée et fascinée, de façon morbide, par l’absolue radicalité du mal, cette jeunesse qui a grandi chez nous, sur le sol français, et qui part faire le djihad !

Internationale ensuite, car toutes les grandes puissances peinent aujourd'hui à combattre le terrorisme islamiste, lequel a changé de nature en se glissant dans les habits de la mondialisation. Il est déterritorialisé, mais il cherche en même temps à s’enraciner. Il est diffus et à la fois connecté. C’est un terrorisme qui a également changé de mode d’expression, puisqu’il ne se contente plus de livrer une guerre militaire ; il mène aussi une guerre de l’information au travers de la révolution numérique.

Nous devons donc nous donner les moyens non seulement juridiques, budgétaires, mais également politiques de conduire et de gagner cette guerre.

Tout d’abord, monsieur le ministre, nous devons nous doter de moyens juridiques en adaptant tout notre arsenal juridique à l’évolution de la menace. C’est la raison pour laquelle la commission d’enquête sénatoriale sur l’organisation et les moyens de la lutte contre les réseaux djihadistes en France et en Europe doit être renforcée, qu’il s’agisse de son périmètre ou de ses missions, afin d’apporter des réponses concrètes aux interrogations de millions de Français. Comment ces attentats ont-ils été possibles ? Quelles mesures efficaces devons-nous prendre pour que cela ne se reproduise plus ?

Tous nos moyens doivent être réévalués par rapport à cette menace, qui pourrait encore frapper. Sur toutes ces questions, je souhaite que le Sénat, bien au-delà des clivages traditionnels, fasse des propositions au Gouvernement, car les Français exigent la vérité. Ils veulent de la fermeté et ils demandent à être protégés. Ils en ont le droit et nous en avons le devoir. Voilà pourquoi, par-delà les moyens juridiques et budgétaires, nous avons également besoin de moyens politiques !

Après cette tragédie, il n’y a plus de place pour l’angélisme. La mobilisation nationale ne doit pas occulter ce qui s’est passé ces derniers jours dans des écoles et sur internet. Je veux parler du refus de participer à la minute de silence à la mémoire des victimes et de toutes les réactions qui ont fait écho à d’autres refus, communautaires, identitaires, dans l’espace public, au mépris de toutes nos valeurs de liberté et, bien sûr, de laïcité.

Non, mes chers collègues, la France ne sera jamais un archipel de tribus, de communautarismes. La France n’est pas non plus une juxtaposition d’individus. Il nous faut redonner le goût de la France à tous ces jeunes Français. Cependant, nous devons regarder les choses en face, car si nous baissons les yeux devant le communautarisme, nous baisserons aussi les bras devant l’islamisme. Or nous n’en avons pas le droit, car il s’agit de la France. Dans ce combat pour la liberté, notre pays doit rester ce « soldat de l’idéal » évoqué par Georges Clemenceau à la tribune de l’Assemblée nationale le 11 novembre 1918. C’est parce que nous sommes ce soldat que nous devons mener cette guerre et la gagner, pour la République, pour la sécurité des Français et pour la liberté des hommes. Vive la République et vive la France ! §

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