Nous pouvons donc considérer aujourd’hui que nous avons atteint un premier objectif : Bagdad a été sécurisée, Daech aurait perdu près de deux mille combattants depuis l’été, 1 300 cibles ont été détruites, dont les raffineries et une partie des infrastructures militaires... La première phase de l’opération Chammal peut être considérée comme réussie.
La question de l’engagement au sol, à ce stade du débat, est régulièrement posée, mais il nous semble que ce rôle ne nous incombe pas en Irak, compte tenu de l’ensemble des précédents malheureux. Il est important que les peuples que nous soutenons produisent l’effort nécessaire pour susciter un sursaut militaire et un processus politique permettant de consolider les États. Tel est le sens de nos actions en matière de formation, d’équipement et de financement, en Jordanie, au Liban et dans certains pays d’Afrique. Si nous nous concentrons sur la reconstruction de l’armée malienne et sur la consolidation des armées des pays partenaires, les Américains, quant à eux, gardent leur leadership, en quelque sorte, sur la remontée en puissance de l’armée irakienne.
Envisageons à présent l’issue de cet effort. D’emblée, je crois ici nécessaire d’affirmer qu’il est important de ne pas se fixer de calendrier. Personne n’imaginait que cette guerre serait gagnée en quatre mois, pour deux raisons qui tiennent à la nature et à l’échelle de l’espace-temps.
D’une part, fixer un délai à nos actions permettrait à notre adversaire d’adapter sa stratégie. Ce serait un contresens, car ce combat relève évidemment du temps long. Il faut au contraire bien affirmer qu’il s’agit d’une priorité stratégique de notre propre agenda.
D’autre part, l’échelle de ces opérations est inédite, car il s’agit d’une lutte globale sur plusieurs points du globe : hier en Afghanistan, aujourd’hui au Mali, au Yémen, en Somalie ou en Irak et, qui sait, demain, en Libye ou face à Boko Haram, dont l’actualité rappelle, hélas, l’horreur des exactions.
Il faut continuer à travailler à l’adaptation de nos forces armées à ce type de guerre où elles doivent pratiquer un nomadisme stratégique. De ce point de vue, le Livre blanc de 2008 et celui de 2013 avaient bien anticipé ces menaces et les efforts aujourd’hui engagés en matière d’équipement et de modernisation vont dans le bon sens, même si j’admets volontiers qu’ils sont difficiles à concilier avec la diminution des effectifs en cours.
Issus d’une idéologie totalisante, déshumanisante et régressive, Daech et ses émules prospèrent au Moyen-Orient sur les frustrations engendrées par le Réveil arabe. La non-prise en compte du pluralisme multiséculaire de ces pays en est une preuve supplémentaire. Seules des solutions politiques répondront à ces questions. La France doit donc continuer à plaider en faveur d’une action concertée des pays du Moyen-Orient au sein de la coalition internationale : cela constituerait une avancée majeure.
Les chefs d’État qui étaient présents à Paris lors du rassemblement de dimanche dernier ont pu prendre la mesure de la menace terroriste, ce qui devrait inciter encore plus de nations à s’engager dans cette guerre contre le terrorisme, en particulier en Europe.
Pays des droits de l’homme, la France, désignée par ces organisations comme l’une de leurs cibles privilégiées, doit livrer ce combat pour préserver ses libertés – les libertés ! –, son pluralisme et son universalisme, cette façon si singulière de voir le monde et que le monde libre apprécie et salue. Les attentats perpétrés sur notre sol ces derniers jours, les atrocités commises par Daech renforcent notre détermination à poursuivre le combat que nous menons aujourd’hui en Irak.