Une chose est de soutenir les politiques de coopération interinstitutionnelle et la mutualisation des moyens, une autre est de confier à un échelon territorial la compétence essentielle en la matière.
Christian Favier vient de le dire, avec cet article 3 bis, qui résulte d’un amendement déposé par les deux corapporteurs du projet de loi, nous nous posons la question suivante : quelle plus-value pourrions-nous dégager d’une forme de régionalisation de l’action publique en matière d’emploi ? Nous nous interrogeons d’autant plus que l’efficacité effective de la régionalisation de la formation et de l’apprentissage semble connaître quelques limites.
L’article 3 bis tend à donner aux élus régionaux une compétence nouvelle en matière de suivi de l’activité des acteurs du service public de l’emploi, un service public qui a été, d’abord et avant tout, victime de l’unification entre l’Agence nationale pour l’emploi et les ASSEDIC. Ce mariage entre une agence publique sous contrôle du ministère du travail et une structure paritaire composée des partenaires sociaux a fait la démonstration de la perte d’efficacité.
Au demeurant, le rôle central, jadis dévolu à l’ANPE, en matière de conseil et de placement des personnes privées d’emploi s’est trouvé peu à peu mis en question par l’intervention de cabinets de recrutement plus ou moins efficaces, tandis que la croissance continue du nombre des personnes privées d’emploi, la diversité de leurs situations et de leurs attentes, étaient autant de facteurs rendant toujours plus complexe l’intervention de Pôle Emploi.
Nous sommes convaincus que ce n’est pas par la régionalisation de l’action de Pôle Emploi et de ce qu’il reste de l’Association nationale pour la formation professionnelle des adultes, l’AFPA, d’ores et déjà quasi démantelée par la décentralisation Raffarin, que nous ferons « mieux » en la matière. Avant de confier la formation et l’emploi aux régions, sans doute conviendrait-il plutôt, dans un premier temps, de faire le bilan de ce qui a déjà été engagé.
Soyons clairs : pour les personnes privées d’emploi, le fait que le même guichet serve à s’inscrire au chômage et à former un dossier d’allocation ne change pas grand-chose sur le fond.
Une statistique récente nous indiquait le mois dernier que 85 % des contrats de travail passés en France concernaient des embauches à durée déterminée d’une amplitude médiane de dix jours. De fait, le service public de l’emploi tel que nous le connaissons aujourd’hui fonctionne comme une sorte de super agence de travail intérimaire ne proposant que des contrats courts.
Est-ce apporter un « plus » aux compétences et aux fonctions des élus régionaux que de transformer ceux-ci en gestionnaires de cette précarité du travail ? Nous ne le pensons pas. C’est donc au bénéfice de ces observations que nous vous invitons, mes chers collègues, à adopter cet amendement de suppression de l’article 3 bis.