Intervention de Philippe Kaltenbach

Réunion du 3 février 2015 à 14h30
Représentation équilibrée des territoires — Adoption d'une proposition de loi constitutionnelle dans le texte de la commission

Photo de Philippe KaltenbachPhilippe Kaltenbach :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous sommes réunis aujourd’hui pour examiner une proposition de loi constitutionnelle présentée par M. le président du Sénat et par M. le président de la commission des lois. Celle-ci vise à « assurer la représentation équilibrée des territoires » de la République.

Vaste et ambitieux programme !

D’abord, pourquoi une telle proposition ? Comme l’a très clairement dit M. Philippe Bas, il s’agit pour les auteurs de contrer la jurisprudence du Conseil constitutionnel.

En effet, dans sa décision de 1985 relative à la Nouvelle-Calédonie – et en aucun cas à un scrutin national –, le Conseil constitutionnel a affirmé la règle selon laquelle une élection doit être organisée « sur des bases essentiellement démographiques ». Il avait toutefois apporté des précisions : il ne résultait pas de cette règle l’obligation de recourir à un scrutin proportionnel non plus que l’interdiction de prendre en compte des impératifs d’intérêt général pour y déroger, ces derniers ne devant toutefois intervenir que dans une mesure limitée.

Cette limite, a statué le Conseil, c’est le fameux « tunnel » des 20 % : le nombre d’habitants représenté par un élu local ne peut donc en principe s’écarter de plus de 20 %, en plus ou en moins, du nombre moyen d’habitants représenté par chaque élu au sein de l’assemblée territoriale concernée.

Cette règle a encore été récemment rappelée par le Conseil constitutionnel à propos des accords locaux dans nos intercommunalités. En effet, saisi le 11 avril 2014 d’une question prioritaire de constitutionnalité, il a été amené à se prononcer sur l’article du code général des collectivités territoriales qui prévoit les modalités de répartition des sièges au sein des communautés de communes et des communautés d’agglomération.

Dans sa décision, le Conseil a estimé qui n’était pas suffisant qu’il soit simplement « tenu compte » de la population et il a rappelé que le critère démographique devait demeurer à la base du calcul de répartition. Il a alors censuré l’alinéa de l’article du code général des collectivités locales permettant l’accord local.

En réponse à cette censure, nos éminents collègues Alain Richard et Jean-Pierre Sueur ont immédiatement déposé une proposition de loi que nous serons amenés à examiner en seconde lecture dans deux jours. Cette proposition de loi, selon ses auteurs, « prévoit tout ce qu’il est possible de prévoir, eu égard à la jurisprudence du Conseil constitutionnel ».

Force est donc de constater, mes chers collègues, que nous devons nous inscrire dans un cadre contraint, fixé et maintenu par le Conseil constitutionnel. C’est précisément ce cadre contraint que la présente proposition de loi constitutionnelle entend assouplir.

Nous avons plusieurs fois relevé sur toutes les travées de cet hémicycle les difficultés qui découlent de ce tunnel des 20 %. Ce fut le cas lorsque nous nous sommes penchés sur le découpage des nouveaux cantons. Le groupe socialiste avait d’ailleurs formulé des propositions pour que le tunnel soit élargi à plus ou moins 30 %.

Ce fut encore le cas récemment, lors de l’examen du projet de loi relatif à la délimitation des régions, dans le but d’assurer un nombre suffisant de conseillers régionaux aux départements à la population numériquement modeste.

En chacune de ces occasions, c’est vrai, nous avons été contraints par la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Pour autant, des solutions ont toujours été trouvées, et il convient les citer.

Dans le cadre du redécoupage des cantons, des dérogations sont prévues pour certains territoires de nature insulaire, pour les zones de montagne et pour les départements à la population réduite. Un nombre minimal de conseillers régionaux a été fixé à deux pour les départements de moins de 100 000 habitants – seule la Lozère est concernée – et à quatre pour les départements de plus de 100 000 habitants.

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