Je vous remercie pour votre accueil.
Contrairement au premier rapport sur le même sujet, ce document résulte de la rédaction de la Direction générale de la mondialisation du ministère des affaires étrangères (DGM). L'Institut français a pu faire valoir ses avis qui ont été pour tout ou partie pris en compte dans la version qui vous a été remise. Cela ne retranche rien à l'appréciation portée par le Département sur la concertation entre le Département et l'Institut français qui est d'une manière générale très bonne.
Quelles sont les bases de ce rapport ?
Ce rapport se fonde sur les réponses des postes en expérimentation à un questionnaire, élaboré sans validation de l'Institut français, qui n'avait pas de vocation explicite d'évaluation de l'expérimentation.
Il est bon de rappeler que l'expérimentation du rattachement du réseau culturel français à l'étranger à l'Institut français de Paris demeure un processus à distinguer de la fusion des services de coopération et d'action culturelle avec les établissements culturels à autonomie financière. Or, nombre d'appréciations portent sur ce sujet.
En effet, depuis 2009, le ministère des Affaires étrangères s'est engagé dans une vaste réforme du réseau des établissements culturels français à l'étranger. L'un des axes forts de cette réforme consiste en la fusion de ces établissements disposant de l'autonomie financière (EAF) avec les services de coopération et d'action culturelle (SCAC). Cette fusion a abouti à la création des Instituts français, établissements à autonomie financière, dirigé par le Conseiller de coopération.
Le ressenti des postes, sur lequel se fonde ce rapport, témoigne d'une confusion entre la fusion des SCAC et des EAF, et l'expérimentation. Il en ressort que ce rapport devient en filigrane une étude comparative entre les EAF et les bureaux locaux de l'Instituts français, et porte peu sur les avancées, les difficultés et les résultats concrets de l'expérimentation.
Avant d'entrer dans les détails du contenu de ce rapport, je tiens à préciser que l'Institut français dans la conduite du processus d'expérimentation s'est voulu rigoureux et vertueux, au risque que l'exercice soit mal vécu par les postes concernés habitués à des règles différentes de gestion.
En moins de deux ans, il a été capable d'apporter une réponse à des questions portant sur des aspects aussi fondamentaux et complexes que le statut de nos Instituts à l'étranger, leur pilotage stratégique auquel sont associés les ambassadeurs, des modalités de gestion adaptées aux besoins, les levée de fonds, la professionnalisation du réseau.
Certains de ces aspects ont été occultés ou leur interprétation prête à discussion.
S'agissant du statut des établissements à autonomie financière (EAF) : il faudrait rappeler qu'il est « anti-lolfique » et qu'il ne devrait pas perdurer. Une modification de ce statut doit être envisagée et les conséquences étudiées.
Le pilotage strict et précis de l'exécution budgétaire ainsi que les procédures mises en place pour assurer ce suivi tout en conservant une souplesse de gestion au directeur ne sont pas valorisés : mes collaborateurs pourront vous apporter toutes les précisions techniques sur tous ces aspects.
Concernant la conservation du lien organique avec l'ambassade pour bénéficier des avantages fiscaux, ce point était déjà identifié bien avant l'expérimentation, et il convient de rappeler que les autorités locales de nombreux pays déploient des efforts de plus en plus pressants pour contester ces bénéfices. Une réflexion sur ce sujet est urgente.
La gestion des bourses dont le montant est de plus de 3 millions d'euros pour les douze postes en expérimentation a été clarifiée. Dans le cadre de l'expérimentation, l'utilisation des coûts réels de ces bourses a permis d'avoir une connaissance précise sur les sommes engagées par pays et sur la nature des bourses. Il faut rappeler que le Département en est toujours à des taux paramétriques parfois bien éloignés des coûts réels.
La capacité de verser des subventions est reconnue comme une avancée, ces subventions permettent aux bureaux locaux de disposer de tous les processus financiers pour mettre en oeuvre leur politique. La plus grande partie de ces subventions est versée directement par les directeurs (jusqu'à 23 000€).
Le coût de l'expérimentation pour l'Institut français de Paris n'est pas nul, contrairement à ce que dit ce rapport. Il convient à ce titre de rappeler que l'organigramme de l'Institut comprend un pôle de l'expérimentation avec 2 ETP, qu'au niveau de l'agence comptable et du service administratif et financier des agents sont également en charge du suivi de l'expérimentation, sans compter le temps passé par le secrétaire général.
S'agissant des levées de fonds, il est juste d'indiquer qu'en un an, l'expérimentation n'a pas démontré la capacité des bureaux locaux à déplafonner leur capacité à lever des fonds. Il paraît en effet difficile pour les anciens EAF de changer de modes opératoires en si peu de temps. D'autre part l'Institut français de Paris avait en matière de mécénat ses propres objectifs, et le responsable de ce secteur ne pouvait appuyer les postes dans leurs demandes. Enfin les fonds européens, importante source potentielle de financement, sont régis par des modes opératoires complexes, nécessitant des formations et un accompagnement des équipes sur place. Il était difficile en un an de mettre en place de tel dispositif.
Je trouve pour ma part la tonalité de ce rapport trop négative par rapport à notre vécu de cette expérimentation. Trop peu d'aspects positifs ou de progrès sont mis en valeur ou portés au crédit de l'expérimentation. Il serait aussi souhaitable de rappeler les règles posées à l`exercice et leur inévitable conséquence : réversibilité, gestion neutre des bureaux locaux. Si ceux-ci ont pu être traités quasiment à l'identique des autres postes, c'est pourtant grâce à la vigilance de l'Institut qui y a veillé.
Là aussi, je souhaite souligner que l'investissement des équipes de l'Institut dans l'accompagnement de proximité a été intense. Dans cette phase de construction, le mode opératoire a été très participatif (en direct, au téléphone, boîte de dialogue) et efficace puisque le budget, ses rectifications et les comptes financiers ont été approuvés après les Conseils d'Administration sans observation.
La rigueur comptable et les contraintes de bonne gestion engendrées par le statut d'EPIC permettent un pilotage plus fin des postes et les avantages à en tirer dans l'optimisation des moyens consacrés au réseau dans son ensemble n'ont pas été évalués.
De plus, il convient de mentionner les programmes régionaux, exemples de la mutualisation des moyens, mis en oeuvre par les bureaux locaux de l'Institut français du Chili ou de Serbie. La régionalisation, processus impossible avec le statut d'EAF, est à mettre à l'actif de l'expérimentation.
Des difficultés structurelles liées au rattachement - et que l'Institut français ne conteste pas - sont pointées alors qu'elles étaient identifiées dès le départ et qu'elles ne résultent pas de la mise en oeuvre de l'expérimentation, comme la non coïncidence des périmètres de compétences par exemple.
Par rapport à nos partenaires, dans le cadre de l'expérimentation, le mode de gestion et l'organisation du réseau culturel extérieur public français est désormais comparable à celui du Goethe institut ou du British Council avec un positionnement des intervenants clairs : un ministère des Affaires étrangères qui assure une tutelle stratégique, un Institut français à Paris qui assure une fonction d'opérateur « pilote » et le Réseau.
Un « retour en arrière » serait mal perçu par ces partenaires européens et serait à l'origine d'une profonde confusion.
Enfin, le Département chiffre le surcoût du rattachement du réseau à l'EPIC, essentiellement lié aux charges sociales, alors que l'expérimentation n'a pas porté sur la gestion des ressources humaines en 2012. Aucune étude prospective sur la gestion de ces ressources humaines n'a été réalisée. Pourtant, un tel rattachement permettrait une révision de la cartographie des emplois fondée sur une diminution du nombre d'expatriés et l'apparition d'un nouveau statut d'agent comparable à celui des agents résidents existant déjà dans d'autres opérateurs de l'État comme l'Agence pour l'enseignement du français à l'étranger (AEFE).
Surtout, une véritable politique de formation des agents de recrutement local pourrait être assurée par l'Institut français dont chacun reconnaît les compétences en la matière. Un véritable pilotage de la professionnalisation du réseau pourrait alors voir le jour et être mis en oeuvre.
Au final, il ressort de ce rapport que l'exercice de l'expérimentation tel qu'il a été mené ne contient pas d'enseignements déterminants permettant de mesurer objectivement les avantages et les inconvénients du rattachement et que la somme des sujets à traiter, concernant la bonne gestion du réseau public, dépasse la seule question du rattachement comptable des postes. La décision à prendre cet automne devra donc reposer sur une approche plus large et globale de la question au regard de l'objectif ultime de cette réforme: rendre le réseau culturel extérieur plus efficace et performant.