Monsieur le Président, mes chers collègues, on constate que la pratique actuelle du recyclage des navires suscite de nombreuses difficultés. En effet, 80 % d'entre eux sont aujourd'hui démantelés au Bangladesh, au Pakistan et en Inde, dans des conditions peu respectueuses de la santé des travailleurs et de la protection de l'environnement. Or, ce sont de 200 à 600 navires de plus de 2 000 tonnes qui sont démantelés chaque année dans le monde. Le contexte actuel, marqué par le vieillissement de la flotte mondiale et la sortie de flotte des pétroliers à simple coque, réclame que ce problème soit rapidement résolu. C'est le but de la présente convention, adoptée à Hong-Kong le 15 mai 2009 dans le cadre de l'Organisation maritime internationale (OMI). Ce texte, destiné à assurer un recyclage sûr et écologiquement rationnel des navires, aborde l'ensemble du processus d'évolution des navires, de leur construction à leur démantèlement. Son application permettra d'améliorer la sécurité des travailleurs impliqués dans ce processus, la protection de l'environnement et la sécurité de la navigation. Ce texte s'applique aux navires de commerce, et impose notamment aux armateurs de fournir aux chantiers de démantèlement une liste des matériaux dangereux contenus dans les navires avant destruction.
Les principales substances toxiques sont l'amiante, les PCB et les résidus d'hydrocarbures.
L'OMI est une agence spécialisée de l'ONU créée en 1959. Son siège est à Londres. Elle compte 170 Etats membres et 3 membres associés : Hong-Kong, entré en 1967, Macao, en 1990, et les îles Féroé en 2002. Ces territoires appartiennent pour les deux premiers à la Chine et pour le troisième au Danemark.
Aucun de ces Etats, membres ou associés, n'a à ce jour ratifié le présent texte. C'est dire les réticences politiques et économiques que suscite cette nécessaire réglementation d'une activité abandonnée jusqu'ici à des pays pauvres, peu soucieux de la santé des travailleurs et du respect de leur environnement.
La France est donc la première à s'engager dans la voie de la ratification : ce texte a déjà été adopté par l'Assemblée nationale et devrait bientôt l'être, si vous y consentez, par le Sénat. Il ne règle certes pas tous les problèmes, notamment la pratique de l'échouage « sauvage » des navires sur les plages, couramment observée dans les trois pays déjà cités. Cependant, la signature du texte s'est accompagnée de l'adoption de plusieurs résolutions, dont l'une invitait les Etats membres de l'OMI à appliquer à titre volontaire les normes techniques relatives aux navires et à leur démantèlement.
On constate, depuis l'adoption de la convention, que les principaux Etats recycleurs comme l'Inde, le Bangladesh, le Pakistan, la Chine et la Turquie, se sont rapprochés de l'OMI pour organiser, dans un premier temps, des ateliers régionaux d'information. La Chine dispose de plusieurs installations conformes à la Convention. En mai 2012, elle a organisé un séminaire, auquel ont participé la Commission Européenne et des Etats membres de l'Union européenne, dont la France, qui a permis de présenter l'évolution de la réglementation chinoise en matière de démantèlement des navires, et de présenter des chantiers « pilotes ».
En mai 2010, l'administration maritime thaïlandaise et le secrétariat de l'Organisation maritime internationale ont organisé un atelier régional sur l'application des normes techniques de la présente convention. Il réunissait des associations de recyclage des navires des cinq États déjà cités qui recyclent la quasi-totalité de la flotte mondiale, et les principales associations nationales d'armateurs. Des experts des organismes des Nations unies, d'organisations inter-gouvernementales et non gouvernementales y ont également participé. Cette réunion n'a cependant pas débouché sur un accord, entre les industriels des principaux Etats recycleurs, obligeant les navires à disposer à bord de l'inventaire des matières potentiellement dangereuses prévu par la convention.
En juillet 2010, une réunion s'est tenue à Izmir, en Turquie, sur le thème du transfert des technologies et des connaissances dans le domaine du recyclage des navires. Le gouvernement a présenté l'approche réglementaire turque du recyclage des navires, du point de vue maritime, environnemental, et sous l'angle de la sécurité et de la santé des travailleurs.
Les représentants du gouvernement pakistanais et du secteur du recyclage des navires ont, quant à eux, organisé une session de travail visant à l'élaboration de plans d'action destinés à renforcer le cadre réglementaire et institutionnel au Pakistan.
De leur côté, les armateurs, les sociétés de classification et les industriels du démantèlement préparent l'établissement et l'utilisation des inventaires de matières dangereuses qui accompagneront les navires tout au long de leur cycle de vie. La France possède une expertise reconnue dans la réalisation d'inventaires de matières dangereuses de qualité. L'Allemagne, avec le Germanischer Lloyd, et le Royaume Uni, avec le Lloyd's Register, jouent également un rôle majeur dans ce domaine.
Il faut constater que les capacités de démantèlement européennes sont très faibles.
Plusieurs études ont été menées sur la création de filières de déconstruction de navires en Europe, et ont conclu qu'il est difficile aux industriels européens d'être compétitifs sur le marché des grands navires marchands, objet de la Convention de Hong Kong. Des industriels européens pourraient cependant mener des activités au sein des chantiers de démantèlement situés hors de l'OCDE, notamment en Chine. Les Etats européens conservent un marché de niche pour les navires militaires, les navires abandonnés et saisis, ainsi que les navires de moins de 500 000 tonnes.
Par ailleurs, l'Union européenne finance une coopération technique avec les Etats recycleurs par l'intermédiaire du Programme des Nations unies pour l'environnement. Elle finance également des recherches en partenariat avec ces pays avec les projets DIVEST (Dismanting of vessels with enhanced safety and technology) et SHIPDISMANTLING (démantèlement des navires).
En conclusion, je vous engage donc à adopter ce texte, et à prévoir son examen en séance publique sous forme simplifiée, conformément à la décision prise par la conférence des présidents du 17 octobre dernier.