Intervention de Gérard Larcher

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 13 mai 2014 : 1ère réunion

Photo de Gérard LarcherGérard Larcher :

Monsieur le Président, mes chers collègues, je vais donc commencer la présentation de ce rapport que mes collègues Daniel Reiner et Jacques Gautier ont rédigé à l'issue de leurs travaux, travaux auxquels vous avez bien voulu m'associer. Néanmoins, je voudrais en préambule insister sur le fait que, évidemment, si la programmation militaire était remise en cause, toutes nos conclusions n'auraient plus aucun sens. Une augmentation des effectifs, ce n'est pas rien par les temps qui courent. Surtout qu'elle suppose l'augmentation à proportion des équipements. Ce rapport est le premier travail parlementaire français sur le sujet des forces spéciales et c'est un sujet qui dépasse les clivages partisans. Je tiens également à dire, car nous évoquerons ce sujet, que je ne suis pas favorable à la fusion du Service Action de la DGSE avec les forces spéciales mais qu'en revanche je suis favorable à une meilleure coordination entre les deux voire, une mutualisation des équipements.

Revenons donc au point de départ. Comme vous le savez, le Livre blanc de 2013 a prévu le renforcement des forces spéciales. La loi de programmation militaire 2014-2019 en a donné le détail. Ce plan est en voie de finalisation par l'état-major des armées et sera bientôt soumis au pouvoir exécutif puis rendu public, vraisemblablement au mois de juin. Il porte pour l'essentiel sur une augmentation des effectifs qui devraient passer de 3 000 à 4 000 hommes à la fin de la programmation. D'où le nom de « COS + 1000 » parfois donné à ce plan - le COS étant le commandement des opérations spéciales et désigne par extension l'ensemble des forces spéciales.

Il est prévu également une « doctrine » des forces spéciales, ce qui n'avait jamais été fait depuis la création du COS, en 1992. Il y a bien un « concept » en 2002, mais jamais de doctrine. Nous avons eu le projet de cette doctrine, dans les tous derniers jours de nos investigations.

Du point de vue qui est le nôtre, c'est-à-dire du point de vue du pouvoir législatif qui autorise les crédits et en contrôle l'exécution, trois questions se posent :

Premièrement, pourquoi ce renforcement ? A quoi sert-il ? Vise-t-il à compenser la diminution des forces conventionnelles en créant une « quatrième armée » mieux entrainée, mieux équipée, dont les personnels seraient plus sévèrement sélectionnés, et que l'on pourrait projeter dans des opérations extérieures risquées, laissant à l'armée de terre conventionnelle la défense du territoire ? Doit-on craindre, une « armée à deux vitesses » ?

Deuxièmement, comment ce plan sera-t-il réalisé ? Concerne-t-il uniquement les personnels, ou également les équipements ? Que faut-il en penser ? Quel en sera le coût ? Nous faudra-t-il voter des crédits supplémentaires ? C'est peu probable. Alors où ferons nous les coupes pour financer ce plan ? Un plan de financement est-il du reste prévu ?

Enfin, quelles mesures d'accompagnement sont nécessaires ? Était-il bien nécessaire en particulier d'écrire une doctrine d'emploi, alors que jusqu'à présent la « doctrine est qu'il n'y a pas de doctrine » et que « agir autrement » - devise du COS - ne peut pas et ne doit pas être explicitée.

Faut-il par ailleurs prévoir un nouveau cadre juridique pour les opérations spéciales ? Peut-on optimiser la formation, le recrutement et surtout la valorisation des carrières des hommes et des femmes des forces spéciales ?

Enfin, faut-il mieux insérer le COS dans la communauté du renseignement et peut-on accroître la coopération internationale ?

Pour répondre à ces questions, vous avez souhaité, Monsieur le Président, constituer un groupe de travail. J'ai été impressionné par la manière approfondie de travailler de nos collègues Daniel Reiner et Jacques Gautier. Ils ont pu visiter l'état-major du COS à Villacoublay et celui de la Direction du Renseignement Miliaire à Creil. Ils ont fait également un déplacement sur le camp militaire de Caylus, dans le sud-ouest, afin d'assister à une phase de l'opération Gorgones, qui est le grand entraînement annuel des forces spéciales françaises. Et puis surtout, j'ai eu le plaisir, avec mon collègue Jacques Gautier, de visiter l'état-major de la Task Force SABRE qui intervient au Mali afin de préserver l'équilibre instable qui prévaut, dans l'attente que les accords de Ouagadougou produisent leurs effets. Je dois dire que cette visite a été particulièrement instructive pour moi et que ce n'est qu'à « l'issue », comme disent les militaires, que j'ai compris ce qu'étaient et ce que faisaient les forces spéciales françaises. Et Jacques Gautier et moi-même en avons retiré un sentiment de grande fierté.

Un mot rapidement sur le Mali : je crains que les mêmes causes ne produisent les mêmes effets. Il semble ne pas y avoir du tout de progrès concernant la réconciliation politique entre le nord et le sud. Si les forces tchadiennes et françaises se retirent tout peut redevenir comme avant.

Pour revenir aux forces spéciales quelles sont nos conclusions ? Daniel Reiner va répondre à la question : pourquoi renforcer les forces spéciales ? Jacques Gautier donnera ensuite la réponse à la deuxième question sur le comment : que prévoit le plan de renforcement à l'étude. Est-il suffisant ? Que faut-il en penser ? Enfin, ils se partageront la parole sur la troisième et dernière partie relative aux modalités d'accompagnement et vous en exposeront le détail.

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