Intervention de Jean-Louis Carrère

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 7 février 2013 : 1ère réunion
Audition du général jean-paul paloméros commandant suprême allié chargé de la transformation act à l'otan

Photo de Jean-Louis CarrèreJean-Louis Carrère, président :

Pourriez-vous nous éclairer sur les réflexions menées actuellement au sein de l'OTAN sur l'idée d'une spécialisation des nations et d'un recours accru au financement en commun, sur le modèle de la flotte d'AWACS de l'OTAN ?

Par ailleurs, en tant qu'ancien pilote de chasse et d'ancien chef d'état-major de l'armée de l'air, quelles réflexions vous inspirent les qualités exceptionnelles du Rafale et les difficultés rencontrées en matière d'exportation de cet avion ?

Enfin, face au risque d'une réduction de notre effort de défense, qui serait incompatible avec l'objectif d'un renforcement de notre influence au sein de l'OTAN et d'une relance de l'Europe de la défense, je considère qu'il conviendrait de mieux mettre en avant l'atout que représente notre industrie de défense pour la recherche, en matière de richesse et d'emplois pour notre pays.

Général Jean-Paul Paloméros, commandant suprême allié chargé de la transformation (ACT) à l'OTAN. - L'idée d'une spécialisation ou d'un partage des tâches n'est pas nouvelle. On peut citer notamment l'expérience des pays du Benelux qui ont décidé de se partager certaines tâches. Elle se pose aujourd'hui avec une acuité particulière car, en raison de la réduction sensible des budgets de la défense dans un grand nombre de pays européens, nous arrivons aujourd'hui à un seuil critique en matière de capacités. Or, l'OTAN ne dispose pas en propre de capacités, à l'exception d'une flotte limitée d'AWACS, et elle repose sur les capacités des Nations. Le risque existe donc aujourd'hui que, si la spécialisation ne se réalise pas de manière organisée au sein de l'OTAN, elle se réalise par défaut de manière désorganisée au détriment des capacités de l'Alliance dans son ensemble. Je pense au contraire qu'il faut se montrer ambitieux et faire preuve de plus de réactivité. Je constate d'ailleurs que, de plus en plus, les pays sont amenés à partager certaines capacités, et que la spécialisation, notamment au niveau régional, progresse, par exemple avec les pays nordiques, dont certains ne sont d'ailleurs pas membres de l'OTAN.

La vrai question est donc de savoir jusqu'où les nations veulent aller en matière de partage de capacités, quelles sont celles qu'elles sont disposées à partager et à mutualiser et quelles sont celles, clés, que les pays veulent conserver de manière autonome. Cela n'empêche d'ailleurs pas leur mise en commun, comme l'illustre la réussite du commandement européen du transport aérien, notamment pour l'intervention de la France au Mali. C'est seulement de cette manière que l'on parviendra réellement à préserver nos capacités. Et, les périodes de réflexion telles que le Livre blanc en France ou la revue stratégique au Royaume-Uni et en Allemagne sont particulièrement propices à cette réflexion.

Pour ma part, je considère qu'il est plus facile de commencer par la mise en commun et le partage de capacités dans les domaines du soutien, à l'image du soutien logistique, voire peut-être du renseignement, où il existe de véritables potentialités en matière de standardisation et d'optimisation, plutôt que les capacités liées à l'action de vive force. La flotte d'AWACS de l'OTAN, qui est complémentaire des flottes d'AWACS nationales, des Etats-Unis, du Royaume-Uni et de la France, illustre, à mes yeux tout l'intérêt d'une telle mutualisation. Je souhaite d'ailleurs que cette flotte soit modernisée. Cela pourrait servir de source d'inspiration en ce qui concerne les capacités de renseignement, de reconnaissance et de surveillance. Il faut donc encourager ce mouvement tout en étant conscient de ses limites, qui s'arrêtent à l'autonomie stratégique que veulent conserver les nations.

Enfin, s'agissant du Rafale, je peux témoigner des qualités exceptionnelles de cet avion de combat, qualités reconnues par nos alliées, dont l'efficacité a été démontrée lors des dernières interventions et qui présente l'avantage de la polyvalence, ce qui correspond à une nécessité d'aujourd'hui.

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