Il y a eu une ouverture du régime syrien pendant deux ans, avec des progrès dans les relations avec l'Arabie saoudite, le Qatar, la Turquie, la France et les États-Unis. J'ai du mal à comprendre ce changement de cap. Nous sommes-nous laissés collectivement manipuler ? Le plus probable est que le durcissement résulte d'une incapacité totale à gérer le développement de la crise depuis l'affaire de Deraa alors qu'elle aurait pu être gérée au départ. A chaque fois, les réponses sont insuffisantes ou tardives et le régime s'enfonce dans la répression par une sorte d'effet de cliquet qui rend les choses irréversibles. Il y avait peut-être d'autres options, mais, désormais, le régime est allé trop loin.
Les réfugiés irakiens (près d'un million) ont été bien accueillis en Syrie. Ils y demeurent encore pour la plupart. Il y a peu de retour en Irak, mais la situation pourrait changer en fonction de la détérioration de la situation.
La communauté française compte environ 3 000 personnes, pour l'essentiel des binationaux qui se sont installés en Syrie et n'envisagent pas de la quitter sauf situation de chaos. Moins de 2 % ont quitté le territoire, essentiellement des expatriés.
Le Hezbollah a besoin de la Syrie pour son approvisionnement en armes. Par solidarité chiite, le Hezbollah, à l'inverse du Hamas palestinien qui a pris ses distances, demeure un soutien fort du régime syrien, comme l'Iran qui apporte une aide en matière de contrôle des communications et de conseil pour la stratégie de répression.
Les responsables de l'opposition syrienne restent réticents tant à une militarisation intérieure qu'à une intervention extérieure, même si certains membres de l'opposition et des victimes de la répression, qui ont suivi le développement de la situation en Libye, le demandent de façon plus explicite. Ce faisant, une réponse aux besoins humanitaires doit être envisagée. Les solutions sont très complexes à mettre en oeuvre, mais il s'agit aussi d'attirer l'attention de la communauté internationale sur les besoins humains et humanitaires dans le pays. Vis-à-vis de la population syrienne, toute marque d'intérêt ou de préoccupation a un impact fort, car elle peut se sentir abandonnée à son sort, même s'il faut prendre garde à ne pas donner de faux espoirs.
S'agissant de l'après-Assad, les interrogations sont les mêmes que dans les autres pays du printemps arabe. Au sein de l'opposition, on peut distinguer deux pôles : un pôle laïc et multiconfessionnel et un pôle plus proche des Frères musulmans. Le rapport de force n'est pas établi. Les Frères musulmans ont été très fortement réprimés depuis 40 ans, il est difficile de mesurer leur influence véritable. Le fait que les manifestants se soient regroupés dans ou autour des mosquées qui étaient les seuls lieux de rassemblement et de mobilisation utilisables, peut avoir renforcé cette influence. Il faut aussi tenir compte du caractère particulier et multiconfessionnel de la Syrie si l'on veut envisager l'avenir dans de bonnes conditions. Il paraît important que l'ensemble des communautés puissent être représentées au sein de l'opposition.