La relation entre la direction du renseignement militaire du ministère et celle de l'armée est à redéfinir. Comment s'engage le dialogue sur la répartition des compétences ?
Mon autre question porte sur le drone tactique de l'armée de terre. La DGA paraît estimer qu'il n'est pas mature. Le confirmez-vous ?
Général Bertrand Ract-Madoux, chef d'état-major de l'armée de terre. - La question du repyramidage a suscité des déclarations sans fin sur le nombre des officiers supérieurs. On nous a accusés de fabriquer une armée mexicaine. Mais les chiffres ont vite montré que la déflation du nombre d'officiers, dont celle des officiers généraux est une réalité. Quelques phénomènes, cependant, ont flouté la vision. Certains ont souligné que la masse salariale décroissait moins vite que celle des effectifs. Je leur rappelle que la loi de programmation prévoyait que 50 % des économies seraient réutilisés pour valoriser la condition du personnel et notamment réaligner les rémunérations qui le nécessitaient. Sans compter que nous payons maintenant le chômage des militaires que nous renvoyons à la vie civile : la déflation des effectifs alourdit ce poste de dépense. Nous avons appliqué les mesures de revalorisation des rémunérations les plus basses : car 50 % de nos soldats touchent le minimum de la fonction publique ; nous avons augmenté leur solde, à moyens constants.
Tous ces facteurs expliquent que les économies sur la masse salariale soient inférieures aux espoirs. C'est pourquoi je vous ai dit qu'il fallait excepter du tableau les éléments perturbateurs, comme Louvois, et les mesures exogènes, dont nous ne sommes pas responsables. Si, pour les officiers supérieurs, la prévision n'a pas été totalement respectée, c'est en raison du retour dans le commandement intégré de l'Otan : il a fallu conserver 400 officiers supérieurs pour occuper de nouveaux postes en état-major internationaux. On nous a demandé par ailleurs d'aligner le grade de nos pilotes d'hélicoptère sur celui des autres armées. Chez nous, ces 400 pilotes étaient sous-officiers, ils ont été nommés officiers, comme dans la marine et l'armée de l'air. Je veux dire ici que les accusations portées contre nous ont été très mal vécues. Aucun de nos militaires ne comprend par exemple qu'on puisse lui reprocher de ne travailler que 1 000 heures par an, contre 1 600 heures pour les civils, alors qu'il est de notoriété publique que les militaires ne comptent pas leur temps. Sur toutes ces questions, on a entendu certaines contre-vérités.
La brigade de sapeurs-pompiers de Paris est hors budget de la défense. Il existe certes entre nous des relations institutionnelles, et amicales, mais le budget, l'équipement et le fonctionnement dépendent de la Ville de Paris et des départements proches de la capitale.
Au sein du ministère, les modes de gouvernance évoluent. L'apparition d'une autorité fonctionnelle, la DRH du ministère, pour la gestion des ressources humaines de l'armée de terre ne m'inquiète pas, puisqu'un tel mode de gestion existait déjà en partie, et que le chef d'état-major et le directeur des ressources humaines de l'armée de terre conservent des responsabilités inchangées. Dès lors que nous disposons des leviers pour assumer nos responsabilités, il n'y a pas d'inquiétude. Mais il pourrait en apparaître si les choses venaient trop à changer, et si les décisions étaient prises ailleurs, notre rôle devenant de pure exécution.
La DGA vous a dit que le drone Watchkeeper n'est pas à maturité ? C'est vrai, mais seulement pour une part de ses fonctions. Il décolle, vole et se pose sans problème. Existait en revanche un problème de liaison qui a gêné les batteries de tests effectuées à Istres. Depuis quelques mois, l'industriel a fait de gros travaux, et l'Etat britannique a récemment certifié le drone en l'autorisant à voler au-dessus de son territoire. L'autorisation suivra en Europe. Et nous continuons les évaluations ensemble, compte tenu des excellentes relations entre nos deux unités de drones.
Il me reste à vous remercier.