Intervention de Justin Vaïsse

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 5 février 2014 : 1ère réunion
Nouvelles orientations stratégiques des etats-unis — Audition de M. Justin Vaïsse directeur du centre d'analyse de prévision et de stratégie au ministère des affaires étrangères

Justin Vaïsse, directeur du centre d'analyse, de prévision et de stratégie du ministère des affaires étrangères :

On voit bien comment, aux États-Unis, on a ces vagues d'introversion et d'extraversion qui coïncident souvent avec une baisse ou une hausse des budgets de la défense. Généralement, ce sont les décennies paires qui sont marquées par une intervention forte dans les affaires du monde : les années 40 avec la Seconde Guerre mondiale, les années 60 avec la guerre froide et l'engagement au Vietnam, les années 80 avec Reagan et l'initiative de la guerre des étoiles, les années 2000 avec l'engagement en Afghanistan et en Irak. Au contraire, les années impaires sont des années de retour vers les préoccupations intérieures et de diminution des budgets militaires, les années 50 avec Eisenhower, les années 70 avec le retrait du Vietnam et la contraction opérée par Nixon, les années 90 dans une moindre mesure et les années 2010 où l'on voit également ce double phénomène. Il est peu probable qu'un nouvel attentat terroriste change cette orientation comme a pu le faire celui du 11 septembre 2001 car la tendance à l'introversion est tellement forte et cela ne serait pas suffisant pour transformer l'opinion publique et lui faire soutenir une intervention. Ce que fait le président Obama fait pour assurer la sécurité des États-Unis sans être obligé d'envoyer un corps expéditionnaires de 150 000 hommes, grâce à l'emploi des forces spéciales, des drones, et des moyens de cyberguerre serait utilisé davantage. Cela étant, le risque d'un attentat n'est pas exclu, il y a des tentatives fréquentes et certaines très sérieuses.

S'agissant de la relation avec les pays émergents, il est probable que le président Obama a été très optimiste. Il a ainsi tenté de promouvoir le G20 comme un instrument de gouvernance mondiale en 2009 à Pittsburgh, or le G8 existe toujours et le G20 a eu du mal à se structurer, parce que ces pays restent prisonniers d'un grand souverainisme, ils sont réticents vis à vis de la gouvernance mondiale et des solutions coopératives et à produire des efforts sur des questions comme le climat ou la régulation financière. Il y a eu aussi une certaine désillusion à l'égard de la Chine qui est venue avec Copenhague en 2009 et s'est poursuivie en 2010 avec un durcissement dans le dialogue stratégique. À cela s'ajoutent nombre de petits irritants, avec l'Inde, avec le Brésil sur la question de la NSA, avec l'Indonésie, avec l'annulation de trois visites du président Obama avant qu'il ne se déplace dans ce pays. Les relations ne se sont donc pas aussi faciles.

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