Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 29 mars 2006 à 15h00
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Et nous sommes loin de compte avec les prétendus « petits aménagements nécessaires » !

Le fonds de pension américain Westbrook, qui est très bien placé pour les opérations de vente à la découpe à Paris, vient d'acquérir dans la capitale cent immeubles, soit plusieurs milliers d'appartements, son objectif étant de réaliser 30 % de plus-value sur cinq ans.

En fait, il ne s'agit pas de droit au logement, de parc locatif, de droit de propriété, il s'agit de consacrer les immeubles et les parcelles d'immeubles en tant qu'objets spéculatifs. Des groupes de spéculateurs de toute sorte, et pas simplement des fonds de pension américains, investissent de plus en plus dans de petits logements, qui ne correspondent d'ailleurs pas aux besoins de la population, dans l'espoir de réaliser une plus-value immédiate.

On sait toutefois que, dans l'affaire des Arquebusiers - l'un des immeubles emblématiques des conflits de vente à la découpe, situé dans le IIIe arrondissement - le promoteur Westbrook a été débouté. Ce n'est pas un mince résultat à l'actif des locataires et de leur lutte ! Ainsi, à l'heure actuelle, la justice serait plutôt en train de rendre caduques les opérations qui ont déjà été engagées.

Pour parachever l'état des lieux, je veux insister sur le fait que notre pays compte aujourd'hui 8 753 500 personnes qui ne sont pas logées convenablement. Cette situation appelle une prise de conscience nationale et la mise au point d'outils d'action publique appropriés.

Dès demain, nous examinerons le projet de loi portant engagement national pour le logement et nous aurons l'occasion de dire combien nous sommes loin de cet objectif ! En l'occurrence, nous déplorons que la question de la vente à la découpe ait été disjointe dudit projet de loi, alors que les deux questions sont pourtant liées.

La vente à la découpe est, en effet, un facteur de spéculation immobilière très puissant à Paris et dans quelques grandes villes.

La vente par lots d'un immeuble appartenant à un propriétaire unique n'est pas un procédé nouveau, cela a été dit moult fois en première lecture. Cependant, la forme que prend actuellement ce type de vente est caractérisée. Elle consiste, pour un bailleur institutionnel - banque, assurance - à céder à un marchand de biens ou à un fonds de pension un immeuble, lequel est ensuite revendu par appartements. On voit tout de suite le lien direct avec la spéculation immobilière !

Je rappelle que ce phénomène de vente à la découpe a pris une ampleur nouvelle depuis 2002 puisqu'il a crû de 35 %. Cette croissance est toute naturelle dans la mesure où elle est en liaison avec la flambée spéculative, à laquelle elle participe.

À Paris et dans sa couronne, 264 opérations sont en cours et 160 000 logements sont concernés. Il ne s'agit donc pas d'une petite affaire marginale. C'est au contraire un problème très important !

Ces opérations ont concerné, à Paris, 15 % des ventes d'appartements anciens, soit 6 378 logements. Il ne faut pas croire que seules sont touchées quelques célébrités médiatiques comme Mme Jeanne Moreau ! Ces 6 378 logements sont, pour une majorité d'entre eux, des logements sociaux de fait. Le nombre de ces ventes est d'autant plus impressionnant que l'on sait qu'elles annulent l'effort actuel de la municipalité pour construire des logements sociaux neufs.

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