Intervention de Nicole Borvo Cohen-Seat

Réunion du 29 mars 2006 à 15h00
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Nicole Borvo Cohen-SeatNicole Borvo Cohen-Seat :

Ne nous y trompons pas, c'est un des facteurs de la diminution du parc locatif !

Et le pire est à venir, notamment dans la couronne parisienne et en province, car la possibilité de vente par lots touchera une grande partie du patrimoine public, notamment celui de la Caisse des dépôts et consignations ; chacun sait qu'un nombre important de ses logements sont concernés.

C'est dire qu'en matière de répartition des logements publics ou sociaux nous sommes devant des bouleversements à venir considérables. Évidemment, ils se feront au profit de la spéculation et non au profit de ceux qui ont besoin de logements !

Voilà pourquoi cette proposition de loi est loin d'être à la hauteur des exigences.

Je rappelle qu'à Paris le phénomène est extrêmement large et touche de nombreux immeubles dans les XIe, XIIIe, XIXe et XXe arrondissements, des immeubles où logent des personnes relativement âgées, quoique pas suffisamment pour être protégées, et des personnes modestes vivant depuis longtemps dans leur appartement.

Depuis 2004, nombre de ces victimes se sont mobilisées pour alerter les pouvoirs publics et l'opinion publique sur l'iniquité de leur situation. Heureusement, sinon nous aurions eu droit au silence radio ! C'est grâce à la mobilisation de ces personnes qu'aucun parlementaire parisien n'a pu rester indifférent à leur situation - avec, bien sûr, plus ou moins de conviction !

En première lecture, après avoir entendu MM. Goujon, Pozzo di Borgo et Dominati, tous trois sénateurs de Paris, nous aurions pu croire qu'il existait un consensus. La vente à la découpe semblait être une pratique épouvantable contre laquelle il fallait absolument agir.

Or, en réalité, au-delà des discours tonitruants, quand il s'est agi de prendre des mesures, les ambitions se sont faites beaucoup plus modestes !

En refusant d'utiliser les outils publics permettant de porter un coup d'arrêt à cette pratique, nous sommes arrivés à une impasse.

Utiliser ces outils, cela signifie donner le droit aux collectivités de s'opposer à la vente à la découpe, ce qui ne constitue pas une atteinte au droit de propriété. En raison de la pénurie de logements, les collectivités devraient pouvoir se prémunir contre la sortie de logement de leur parc locatif.

Les collectivités locales doivent pouvoir conserver, pendant une certaine période, leur parc locatif. Cela a déjà été fait à d'autres époques, et ce n'est pas de l'étatisme ! En tout état de cause, le parc locatif est suffisamment rémunérateur pour les propriétaires pour justifier qu'il reste en l'état.

Certes, la proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, donne quelques possibilités aux locataires qui peuvent acheter leur logement. Mais il me semble que vous n'avez pas bien compris ce que j'avais déjà souligné en première lecture : à peu près une victime d'une vente à la découpe sur cinq peut acheter son logement. Vous ne vous occupez donc que d'une personne sur cinq !

Par ailleurs, vous avez alourdi les contraintes qui pèsent sur les collectivités locales. Certes, celles-ci auront le droit de préempter, mais elles ne peuvent tout de même pas acheter tous les immeubles vendus à la découpe, surtout quand on connaît leur nombre à Paris ou en première couronne.

Et quand il s'agit de dissuader les spéculateurs, contre lesquels tout le monde s'insurge, subitement, vous refusez d'agir : le texte ne contient rien contre eux. Ils profitent des possibilités que leur offre, par exemple, M. Marini, qui, on le sait, est toujours en pointe pour leur donner un petit coup de pouce.

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