Intervention de Amiral Edouard Guillaud

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 12 octobre 2011 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2012 — Mission défense - Audition de l'amiral edouard guillaud chef d'état-major des armées

Amiral Edouard Guillaud, chef d'état-major des Armées :

S'agissant des priorités, je n'ai qu'une réponse : donnez-moi le niveau de vos ambitions et je vous indiquerai les moyens nécessaires pour les atteindre. Aujourd'hui notre outil de défense confère à la France une forte crédibilité sur la scène internationale. Nous disposons d'un droit de véto au Conseil de sécurité de l'Onu. Nous sommes la sixième puissance économique mondiale. Le maintien de cette crédibilité a un coût, mais en dernier ressort il appartient au peuple dont vous êtes les représentants de définir les priorités et les ambitions de la France. A ces ambitions correspondent un format et des capacités. La question au fond est : voulons-nous continuer de jouer en première division ou pas ?

S'agissant du drone naval, la marine nationale va mettre en oeuvre un patrouilleur hauturier, tête de la série Gowind mis à disposition par DCNS pour 3 ans, - l'Adroit. Ce type de partenariat présente de nombreux avantages à la fois pour DNCS qui dispose ainsi d'un démonstrateur seaproven et pour la marine nationale qui bénéficie d'un bâtiment supplémentaire. Sur ce patrouilleur, un prototype de drone naval à voilure tournante va être expérimenté. La question des drones navals est une question ancienne. J'y ai travaillé moi-même en tant que jeune officier. Ces drones rempliront des services importants, mais à condition qu'on soit capable de les faire atterrir sur des plateformes en mouvement. Les Américains font des essais sur leurs propres navires qui sont des plateformes beaucoup plus larges et lourdes. C'est évidemment plus facile que sur un patrouilleur hauturier.

Le Watchkeeper est un drone britannique développé sur la base d'un drone israélien. Moins souple d'emploi que le Sperwer, car il utilise une piste, il lui est supérieur dans d'autres domaines. Il emporte des senseurs plus performants et plus récents. Il y a un accord avec les Britanniques pour participer à l'évaluation de ce drone. C'est quasiment de l'achat sur étagères pour nous Français.

S'agissant de la volonté britannique de construire avec nous un projet de drone MALE, nous sommes confrontés sur ce sujet aux mêmes types de difficultés que sur le reste. Nos amis ont une solide réputation de pragmatisme. L'envers de la médaille c'est qu'ils considèrent la planification à moyen-long terme comme du « romantic planning », au sens de roman-feuilleton, plein de rebondissements.

Sur la batellerie, nous n'avons jamais été bons car cela fait typiquement partie des petits programmes, en termes financiers et technologiques, qu'il est facile de supprimer ou de retarder quand on veut faire des économies budgétaires et qui sont pourtant indispensables, le moment venu au coeur de la bataille.

Concernant Hélios, deux pays occidentaux seulement disposent de satellites d'observation optique : les Etats-Unis et nous. L'image satellitaire en voie claire est une denrée rare. Oui nous avons beaucoup utilisé Hélios afin d'établir des dossiers d'objectifs, notamment pour les tirs de Scalp que nous avons effectués.

La DAMB est un vaste sujet. Nos industriels et nos militaires sont les seuls à avoir les connaissances techniques nécessaires sur l'ensemble du spectre, ou du moins capables de les acquérir si nécessaire.

Les derniers contacts avec mes homologues américains me laissent penser que la défense antimissile n'est ni destinée à suppléer la dissuasion, ni à être dirigée contre des Etats tel que la Chine ou la Russie, mais vise plus particulièrement des États « voyous ». D'un point de vue pratique, il faut bien mesurer le risque technologique, politique et militaire à être entraînés dans une course aux équipements, sans aucune garantie de bénéficier in fine d'un transfert technologique.

Donc si on veut participer à cette aventure il est indispensable d'apporter nos propres briques technologiques.

Nous avons choisi ce que l'on appelle l'alerte avancée. Nous sommes prêts à partager les outils que nous envisageons de mettre en place, qu'il s'agisse du satellite ou des radars, avec nos homologues européens prêts à fournir des efforts scientifiques et financiers nécessaires. Mais, pour l'instant, cela ne semble intéresser personne en Europe.

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