Nous sommes saisis d'un projet de loi, déjà adopté par l'Assemblée nationale, autorisant l'approbation d'un accord entre la France et la Principauté de Monaco relatif à la prise en charge sur le territoire français de déchets radioactifs monégasques.
Avant de vous présenter le contenu de cet accord et ses conséquences en matière financière et environnementale, je voudrais rappeler brièvement les relations particulières qui existent entre la France et Monaco.
Les relations franco-monégasques sont régies par le traité du 24 octobre 2002, destiné à adapter et à confirmer les rapports d'amitié et de coopération entre les deux pays, qui est entré en vigueur le 1er décembre 2005.
Ce texte fait passer les relations franco-monégasques d'une « amitié protectrice » (selon les termes du précédent traité de 1918) à une « communauté de destin ».
L'esprit et le contenu du traité de 1918 ne correspondaient plus, en effet, aux réalités actuelles et n'étaient plus compatibles avec les prérogatives d'un État souverain, qui dispose d'une Constitution (depuis 1962), qui est membre de l'ONU (depuis 1993), du Conseil de l'Europe (depuis 2004) et de nombreuses autres organisations internationales (mais pas de l'Union européenne).
En outre, il faut savoir que son poids économique (le PIB de Monaco était de 3,5 milliards d'euros en 2005, dont 70 millions d'euros pour le grand prix de Formule 1) et son rôle pionnier (notamment en matière de protection de l'environnement et du milieu marin) lui permettent d'occuper une place au niveau international sans rapport avec sa dimension (une population de 32 000 habitants sur une superficie d'environ 2 km2).
Avec le nouveau traité de 2002 sont confirmées les relations d'amitié franco-monégasques, dont la spécificité est due à la situation géographique de la principauté, enclavée dans le territoire français, ainsi qu'à notre histoire commune.
Le nouveau traité réaffirme la souveraineté et l'indépendance de la principauté de Monaco, tout en poursuivant la politique d'étroite concertation suivie par les deux États, notamment dans le domaine des relations internationales. Il prévoit ainsi que les actions de la principauté, conduites dans l'exercice de sa souveraineté, s'accordent avec les intérêts français dans les domaines politique, économique, de sécurité et de défense.
Le traité du 24 octobre 2002 met aussi fin à la nécessité d'un agrément français dans le cas d'une modification de l'ordre successoral. Cette clause n'a pas trouvé à s'appliquer, puisque de Prince Albert II a accédé au trône le 6 avril 2005 à la mort de son père, le Prince Rainier III, après plus de 50 ans de règne.
Enfin, il est institué une commission de coopération franco-monégasque, qui sert de cadre aux consultations régulières entre les deux pays sur les questions d'intérêt commun. Lors de sa première réunion, cette commission a créé une « commission chargée des questions locales de coopération transfrontalière », qui s'est réunie à plusieurs reprises, associant les représentants des deux États et des collectivités locales intéressées. La Principauté de Monaco forme, en effet, avec les communes environnantes une agglomération de 103 000 habitants et joue vis à vis de celles-ci le rôle d'un pôle d'activité. Ainsi, sur 40 000 salariés du secteur privé que comptait Monaco en 2006, 27 000 étaient français et 30 000 résidaient en France. Les migrations quotidiennes sont donc importantes et justifient la mise en oeuvre d'un plan de déplacements urbains associant la Principauté et les communes. La Principauté est ainsi associée aux réflexions menées sur le projet de ligne à grande vitesse PACA, dont elle prend part au cofinancement des études.
Le centre hospitalier Princesse Grace met à la disposition des communes environnantes un ensemble complet de services hospitaliers.
Sur le plan fiscal, les ressortissants français domiciliés à Monaco (c'est le cas de 8 000 de nos compatriotes, installés à Monaco parfois depuis plusieurs générations) paient l'impôt sur le revenu et l'ISF comme s'ils étaient domiciliés en France, sauf pour une partie d'entre eux établie à Monaco avant 1957 et qui va en diminuant (environ 200 personnes).
Enfin les établissements scolaires monégasques accueillent en priorité les enfants domiciliés à Monaco, puis les élèves dont les parents occupent un emploi en Principauté sans y habiter. Il y a près de trois fois plus d'enfants français que d'enfants monégasques scolarisés à Monaco.
Le traité du 24 octobre 2002 est d'ailleurs complété par une série d'accords sectoriels, qui portent sur des sujets variés, comme l'entraide judiciaire en matière pénale, les relations économiques et financières ou encore le domaine social.
En matière d'énergie, par exemple, la convention du 25 juin 2009 relative à l'approvisionnement de la Principauté de Monaco en électricité permet aux consommateurs monégasques de bénéficier des mêmes tarifs réglementés qu'en France.
En raison de l'exiguïté et de l'enclavement de son territoire, la Principauté de Monaco ne dispose pas, en effet, d'installations adaptées pour la production d'électricité (en particulier il n'y a pas de centrale nucléaire).
J'en viens maintenant à l'accord qui est soumis à notre examen.
Le stockage à titre définitif sur le territoire français de déchets radioactifs en provenance de l'étranger est en principe interdit par la loi.
Le présent accord tend à introduire une exception à ce principe afin de permettre la prise en charge sur notre territoire de déchets radioactifs issus de la Principauté de Monaco.
Le volume de ces déchets radioactifs est faible et provient uniquement d'activités médicales ou de recherche.
Monaco est, en effet, dépourvu de centrale nucléaire ou de force de dissuasion.
Ces déchets radioactifs, dont le volume est estimé à 165 kg par an, proviennent essentiellement du secteur médical et du secteur de la recherche, puisque Monaco accueille des laboratoires du Centre scientifique de Monaco et de l'Agence internationale de l'énergie atomique.
À titre de comparaison, cela ne représente qu'environ 0,16 % des déchets radioactifs des petits producteurs français, qui s'élèvent à 100 000 Kg par an.
Ce faible volume de déchets radioactifs, mais aussi la topographie de Monaco, sa faible superficie, sa géographie (le risque sismique), la densité de sa population ont conduit à la conclusion que l'implantation d'un centre de stockage de déchets radioactifs au sein de la Principauté ne serait pas conforme aux prescriptions concernant la sûreté des installations de stockage de déchets radioactifs et la protection de la santé publique. En particulier, l'immersion des déchets, qui a été pratiquée par de nombreux pays (en France jusqu'en 1982) n'est plus considérée aujourd'hui comme un mode de gestion responsable.
La solution consistant à transférer ces déchets au sein des centres de stockage français s'est donc imposée comme une nécessité.
En France, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (ANDRA), qui est un établissement public industriel et commercial, est le principal organisme responsable du stockage des déchets radioactifs.
L'ANDRA collecte, trie, conditionne et stocke les déchets radioactifs. Ceux-ci proviennent essentiellement des centrales nucléaires. Le transport s'effectue principalement par la route. L'ANDRA dispose de plusieurs centres d'entreposage et de stockage sur notre territoire, comme La Hague, Saclay, Valduc, Marcoule ou Cadarache.
Que faut-il penser de cet accord ?
Cet accord ne prévoit pas une prise en charge automatique. Il laisse la faculté au gouvernement français de refuser la prise en charge de déchets radioactifs monégasques. En particulier, l'accord concerne exclusivement les déchets radioactifs utilisés sur le territoire monégasque. Par ailleurs, celles-ci devront fournir un descriptif détaillé des déchets et le transfert devra faire l'objet d'une autorisation.
Cet accord n'aura aucune incidence financière pour la France. En effet, les coûts de transport et de prise en charge des déchets seront supportés par Monaco.
Du point de vue environnemental, cet accord permettra de stocker dans les meilleures conditions de sécurité, les déchets radioactifs monégasques, qui ne peuvent être stockés de manière satisfaisante sur le territoire de la Principauté et qui représentent un volume assez faible provenant uniquement d'activités médicales et de recherche.
Je vous proposerai donc d'adopter ce projet de loi et vous suggère de procéder à son examen sous forme simplifiée.