Intervention de Marcel-Pierre Cléach

Réunion du 29 mars 2006 à 15h00
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Adoption d'une proposition de loi en deuxième lecture

Photo de Marcel-Pierre CléachMarcel-Pierre Cléach :

Dès le 13 octobre dernier, lors de l'examen en première lecture par notre assemblée de la proposition de loi relative au droit de préemption et à la protection des locataires en cas de vente d'un immeuble, je vous avais déjà fait part des difficultés juridiques et techniques que me paraissait soulever ce texte.

En effet, loin de répondre à l'objectif affiché d'assurer une meilleure protection des locataires, cette proposition de loi va, me semble t-il, créer de nouvelles contraintes sur le marché immobilier, susciter de nombreux contentieux et, au final, un renchérissement du prix des logements concernés.

Le rappel des événements qui ont conduit au dépôt de cette proposition de loi démontre d'ailleurs son caractère circonstanciel.

Comme vous le savez, la loi du 6 juillet 1989 autorise à mettre fin à un bail pour trois motifs, dont le congé pour vente. À la fin des années quatre-vingt-dix, la question a pris un tour politique et social lorsqu'une société immobilière a décidé de vendre par lots des immeubles qui avaient bénéficié de prêts aidés. Des négociations ont alors eu lieu entre les associations de locataires et les bailleurs personnes morales. Elles ont abouti à un accord collectif relatif aux congés pour vente par lots aux locataires dans les ensembles immobiliers d'habitation.

Cet accord, qui donne satisfaction aux deux parties, a été étendu, par un décret en date du 22 juillet 1999, à tous les acteurs de la vente par lots, à l'exception du parc social et des sociétés civiles immobilières familiales. Il prévoit une batterie de dispositions de protection des locataires, notamment une information détaillée du locataire très en amont de la procédure, l'exercice du droit de préemption par le conjoint, un ascendant ou un descendant - déjà ! -, le renouvellement du bail des personnes en situation difficile et des personnes âgées de plus de soixante-dix ans, une procédure de conciliation en cas de litige, l'obligation pour le bailleur de faire une proposition de relogement aux locataires qui ne se portent pas acquéreurs de leur logement lorsque leurs ressources sont inférieures à 80 % du plafond du prêt locatif intermédiaire.

Lors des auditions que j'avais menées en 2004 en vue de la rédaction, au nom de la commission des affaires économiques, d'un rapport sur le logement locatif privé, j'ai pu constater que l'ensemble des acteurs concernés, dont les associations de locataires, se satisfaisait de la situation juridique en vigueur jusqu'alors. Le législateur était parvenu à un bon équilibre entre, d'une part, la nécessaire protection des plus faibles et, d'autre part, le respect du droit de propriété et d'une certaine fluidité du marché.

J'avais également entendu les représentants des propriétaires institutionnels, notamment des compagnies d'assurances, me confirmer leur désengagement progressif et déterminé du secteur de l'investissement locatif « habitation », en raison de sa faible rentabilité nette, mais surtout de l'accroissement des difficultés de gestion engendrées par les usines à gaz successives que le législateur, mais surtout l'exécutif, s'ingéniait à mettre en place au gré du vent, créant pour les propriétaires une incertitude juridique incompatible avec la sécurité attendue d'un investissement à long terme, ce qui est le cas des grands investissements immobiliers.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion