Intervention de Annie David

Réunion du 12 novembre 2014 à 14h30
Financement de la sécurité sociale pour 2015 — Article 3

Photo de Annie DavidAnnie David :

Le présent article tend à introduire une contribution au titre des médicaments destinés au traitement de l’hépatite C. Cette contribution est modulée en fonction du chiffre d’affaires réalisé par les entreprises redevables, à savoir celles qui commercialisent les traitements contre l’hépatite C.

Si cette contribution a été mise en place, c’est d’abord en réaction aux prix exorbitants des traitements proposés par les laboratoires. Ainsi, le laboratoire américain Gilead propose un traitement, le Solvadi, certes très efficace – 90 % de guérisons en traitement combiné, contre 50 % avec les traitements précédents –, mais dont un comprimé coûte 650 euros, soit 56 000 euros la cure de trois mois, sachant que six mois sont souvent nécessaires, et que la prise de Solvadi est associée à la prise d’autres médicaments.

D’après Médecins du Monde, si l’on couvrait tous les besoins avec du Solvadi, cela coûterait quelque 7 milliards d’euros à l’assurance maladie, soit le budget de l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris, l’AP-HP, ou un quart des dépenses de médicaments en France.

Concernant ce médicament, le prix proposé sur le marché français est en cours de négociation avec le Comité économique des produits de santé, le CEPS ; il avoisinerait désormais les 30 000 euros à 35 000 euros la cure, contre 34 000 euros tels qu’ils ont été négociés en Grande-Bretagne, sachant que la France est un grand marché pour le laboratoire américain, puisque l’hépatite C touche environ 200 000 personnes en France et que 150 000 personnes seraient des malades non dépistés. Près de 60 000 patients, plus avancés dans la maladie, sont en attente de ce traitement, contre 5 000 personnes concernées en Grande-Bretagne, où l’approche de l’accès aux soins pour tous reste différente de la nôtre.

Le prix demandé par le laboratoire américain est d’autant plus inacceptable que le coût de fabrication est estimé à une centaine d’euros pour la cure de trois mois. Surtout, le laboratoire n’a pas effectué la recherche et développement ayant mené à la découverte du traitement : il a simplement racheté pour 11 milliards de dollars la start-up Pharmasset qui avait effectué les recherches.

Dorénavant, le géant américain souhaite ni plus ni moins que soit rentabilisé son investissement, et ce sur le dos du contribuable français, qui a par ailleurs déjà payé une première fois, au travers des financements alloués par la France à la recherche académique en virologie. D’ailleurs, les prix pratiqués pendant la phase d’autorisation temporaire d’utilisation des médicaments sont tels qu’ils permettent en soi aux laboratoires un retour positif sur investissement.

Ainsi, la contribution prévue par cet article n’est qu’un juste retour des choses : il s’agit de rendre au contribuable, déjà fortement touché par la crise économique, l’argent qui lui est dû et qui est anormalement ponctionné par des laboratoires peu scrupuleux.

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