Madame la ministre, lors de la discussion de cet article à l’Assemblée nationale, vous avez justifié la baisse du montant de la dotation à l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, l’ONIAM, « afin d’éviter que ses réserves ne soient excessives », raison pour laquelle vous réduisez son encours de précaution. Ces réserves sont donc jugées par vous abusives. Mais sur quels critères ?
On sait qu’à ce jour la commission d’experts a bouclé l’examen de 2 296 dossiers, sur un total de 8 500 demandes, selon le dernier bilan fourni par l’ONIAM. Il reste donc un peu plus de 6 200 dossiers à examiner. Comment pouvez-vous anticiper les indemnisations futures et déjà juger ces réserves excessives? Vous savez comme nous que, lorsqu’on assèche une dotation, on diminue d’autant les capacités d’intervention.
Laissez-moi vous rappeler le discours de la rapporteur pour avis de la commission des finances de l’Assemblée nationale sur le PLFSS pour 2012 – donc sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy –, qui avait inauguré ce cycle de ponction du fonds de l’ONIAM en présentant un amendement en ce sens : « L’ONIAM, disposera à la fin de l’année 2011 de 41, 8 millions d’euros de réserves sur son fonds de roulement. Dans le contexte des finances publiques que l’on connaît, il n’est pas possible de laisser un établissement public disposer d’un tel fonds de roulement. »
Ce qui est intéressant, c’est la réponse apportée à l’époque par le ministre du travail, Xavier Bertrand – ministre d’un gouvernement de droite –, puisqu’il avait lui-même émis de profonds doutes quant à la possibilité de ponctionner ce fonds : « Les dépenses de l’ONIAM sont des dépenses de guichet. Il ne dispose pas d’un stock qui serait en sommeil. […] Si vous réduisez sa dotation, vous risquez de causer un retard dans le versement des indemnités. L’argent de l’ONIAM, ce n’est pas de l’argent qui dort. La logique de la CNAM consiste peut-être à dire qu’il y a beaucoup d’argent dans ce fonds de roulement, mais la réalité, c’est que si vous réduisez la dotation de l’ONIAM de façon trop importante, vous prenez un risque pour l’indemnisation des victimes, un risque que je n’ai vraiment pas l’intention de courir, je le dis très clairement. Je ne me vois pas aller expliquer aux victimes qu’il y aura du retard […]. Je veux bien qu’on puisse se dire, à chaque fois, que l’on n’a pas besoin d’avoir des fonds de roulement trop importants. Peut-être. Mais il reste qu’ils doivent être suffisants. »
Madame la ministre, pourquoi, en définitive, courez-vous ce risque ?
Pour clore ce recueil de citations fort intéressantes, je vous citerai vous-même, lorsque vous avez, toujours à l’occasion de l’examen du PLFSS pour 2012, demandé le rejet de l’amendement présenté par la droite parlementaire en vue de ponctionner le fonds de roulement de l’ONIAM : « Le groupe SRC ne votera pas cet amendement pour deux raisons. Premièrement, nous considérons que c’est prendre un risque. Le ministre a posé des questions de bon sens. Nous n’avons pas d’éléments nous permettant de penser que les besoins auxquels l’ONIAM devra répondre connaîtraient une diminution telle que nous n’aurions pas besoin du fonds de roulement tel qu’il existe actuellement. Deuxièmement, je suis absolument sidérée par cette recherche d’économies de bouts de chandelle. C’est vraiment la course à l’échalote ! »
Eh bien, madame la ministre, l’argumentation que vous aviez employée à l’époque est tout à fait juste et nous la reprenons aujourd'hui à notre compte. C’est pourquoi nous souhaitons le rejet de cet article.