Intervention de Marcel-Pierre Cléach

Commission des affaires sociales — Réunion du 17 octobre 2012 : 3ème réunion
Journée nationale du souvenir du 19 mars — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Marcel-Pierre CléachMarcel-Pierre Cléach, président du groupe d'études des sénateurs anciens combattants :

J'attendais, pour réunir le groupe d'études des sénateurs anciens combattants, que le rapport d'Alain Néri soit présenté. Je sais déjà que ses membres seront partagés, car c'est un très vieux sujet : déjà, en septembre 1981, le secrétaire d'Etat aux anciens combattants avait réuni trente et une associations à ce propos. Vingt-neuf d'entre elles avaient exprimé leur opposition, et deux, dont la Fnaca, étaient pour le choix du 19 mars comme date de commémoration.

Depuis plusieurs années, les rapports entre les partisans de ce projet et ses opposants sont assez tendus au sein du monde combattant. J'avais espéré un apaisement : quand j'ai rapporté la loi qui a fixé au 11 novembre la commémoration de tous les morts pour la France quels que soient les conflits auxquels ils avaient participé, nous avions, avec Alain Néri et le secrétaire d'Etat, Marc Laffineur, trouvé un accord en précisant que cette célébration n'excluait pas la continuation des autres commémorations. Cette loi, à la suite d'une très large concertation, a presque fait l'unanimité du monde combattant. La division persiste néanmoins. Et je crains que l'inscription à l'ordre du jour du Sénat de cette proposition de loi datant de 2002 ne ravive ces problèmes au sein du monde combattant : le comité d'entente, qui groupe l'Union nationale des combattants (UNC) et une quarantaine d'associations représentant environ un million deux cent mille anciens combattants, nous a fait parvenir un communiqué exprimant son opposition.

Personnellement, je suis opposé à cette proposition de loi, pour des raisons de fond, de forme, et d'opportunité. La première raison de fond, c'est qu'elle va consacrer et raviver la division du monde combattant, comme cela avait été le cas en 1981. Il me paraît illusoire d'espérer un rassemblement autour de quelque date que ce soit.

Du point de vue de la vérité historique, le 19 mars n'a pas ramené la paix en Algérie, il ne s'agit que du cessez-le-feu. Malheureusement, il y a encore eu après cette date, dans les rangs de l'armée française, 145 tués, 162 disparus, et 422 blessés, sans parler du sort des harkis, au sujet desquels les chiffres varient de 60 000 à 150 000 tués. Il en résulte une perception très douloureuse du 19 mars dans les familles des harkis, dans celles des militaires français qui sont morts après cette date, et chez les Français d'Algérie, qui ressentent encore très douloureusement la coïncidence entre une célébration nationale française et la fête de l'indépendance algérienne.

La tradition française est de fêter les victoires. On fête rarement les défaites ou les échecs. On n'a pas fêté l'armistice signé par Pétain en 1940 ni les accords de Genève consacrant la perte de l'Indochine. Or l'armistice de 1962, au moins par ses conséquences, représente un échec, dont la célébration n'est peut-être pas nécessaire.

Nous avons déjà une journée, fixée au 5 décembre par décret, pour la même commémoration.

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