En réponse à Roger Karoutchi, j'indiquerais que l'ASN est réformable et doit être réformée pour lui permettre d'exercer les nouvelles missions qui lui incombent. Mais le système de financement actuel ne lui permettra plus de faire face aux défis qui s'imposent à elle, dans un horizon proche - peut-être de deux ou trois ans. Il faut en tout cas garder le caractère dual qui est propre à la France, et s'articule autour de l'ASN, qui joue un rôle de pilote, et de l'IRSN en tant qu'outil d'expertise et de recherche. Il convient néanmoins de proposer une articulation plus fluide permettant à l'ASN et à l'IRSN de fonctionner dans de meilleures conditions, sur le plan de l'organisation et du financement. Notre système dual est reconnu internationalement comme étant particulièrement performant, et a permis de hisser la France aux premiers rangs mondiaux : nous devons conserver la compétitivité de notre filière nucléaire qui est particulièrement élevée. Il n'est pas question de révolutionner un dispositif qui a fait ses preuves.
Edmond Hervé a appelé notre attention sur le caractère essentiel des commissions locales d'information. Je me suis efforcé de réfléchir dans trois domaines : la sûreté nucléaire, la radioprotection et la transparence nucléaire. La transparence n'est pas à négliger et elle constitue aujourd'hui un enjeu sociétal majeur. Il est de la responsabilité du Parlement de traiter cette question. Par conséquent, la création d'une délégation parlementaire exerçant une mission de contrôle permettrait de donner beaucoup plus de lisibilité à un système qui, s'il n'est pas opaque, n'en est pas moins très complexe, le financement étant réparti entre cinq programmes relevant de quatre missions pour des montants qui, somme toute, ne sont pas considérables. Les enjeux budgétaires s'élèvent à 580 millions d'euros si on prend en compte le produit de la « taxe INB », plus de 260 millions d'euros au titre des dotations de l'État et une cinquantaine de millions d'euros pour la taxe spécifique dont bénéficie l'IRSN. C'est pourquoi je propose la mise en place d'une délégation parlementaire couplée à la création d'un « jaune budgétaire ». Une solution, un temps envisagée, aurait été de créer un programme unique, mais cette proposition ne nous est pas apparue viable dans l'immédiat.
Enfin, Philippe Dallier a parlé non de sûreté nucléaire mais de sécurité nucléaire, en faisant mention de tous les actes de malveillance, que ceux-ci soient de nature terroriste ou de simples manifestations intempestives. La sécurité nucléaire relève de la responsabilité des exploitants, qui doivent réaliser les travaux nécessaires, ainsi que de celle de l'État au titre des services de renseignements et des forces de police en charge de l'ordre public autour des installations nucléaires. Il s'agit d'une autre problématique. Concernant la sûreté nucléaire, je peux garantir que l'ASN dispose des moyens intellectuels et techniques nécessaires, notamment via l'IRSN, pour assurer ses missions de pilotage et de contrôle.
Enfin, pour finir, je souhaiterais ajouter qu'alors que la phase préalable au débat sur la transition énergétique arrive à son terme et que les contraintes budgétaires de l'État se renforcent, le moment semble venu de faire franchir une étape au système de financement de la sûreté nucléaire dans notre pays. Si l'ASN et l'IRSN n'enregistrent pas, au cours de trois prochaines années, un accroissement substantiel de leurs ressources pour faire face à leurs missions dont le poids est croissant, des choix devront être faits. Le risque est que les moyens soient concentrés sur la sûreté des installations existantes au détriment des projets nouveaux ; de même, les activités de recherche pourraient être réduites pour compenser une insuffisance de ressources pour abonder les tâches d'expertise.