Intervention de Jacques Genest

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 13 novembre 2014 : 1ère réunion
Loi de finances pour 2015 — Compte d'affectation spéciale « financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » - examen du rapport spécial

Photo de Jacques GenestJacques Genest, rapporteur spécial :

C'est avec un grand plaisir que je présente devant vous, pour la première fois, les crédits pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » ou « Facé ». En tant que président du syndicat départemental d'énergies de l'Ardèche, fonction que j'occupe depuis sept ans, je pourrais vous en parler très longuement, mais je m'en tiendrai à une présentation synthétique des faits marquants. Créé en 1936, le « Fonds d'amortissement des charges d'électrification » est resté jusqu'à aujourd'hui le Facé. Il a en effet conservé le même acronyme tout en changeant de statut en 2012 en devenant un compte d'affectation spéciale intitulé « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale ».

Je remarque tout d'abord que les recettes du Facé ont beau être assises sur une contribution due par les gestionnaires des réseaux de distribution d'électricité, en particulier Électricité Réseau Distribution France (ERDF), son coût est in fine imputé sur le consommateur d'électricité. Cette contribution, attendue à hauteur de 377 millions d'euros en 2015, soit un montant stable depuis 2012, est recalculée régulièrement, de manière à couvrir exactement les crédits prévus sur l'exercice. Par exemple, les taux en vigueur à ce jour ont été récemment fixés par un arrêté du ministre chargé de l'énergie en date du 30 juillet 2014. Aux termes de cet arrêté, le taux de la contribution, calculé en centimes d'euros par kWh, s'élève ainsi à 0,035119 en zone rurale et à 0,175593 en zone urbaine. Il est donc cinq fois plus élevé en zone urbaine, faisant du Facé, dès le stade de son financement, un dispositif de péréquation. Lorsqu'il a été instauré en 1936, le Gouvernement a d'ailleurs annoncé vouloir faire payer ceux qui avaient l'électricité pour installer l'électricité là où il n'y en avait pas, en général en zone rurale. Ce mécanisme de répartition des charges entre communes rurales et communes urbaines doit rester selon moi du même ordre.

S'agissant des destinataires des aides du Facé, il s'agit des « autorités organisatrices de la distribution publique d'électricité » ou AODE. Ces AODE peuvent être des communes ou, le plus souvent, des établissements publics de coopération intercommunale, en particulier des syndicats d'électrification à l'échelle départementale, dans la mesure où ces collectivités sont les maîtres d'ouvrage des travaux d'électrification rurale. À cet égard, je me félicite qu'en 2014, la tendance au regroupement des syndicats soit quasiment achevée. Seuls six départements n'ont pu faire aboutir ce regroupement pour des raisons liées à des circonstances locales.

Le taux de prise en charge du coût des travaux s'établit à 80 % hors taxes et les dotations sont notamment réparties en fonction des départs mal alimentés (DMA) calculés par ERDF. J'attire votre attention sur le fait que ces critères de calcul ont été modifiés de manière unilatérale en 2011, ce qui a réduit de manière très importante le nombre de clients considérés comme mal alimentés. Par exemple, en Ardèche, ils sont passés de 4 845 à 2 778, soit une baisse de 43 % sans aucun travaux. Cela revient à casser le thermomètre plutôt que de faire baisser la température. Alors que le taux d'aide est aujourd'hui uniforme, j'estime qu'une réflexion pourrait être engagée sur la variation des taux d'aide selon les collectivités et la nature des travaux.

Ces dotations sont destinées à financer des travaux sur les réseaux de distribution d'électricité. En 2015, les investissements sur les réseaux de distribution publique d'électricité auront, comme à l'accoutumée, diverses finalités et j'en cite pour mémoire quelques-unes. Tout d'abord, 184 millions d'euros seront consacrés au renforcement des réseaux. Cette action vise à accroître la qualité de l'électricité distribuée, qui peut se dégrader en raison de l'augmentation du nombre d'abonnés raccordés sur un départ basse tension par rapport à la capacité électrique de l'ouvrage de distribution. Un montant de 81 millions d'euros financera la sécurisation des réseaux, en prévision d'évènements exceptionnels tels que les tempêtes ou d'autres intempéries, qui peuvent provoquer l'interruption de la fourniture. Des aides à hauteur de 55,5 millions d'euros seront allouées pour l'enfouissement, permettant d'importantes améliorations esthétiques, mais également de fiabilisation, en particulier en zone de montagne. Enfin, 47 millions d'euros sont prévus pour l'extension des réseaux afin d'assurer leur développement. J'estime que les actions de renforcement et de sécurisation doivent bien demeurer des axes prioritaires pour les missions du Facé, mais il convient de réviser progressivement à la hausse la part des travaux d'extension et d'enfouissement.

Alors qu'en 2012, 2013 et 2014, on a constaté l'existence d'importants reports de crédits d'une année sur l'autre, j'invite le Gouvernement à veiller à ce que l'exécution 2014 soit la plus élevée possible, à procéder aux paiements dans les délais les plus brefs et à faire preuve de bienveillance dans l'examen des dossiers. J'affirme avec force que les retards de paiement connus en 2012, il est vrai peut-être en partie dus à la réforme, ne doivent plus jamais se reproduire.

Pour conclure, mes recommandations sont au nombre de trois. Les actions de renforcement et de sécurisation doivent demeurer des axes prioritaires pour les missions du Facé, mais il convient de réviser progressivement à la hausse la part des travaux d'extension et d'enfouissement. La répartition des charges et des produits entre zone rurale et zone urbaine doit rester identique. Et enfin, alors que le taux d'aide est aujourd'hui uniforme, une réflexion est à engager sur la variation des taux d'aide selon les collectivités et la nature des travaux.

C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous propose l'adoption, sans modification, des crédits pour 2015 du compte d'affectation spéciale « Financement des aides aux collectivités pour l'électrification rurale » (Facé), qui est pour moi un bel instrument de solidarité entre les territoires, principe de solidarité qui m'est cher.

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