Merci de me donner l'occasion de vous présenter la Moldavie, qui se trouve presque au centre de l'Europe. Mon pays est lié à la France par des traditions culturelles et linguistiques, il appartient à la « francophonie de coeur », il a fait le choix de cette langue, qui ne lui a pas été imposée. Nous sommes très fiers de cet héritage.
Nous sommes à quelques jours de la signature de l'accord d'association et de libre-échange, c'est un moment critique et crucial pour l'avenir du pays et de la région. Notre pays a une importance stratégique, malgré la taille réduite de son territoire et de sa population. Nous sommes ici pour discuter de nos relations bilatérales avec la France, qui se sont significativement intensifiées depuis quatre ans, en matière de dialogue politique comme de coopération culturelle et économique, ce dont nous nous félicitons. La présence française en Moldavie est bien visible, avec des entreprises comme Orange, Lafarge, Société Générale, Lactalis, pour n'en citer que quelques-unes. C'est seulement un début. Nous avons eu aujourd'hui des rencontres au Medef international et nous avons perçu l'intérêt d'autres entreprises françaises d'investir en Moldavie, ce dont nous avons besoin. Comme pays francophone, nous sommes très désireux de consolider la coopération culturelle et la présence de la langue française en Moldavie. La France est le deuxième pays d'accueil des étudiants moldaves (près de 1200) ce qui s'explique par le fait que La majorité des élèves choisissent le français comme première langue étrangère. Nous souhaitons développer la présence française en Moldavie car cela nous enrichit et conforte notre place dans le contexte régional. A cet égard, s'il faut convenir de la complexité de la situation régionale, il faut aussi souligner l'opportunité que représente notre relation avec l'Union européenne. Depuis quatre ans que nous sommes au pouvoir, nous avons initié un processus de réformes qui est très lié au processus d'intégration européenne ; pour nous, l'intégration européenne n'est pas seulement un choix civilisationnel et géopolitique, c'est aussi le moyen le plus efficace de moderniser les institutions, d'ouvrir l'économie, de lutter contre la corruption et de réformer la justice, avec l'aide de nos partenaires européens. C'est pourquoi des progrès ont été faits. Mais il reste des défis traditionnels et des défis nouveaux, liés aux événements tragiques qui se passent en Ukraine. Ce qui se passe dans ce pays nous inquiète, nous partageons avec l'Ukraine 1 240 kilomètres de frontière, d'où l'importance pour la Moldavie des relations avec l'Ukraine et de sa stabilité. Nous serions intéressés d'avoir des objectifs de politique extérieure et intérieure communs avec l'Ukraine. Le point positif est que le nouveau Président et le nouveau Premier ministre ukrainiens sont attachés aux valeurs européennes, ce qui est une différence avec l'ancienne équipe dirigeante.
Bien sûr, la situation à l'est de l'Ukraine et les événements tragiques à Odessa, qui se trouve à moins de 200 kilomètres de Chisinau, la capitale de la Moldavie, suscitent des inquiétudes dans la société moldave. J'espère que la situation en Ukraine va se normaliser, cela dépendra de la position de Bruxelles, de l'Allemagne et de la France, j'espère que vous garderez la même position, c'est avec votre aide que l'on pourra modérer la position de Moscou. Les événements en Ukraine ont aussi des conséquences économiques, le commerce extérieur avec l'Ukraine, la Russie et la Biélorussie a diminué cette année de 45 %, car, aux turbulences liées à la crise s'ajoutent les sanctions que la Russie nous a imposées, en interdisant, il y déjà huit mois, les importations de vin moldave. Des hauts fonctionnaires russes ont déclaré qu'elle pourrait prendre d'autres sanctions si nous persistions à vouloir signer l'accord d'association et de libre-échange. Nous avons rassuré nos partenaires européens, nous nous efforçons de ne pas irriter la Russie, de ne pas lui donner de prétexte. C'est aux russes de décider s'ils veulent ou pas appliquer de nouvelles sanctions. Je vous fais part de la détermination de la Moldavie à poursuivre dans la voie de l'intégration européenne. La leçon de la crise en Ukraine, c'est qu'il ne faut pas montrer d'hésitation, il faut être sûr de son objectif. C'est pourquoi nous nous préparons non seulement à la signature et à la ratification de l'accord mais aussi à sa mise en oeuvre, pour prouver ses avantages à la société moldave. Ce qui est important pour nous, c'est de recevoir un message très clair de l'Europe, et notamment de Paris, que l'accord d'association n'est pas l'étape finale de ce processus. Pour nous, il n'y a que deux possibilités : soit intégrer l'Union européenne comme membre à part entière, soit intégrer l'Union douanière eurasiatique, ce qui n'est pas dans l'intérêt de la société moldave. Nous avons besoin d'importer les valeurs, les standards et les pratiques de l'Union européenne. Nous sommes un pays européen et latin et nous voulons faire partie de la famille européenne. Nous pourrons aussi contribuer au bon fonctionnement de l'Union européenne. Nous avons besoin d'une vision stratégique concernant la région, la politique du bon voisinage, qui est le sens du partenariat oriental, n'est pas suffisante, elle est facteur d'incertitude et donc d'instabilité, comme on l'a vu en Ukraine. La France peut compter sur la Moldavie. Mais la Moldavie a besoin du soutien de la France, compte tenu de sa position de leader dans le cadre de l'UE.