Intervention de Hélène Conway-Mouret

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 15 octobre 2014 : 1ère réunion
Accord entre l'union européenne et la géorgie sur la création d'un espace aérien commun — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Hélène Conway-MouretHélène Conway-Mouret, rapporteure :

J'ai le plaisir de vous présenter ce matin un des trois accords aériens, inscrit à l'ordre du jour. Il s'agit de la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part.

Je formulerai deux remarques liminaires avant de vous présenter ce texte.

Tout d'abord, ce traité, qui a été signé le 2 décembre 2010, revêt un fort caractère politique. Il consacre le choix européen fait par la Géorgie, dans le cadre de ses relations extérieures. En effet, cette dernière a entrepris de nouer de solides liens avec l'Union européenne depuis 1999. Cette année là a été marquée par l'entrée en vigueur de son accord de partenariat et de coopération avec l'Union, ainsi que par son adhésion au Conseil de l'Europe et à l'OMC.

Ce choix européen s'affirme toutefois dans un contexte difficile. La Géorgie a été opposée à la Russie à l'été 2008, dans un violent conflit armé, autour de la sécession de l'Ossétie du sud et de l'Abkhazie. Cette opposition a conduit à la rupture des relations entre Moscou et Tbilissi. La Mission de surveillance de l'Union européenne demeure seule sur le terrain depuis le départ exigé par la Russie des missions de l'ONU et de l'OSCE.

En dépit de tentatives d'apaisement des relations avec la Russie, conduites par la majorité géorgienne issue des urnes en 2012, la situation demeure fragile. Il y a bien eu levée, en 2013, de l'embargo sur quelques produits agricoles géorgiens. Cependant les autorités géorgiennes dénoncent, en même temps, une reprise des travaux de « frontiérisation » avec la pose de clôtures et de barbelés sur les lignes de jonction administratives avec l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud.

Autre remarque liminaire, ce traité s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de la politique européenne de voisinage.

En effet, la Géorgie bénéficie depuis 2009 de cette politique. Conçue afin d'engager 16 pays voisins de l'Union dans la promotion de valeurs communes, elle comprend un volet aérien avec deux axes géographiques, méridional et oriental. Le présent accord relève du second.

Un des objectifs de cette politique est la création d'espaces aériens communs avec ces pays voisins. Cette notion doit être entendue comme un « espace commercial commun comprenant des normes communes. ».

Elle est donc distincte de celle de « ciel unique » qui traite de « l'efficience de l'exploitation du ciel européen » et qui renvoie à l'organisation des services de contrôle aérien.

Cette politique de voisinage s'est traduite par la conclusion, en 2006, d'un accord multilatéral sur la création d'un espace aérien commun européen dit EACE , entre les 25 Etats, alors membres de la Communauté européenne ainsi que la Bulgarie, la Roumanie, l'Islande, la Norvège et les pays des Balkans de l'Ouest.

Or, l'accord, soumis à votre approbation, constitue une étape, avant une éventuelle intégration par la Géorgie de cet espace EACE.

Ce traité, conjointement signé par l'Union et chacun des Etats membres présente une architecture et des principes conformes à la pratique conventionnelle européenne, en la matière.

Les accords types proposés aux pays voisins sont généralement semblables, que ces Etats appartiennent à la zone orientale ou méditerranéenne. Le présent accord en témoigne. On y retrouve des clauses similaires à celles du traité jordanien, qui vous sera présenté dans un instant.

En l'absence d'un traité aérien bilatéral franco-géorgien, cet accord permet de mettre en place un cadre juridique propice au développement de services aériens entre les deux pays.

Ce cadre comprend deux types de stipulations :

- les premières sont relatives à l'exploitation des services aériens, dans un contexte de libéralisation du marché,

- les secondes traitent de la coopération réglementaire qui impose la reprise de certaines normes communautaires par les autorités géorgiennes.

Ce dispositif vise donc à ouvrir le marché en contrepartie d'une harmonisation des normes. Il contribue, d'une part, à établir un cadre concurrentiel équitable, et d'autre part, à renforcer la sûreté du transport aérien.

Je ne prendrai qu'un seul exemple en matière de sécurité, celui de l'obligation pour la Géorgie d'exclure du registre des immatriculations, les appareils qui ne disposent pas d'un certificat délivré par l'Agence européenne de la sécurité aérienne.

En ce qui concerne tout d'abord l'ouverture du marché aérien, l'accord autorise les transporteurs européens et géorgiens à proposer des services, au départ de toute plateforme européenne, vers tout aéroport en Géorgie et réciproquement. Ces droits sont qualifiés de troisième et de quatrième libertés.

Cette exploitation s'opère sans contrainte. Les transporteurs sont libres de fixer les fréquences, la capacité ou les tarifs de leur offre.

Quant aux droits dits de cinquième liberté, ils permettront aux transporteurs géorgiens de débarquer et embarquer, dans le territoire d'un Etat Partie à l'accord, des passagers en provenance ou à destination d'un État tiers.

Cette cinquième liberté est toutefois conditionnée par la transposition de certaines règles communautaires, en matière de sûreté du transport aérien, de protection des consommateurs et de l'environnement, notamment.

Cette étape d'harmonisation ne sera pas immédiate, compte tenu de la taille modeste de l'administration géorgienne chargée de l'aviation civile. C'est pourquoi, les autorités de ce pays ont insisté pour recevoir une aide particulière dans le domaine de la gestion du trafic aérien, en raison du volume de textes à transposer.

La Géorgie bénéficiera également de l'aide de l'Union dans le cadre de différents programmes de soutien technique.

S'agissant, enfin, des perspectives commerciales de cette ouverture de marché, elles sont incertaines. Le transport aérien entre la Géorgie et l'Union européenne a concerné environ 250 000 passagers entre 2010 et 2012. Seuls onze Etats membres disposent de liaisons directes avec la Géorgie, principalement avec sa capitale Tbilissi. Le marché est centré sur trois Etats membres qui représentaient près de 60 % du trafic passagers en 2012. Il s'agit de l'Allemagne, la Pologne et la Lettonie.

Le marché français se situait à la septième place en 2010 avec un peu plus de 10 000 passagers. Il ne bénéficie plus d'une desserte régulière depuis 2012. La compagnie Georgian Airways propose toutefois ponctuellement des services entre Tbilissi et Paris.

L'intérêt majeur de la conclusion d'un tel accord réside donc dans l'opportunité d'approfondir les relations entre l'Union européenne, la France, d'une part, et la Géorgie, d'autre part. Il traduit concrètement les objectifs de réformes fixées dans le cadre de la politique aérienne de voisinage.

C'est pourquoi, je vous propose d'achever le processus de ratification, en :

- adoptant le projet de loi n° 661 (2013-2014), autorisant la ratification de l'accord sur la création d'un espace aérien commun entre l'Union européenne et ses Etats membres, d'une part, et la Géorgie, d'autre part ;

- et en prévoyant son examen en séance publique en forme simplifiée, le 30 octobre.

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