La conquête spatiale européenne ne peut être efficiente sans la maîtrise des lanceurs, principal atout de la stratégie de puissance spatiale. Il ne faut pas occulter que, sur le long terme, l'espace sera un théâtre d'affrontements stratégiques, comme en témoignent d'ailleurs les destructions de satellites obsolètes réussies par la Chine et les États-Unis. L'Europe doit donc posséder des équipements capables de répondre aux futurs défis spatiaux.
Depuis l'arrivée sur le marché de la société Space X, en 2002, les industriels européens doivent entreprendre de profondes mutations afin de pouvoir continuer à concurrencer les projets et programmes spatiaux américains. Il leur faut posséder des compétences industrielles et technologiques encore plus élevées que par le passé, et présenter une offre commerciale toujours plus compétitive.
La société Space X, du fait des coûts de lancement attractifs qu'elle propose, a conquis les pays émergents, parfois au détriment d'Ariane 5. Par ailleurs, la Chine et l'Inde se livrent à une course effrénée dans la construction de satellites de télécommunications. Il est donc essentiel de posséder un lanceur Ariane 6 qui réponde au marché du futur et qui permette de réduire les frais de lancement actuels.
Outre les tarifs concurrentiels que propose Space X, les luttes intestines, entre les constructeurs de composants électroniques destinés à la fabrication de satellites, affaiblissent considérablement l'Europe de l'espace. Compte tenu de la concurrence des États-Unis en la matière et de la règlementation américaine sur le trafic d'armes au niveau international - les règles « ITAR », qui imposent le contrôle des importations et exportations des objets et services liés à la défense -, il est urgent de réfléchir à une approche globale des problèmes, à l'échelle européenne. Il faut aussi unir les deux filières qui produisent des satellites en France.
Le budget consacré par l'État français au développement des industries et de l'équipement spatial est de l'ordre de 2,4 milliards d'euros sur la période 2014-2019, que couvre la loi de programmation militaire du 18 décembre 2013. Environ 37 000 personnes en Europe, dont 15 000 dans notre pays, travaillent dans l'industrie spatiale, un secteur économiquement prometteur. La construction du satellite Galileo est l'exemple même de la bonne santé de ce secteur, ainsi que de la volonté des pays européens de coopérer pour contrer l'hégémonie américaine.
Témoin de cette volonté institutionnelle de développer des programmes industriels d'avenir, le programme 191 « Recherche duale (civile et militaire) » tend à renforcer les liens du ministère de la défense avec la recherche civile et à utiliser au mieux, au profit de notre politique de défense, les compétences disponibles dans la communauté nationale de recherche.