Intervention de Jean-Pierre Sueur

Réunion du 29 mars 2006 à 21h30
Droit de préemption et protection des locataires en cas de vente d'un immeuble — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean-Pierre SueurJean-Pierre Sueur :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, les ventes à la découpe sont un phénomène véritablement très préoccupant. Nous l'avons dit tout au long de ce débat, elles traduisent une financiarisation de la question du logement, une mainmise des spéculateurs sur une part considérable du parc de logements à Paris et dans d'autres villes.

Il faut apporter des réponses fermes et réellement protectrices des locataires à cette pratique très inquiétante. C'est la raison pour laquelle nous n'avons jamais contesté la nécessité d'une loi à ce sujet.

Cette proposition de loi contient des éléments positifs ; je pense en particulier à la prorogation des baux de six ans. Nous avons pu obtenir, en première lecture, une petite avancée puisque le délai de réflexion laissé aux locataires est passé de deux mois à quatre mois. Cependant, nous persistons à considérer que c'est insuffisant, compte tenu de l'ampleur des décisions à prendre, des sommes à mobiliser, des difficultés de toute sorte auxquelles ces locataires doivent faire face.

En tout état de cause, cette deuxième lecture au Sénat a aussi été l'occasion d'un recul important puisque ce qui avait été adopté par l'Assemblée nationale et qui avait été soutenu par un certain nombre de nos éminents collègues de l'UMP, élus de Paris et d'Île-de-France, n'a pas été retenu : le Sénat a, en effet, porté de cinq à dix logements le seuil d'application du dispositif de l'article 10-1. Nous regrettons ce recul.

Nous appelions, en outre, de nos voeux bien d'autres avancées. Dans la discussion générale, j'ai formulé douze propositions. À la fin de cette soirée, monsieur le président, je suis au regret de constater que, sur ces douze propositions de mon groupe, qui ont été déclinées en de nombreux amendements, seul un tiers d'une proposition a été retenu : il sera écrit dans la loi que le diagnostic est à la charge du bailleur !

C'est une avancée, certes, mais bien modeste, et même quelque peu dérisoire au regard de l'ensemble des problèmes posés.

Nous aurions vivement souhaité que l'on mette en place des dispositifs beaucoup plus protecteurs, que l'on donne des garanties plus fortes et que l'on fasse davantage confiance aux élus.

Voyez-vous, lorsque nous avons proposé l'organisation d'une enquête publique, il nous a été répondu qu'une telle enquête serait aberrante. Mais tout dépend de l'idée que l'on se fait de l'utilité publique, de l'intérêt public ! À partir du moment où nous considérons que l'équilibre dans le parc de logements d'un endroit déterminé fait partie de l'intérêt public, il est légitime que les maires puissent intervenir.

Sur bien des questions, comme l'indemnité d'éviction, la décote, pourtant très largement demandée sur toutes les travées de cette assemblée, nous n'avons pu avancer, et nous le déplorons.

Dans ces conditions, nous ne pouvons voter en faveur de ce texte, car il n'est pas équilibré. De plus, il ne donne pas aux locataires, qu'ils soient dans la situation d'acquérir leur logement ou dans celle, hélas ! de devoir partir, des droits à la mesure des pouvoirs gigantesques des fonds de pension, des fonds de placements de toute sorte, des intérêts financiers qui, aujourd'hui, régissent une part très importante du logement dans notre pays.

Toutefois nous prenons note, madame la ministre, de l'engagement que vous avez pris de solliciter très prochainement la réunion d'une commission mixte paritaire.

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