Intervention de Gérard Grignon

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 15 avril 2014 : 1ère réunion
Extension du plateau continental — Audition de M. Gérard Grignon président de la délégation à l'outre-mer du conseil économique social et environnemental sur le rapport et l'avis rendu par le cese

Gérard Grignon, président de la délégation à l'outre-mer du CESE :

La délégation à l'Outre-mer du CESE n'a pas obtenu de véritable explication sur le dossier de Clipperton. Un dossier scientifique a été établi et transmis à New York. Il a été retiré deux jours plus tard, sans explication claire. Toutes les preuves scientifiques et techniques présentées en juillet 1999 devant la CPLC sont incontestables. Le Mexique a une position contradictoire : il conteste la souveraineté de la France sur Clipperton, alors qu'il a pourtant signé un accord de pêche avec la France, pour dix ans dans la ZEE française. C'est reconnaître implicitement la souveraineté de la France ! La seule possibilité pour mettre un terme au différend, c'est que la France dépose son dossier. La CPLC ne pouvant trancher sur un dossier où il y a différend entre deux pays, si le dossier était déposé, le Mexique serait dans l'obligation de négocier. La France ne doit pas abandonner ses intérêts dans une zone où le sous-sol est riche : on y a repéré des sulfures hydrothermaux en quantité importante. Elle doit également mettre fin à la pêche anarchique et au pillage des ressources halieutiques, conséquences du manque de présence de l'État en mer.

Le Vanuatu conteste l'extension du plateau continental au Nord-Est de la Nouvelle Calédonie, car il ne reconnaît pas la souveraineté de la France sur les îles Matthew et Hunter. Des négociations avec les autorités politiques du Vanuatu sont nécessaires. Souvent, ce type de négociations souffre d'un manque de coordination entre les ministères concernés : par exemple, une recommandation au large de la Guyane a été émise par la CPLC, mais les limites extérieures fixées par la commission n'ont pas encore été publiées par la France qui n'a pu conclure les compléments d'accord avec le Brésil et le Surinam par manque d'interlocuteur.

Le Canada s'en tient à l'arbitrage conduit à New York en 1991 et rendu en juin 1992, qui a été un échec pour la France : elle n'a pas obtenu le cinquième de la superficie revendiquée. Saint-Pierre-et-Miquelon est en droit de prétendre à l'extension de son plateau continental, une mission de l'Ifremer en juillet 2013 ayant apporté les preuves scientifiques nécessaires. La zone économique exclusive française est située au coeur de réserves en gaz et en pétrole que le Canada exploite depuis plus de dix ans et qui enrichissent Terre Neuve et La Nouvelle Ecosse. Le Canada ne veut pas négocier ; dans un documentaire, diffusé la semaine dernière à l'Assemblée nationale, on entendait des responsables canadiens se référer au traité signé en 1994 entre M. Chrétien et M. Balladur qui, par rapport au différend franco-canadien, relevait de l'accessoire -la culture, la communication, l'éducation- et en excluait l'essentiel --les hydrocarbures, la pêche, le plateau continental. La France doit déposer son dossier pour obliger le Canada à négocier, car l'extension canadienne au large de Terre Neuve et de la Nouvelle Ecosse ne sera alors pas possible sans cette négociation.

Si un pays côtier attribue à une société un permis pour qu'elle exploite du pétrole en deçà des 200 milles marins -c'est le cas de la Guyane- on est dans l'espace maritime de la zone économique exclusive, sous souveraineté de l'État français. Au-delà des 200 milles marins, on est dans l'espace de la haute mer : dès lors, les opérations d'exploitation ne doivent pas perturber la circulation des navires ou la pêche. Après 350 milles marins, le plateau continental étendu devient « la zone », dont le sol et le sous-sol sont gérés par l'Autorité internationale des fonds marins (Aifm) qui a commencé à rédiger un code minier international pour l'exploitation des nodules polymétalliques, des sulfures hydrothermaux et des amas cobaltifères. Les pays côtiers ne sont pas obligés d'adopter ce code, mais un arrêt de la Chambre pour le règlement des différends, datant de 2011, leur recommande de s'en inspirer. Les ressources minérales des fonds marins sont souvent par grands fonds. Aucun programme national n'a livré une connaissance des écosystèmes marins suffisamment approfondie pour que l'exploitation se fasse sans dégâts. Le devoir de l'État est d'élaborer la réglementation des activités d'exploration et d'exploitation minérales des fonds marins pour préserver les écosystèmes. En outre, il n'est pas possible de laisser des sociétés exploiter les ressources sans aucun bénéfice pour l'État ou les collectivités ultramarines. Lors de l'examen de la loi de finances 1993, l'Assemblée nationale et le Sénat ont supprimé, à la suite d'un amendement déposé par M. Philippe Auberger, les redevances sur l'exploitation du pétrole et du gaz offshore. Si Exxon Mobil demande un permis d'exploitation et trouve du pétrole au large de Brest, la société n'aura rien à payer. Jusqu'alors, la France était le seul pays sans fiscalité sur l'exploitation offshore. Depuis, une réforme du code minier a été engagée, mais nous l'attendons toujours. Le Sénat a voté, à l'initiative de M. Patient...

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