À nos yeux, cet amendement est fondamental. Il se situe au cœur de toute notre argumentation sur l’accès au crédit.
Je ne reviens pas sur le constat général : nous savons que 40 % de la population est exclue du crédit, soit en raison d’une très grande pauvreté – je pense notamment aux titulaires de revenus sociaux –, soit à cause d’un statut précaire. En effet, certaines personnes ne sont pas considérées comme solvables par les établissements de crédit, notamment par les plus classiques d’entre eux, à savoir les banques, alors même qu’elles ont un travail.
Dès lors, tout le discours sur le crédit dit « responsable » relève surtout de l’affichage. J’en ai déjà longuement parlé hier. L’adoption de ce projet de loi n’empêchera pas que de nombreuses personnes continuent à être exclues du crédit. Cette situation, qui prend évidemment un relief particulier dans le contexte de crise que nous connaissons, devrait nous conduire à nous interroger sur le modèle de crédit que nous souhaitons proposer aux Français.
Je le répète, le projet de loi ne bouleverse en rien le système actuel. Au contraire, il s’inscrit dans le cadre de l’offre actuelle de crédit des banques, qui imposent aux populations jugées « à risques » de recourir au crédit renouvelable, dont on connaît les taux d’intérêt élevés et les incidents qu’il peut engendrer, ou aux services sociaux des collectivités territoriales, lesquelles interviennent également par le biais du microcrédit consenti par les caisses de crédit municipal des grandes villes. Toutefois, le développement du microcrédit n’a pas été à la hauteur des besoins.
Certes, la commission spéciale a conforté l’assise légale du microcrédit, mais en liant l’attribution de celui-ci à l’activité. Pour ma part, je lie son attribution à la vie tout court : d’un montant inférieur ou égal à 3 000 euros, il doit permettre de modifier le modèle économique, en offrant à des personnes aujourd’hui contraintes de recourir au crédit renouvelable la possibilité de bénéficier d’un crédit responsable, au montant limité et assorti d’un taux d’intérêt bonifié par l’État.
Si nous avons retenu le principe du prêt personnel bonifié par l’État, c’est d’abord pour éviter de tomber sous le coup de l’article 40 de la Constitution, que nous n’avons pas abrogé lors de la dernière révision constitutionnelle.