Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, il me revient de vous présenter les conclusions de mon contrôle budgétaire de cette année, qui a porté sur la direction de l'information légale et administrative, la DILA.
Cette dernière, créée en 2010, résulte de la fusion de la direction des Journaux officiels (JO) et de la direction de la Documentation française. Ainsi, dès 2003, la Cour des comptes a souligné « l'étroite complémentarité » de certaines des activités des deux directions.
En outre, la même année, François Marc, alors rapporteur spécial du compte de commerce de la Documentation française, a mené un contrôle sur la Documentation française qui concluait à la nécessité « d'envisager de nouvelles coopérations entre la Documentation française et les Journaux officiels » et de « procéder à des économies d'échelle pour les opérations de renouvellement de l'outil de production ».
La prise en compte de ces observations par l'administration a conduit à la création, en 2007, du budget annexe « Publications officielles et informations administratives », regroupant les crédits des deux directions.
Il a encore fallu deux années, de 2008 à 2010, pour préparer leur fusion, avec en particulier la mise en commun des services de soutien.
Il faut noter que selon la DILA, cette période a permis de « négocier un aménagement des conditions d'emploi avec la direction du budget et la direction générale de l'administration et de la fonction publique pour rapprocher les niveaux de rémunérations des agents ».
Ainsi, les économies de masse salariale réalisées grâce à la fusion ont été en partie utilisées pour financer la convergence des rémunérations en trois ans. Entre 2009 et 2012, les effectifs de la DILA ont diminué de 91 équivalents temps plein travaillé (ETPT) permettant de réaliser une économie de l'ordre de 4,5 millions d'euros sur trois ans. La convergence des rémunérations, grâce à la mise en place d'une indemnité de modernisation des métiers, a bénéficié d'une enveloppe totale de 2,14 millions d'euros. Aujourd'hui, d'un point de vue opérationnel, la fusion peut être considérée comme une réussite.
Quelles sont les missions de la DILA ? Fruit de son histoire, elles sont diverses et fixées par un décret de 2010.
Tout d'abord, la DILA garantit l'accès au droit et offre aux citoyens des informations sur leurs droits et obligations et sur les démarches administratives qu'ils doivent effectuer. À ce titre, la DILA gère notamment les sites Internet « Legifrance », « Mon service public » ou « Vie publique ». Il s'agit des activités de service public effectuées à titre gratuit par la DILA.
Ensuite, la DILA exerce une mission - également de service public - mais qui lui procure des recettes : il s'agit de la publication des informations contribuant à la transparence de la vie associative, économique et financière.
Enfin, la DILA doit éditer et diffuser des publications de vulgarisation relatives aux politiques et au débat publics. Cette activité est également supposée lui apporter des recettes grâce à la vente des ouvrages.
Dans toutes ces activités, la DILA « s'appuie » sur la société anonyme de composition et d'impression des journaux officiels (la SACIJO), qui compte 200 salariés, pour effectuer ses travaux d'impression. Je reviendrai plus tard sur le rôle de cette société.
Chaque année depuis sa création, le budget annexe dégage un excédent, qui est reversé au budget général. Ainsi, en 2013, cet excédent est de 26 millions d'euros, les recettes s'élevant à 201 millions d'euros et les dépenses à 175 millions d'euros.
La part des recettes relatives à la publication des annonces légales est prépondérante - elles représentent 94 % des recettes en 2013, soit 188 millions d'euros - et en progression de 5 points par rapport à 2010.
Or la plupart de ces recettes sont liées à des obligations légales de publicité des entreprises ou des collectivités : ainsi, les informations légales de certaines catégories de sociétés doivent être publiées au bulletin des annonces légales obligatoires (BALO). À partir de certains seuils, les appels à la concurrence en matière de marchés publics sont obligatoirement publiés au bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP) ; enfin, certaines informations relatives à la vie des entreprises doivent être publiées au bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (BODACC).
Les autres recettes de la DILA sont atones, en particulier les ventes de publications et d'abonnement (7,5 millions d'euros) ou les prestations et travaux d'édition de la DILA (2,9 millions d'euros).
S'agissant des dépenses, elles sont relativement stables, à hauteur de 175 millions d'euros en 2013, soit une hausse de 1,3 % depuis 2007 à périmètre courant.
Elles sont également en « recomposition » depuis 2010 : en particulier, la baisse des dépenses relatives à l'activité d'édition et d'information administrative est compensée par la monté en puissance du pilotage et de la modernisation des activités numériques. Cette évolution montre que la DILA a entrepris sa modernisation.
Cependant, les dépenses totales de personnel, comprenant à la fois le personnel de la DILA et celui de la SACIJO s'avèrent particulièrement importantes, puisqu'elles représentent en 2013 plus de 60 % du budget de la DILA (soit 115 millions d'euros).
Comme vous le comprenez à l'issue de cette présentation, les métiers et les missions de la DILA doivent aujourd'hui évoluer très rapidement, afin de s'adapter à la révolution numérique.
Or, en 2010, afin que la DILA dispose d'un outil d'impression plus performant et polyvalent, il a été décidé d'investir dans l'achat d'une rotative, opérationnelle en 2013, pour un coût de 10 millions d'euros.
Aussi, à l'issue de ce contrôle, je souhaiterais vous faire part d'une observation et formuler plusieurs recommandations.
J'observe que le directeur de la DILA a quitté ses fonctions le 30 avril dernier. À ce jour, aucun successeur n'a été désigné. Or, cette désignation est capitale pour une institution devant prendre un virage au moins aussi stratégique que le projet, réussi, de la fusion.
Le choix d'un tel directeur est difficile et nécessairement long, mais il ne faudrait pas que cette absence dure trop longtemps et je souhaiterais qu'il soit nommé avant la fin du mois de juillet.
Par ailleurs, et c'est ma première proposition, dans la mesure où le JO papier n'a plus aujourd'hui que 3 129 abonnés, contre 64 726 abonnés au sommaire du JO électronique, il me semble indispensable de confirmer, par une déclaration officielle, l'intention d'arrêter l'impression du JO papier à la fin de l'année 2016. À ce stade, il ne s'agit que d'une perspective probable, mais non officiellement actée. Il appartiendra donc au nouveau directeur de prendre cette décision et d'en tirer toutes les conséquences.
En outre, la mission prioritaire du nouveau directeur sera d'accélérer le rythme du changement. Je recommande que soit rapidement prise une décision claire concernant l'avenir des activités d'édition et d'impression. Plus précisément, la question de l'utilisation de la rotative, amortie sur huit ans, soit en 2021, devra être réglée. Le cas échéant, le nouveau directeur devra déterminer les moyens de donner un second souffle aux activités d'impression et d'édition publique. Pour faciliter cette prise de décision, il est d'ailleurs urgent que la DILA se dote d'une comptabilité analytique fine, permettant de mesurer la compétitivité de ses différentes activités. En effet, plus rien ne justifie aujourd'hui que l'État dispose d'une imprimerie sans valeur ajoutée par rapport à un imprimeur privé. De plus, l'arrêt du JO papier et la réorientation des missions de la DILA vers le numérique justifient que les relations avec la SACIJO soient redéfinies.
En 2013, 43 millions d'euros ont été consacrés au financement des dépenses de personnel de la SACIJO, qui utilise le matériel mis à disposition par la DILA, son unique client. La SACIJO, régie par le statut de la presse parisienne, comprend aujourd'hui 200 salariés, occupés non seulement à des activités d'impression mais aussi de composition ou d'édition ; la moitié des effectifs, tout en gardant son statut, a été mise à disposition de la DILA. Les tâches aujourd'hui effectuées par les salariés de la SACIJO devraient être prises en charge par le personnel de la DILA.
Enfin, j'ai pu observer que l'équipe de direction - au sens large, y compris l'autorité de tutelle, composée d'un personnel de qualité et de haut niveau - est tout à fait consciente de la nécessité de réorienter les missions de la DILA vers le numérique, mais aussi des difficultés et des risques d'une telle opération.
Ainsi, tout en réduisant ses effectifs, la DILA met en avant sa gestion prévisionnelle des effectifs, des emplois et des compétences (GPEEC) et les efforts de formation déployés pour accompagner le personnel dans cette transformation tout en continuant à garantir un bon niveau de service.
Il faut également saluer de belles réussites en matière de services numériques : c'est le cas notamment de Legifrance, exemple unique - et modèle envié - dans le monde ! De même, la fréquentation du site « Mon service public » a augmenté de 70 millions à 218 millions de visites par an entre 2010 et 2013.
Le projet stratégique qu'a défini la DILA pour les années 2014 à 2017 me paraît être le bon : il mise sur le numérique et le rôle résolument interministériel de la DILA, au service des administrations.
Fusionner les deux directions, en 2010, était risqué mais nécessaire. Aujourd'hui, de nouveau, la DILA doit prendre des risques : le choix du nouveau directeur s'avérera crucial puisqu'il devra conduire le changement à un rythme accéléré. Je vous remercie de votre attention.