Intervention de Jean-Pierre Chevènement

Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées — Réunion du 9 avril 2014 : 1ère réunion
Audition de M. Philippe Errera directeur chargé des affaires stratégiques au ministère de la défense

Photo de Jean-Pierre ChevènementJean-Pierre Chevènement :

Je ne crois pas que le désir de consolider la position en politique intérieure soit déterminant pour les dirigeants russes. Le problème pour les Russes, c'est celui de l'étranger proche. Il y a, à mes yeux, le problème d'une « troisième Europe » qui n'a jamais été réglé. Des pays européens qui ne font pas partie de la Russie et qui n'ont pas été intégrés à l'Union européenne ou à l'OTAN, comme la Biélorussie, l'Arménie, la Géorgie, et bien sûr l'Ukraine, où 25 millions de Russes vivent sous un statut de minorité. Les Russes n'ont pas vu d'un bon oeil la « révolution de couleur », ni la tentative d'intégration de l'Ukraine à terme à l'OTAN, pour des raisons historiques et en raison d'intrications économiques. Ce qui a surtout motivé les Russes, c'est la crainte de voir le contrat qui leur garantissait le contrôle de Sébastopol jusqu'en 2042 ne soit remis en question avec les nouvelles autorités de Kiev. Je crois que le bénéfice en termes de politique intérieure d'avoir pris la Crimée est secondaire dans la décision de M. Poutine. C'est ce qui a justifié ce que l'on peut analyser comme la prise de gage d'un territoire, dans un contexte particulier en Ukraine, contraire à la règle internationale d'intégrité territoriale des Etats, mais en s'appuyant sur le principe d'autodétermination des peuples.

Néanmoins, je pense que la stratégie américaine ne sera pas remise en cause par l'affaire ukrainienne dans le long terme. L'affaire ukrainienne est localisable. Le pivotement repose sur la montée de la Chine ce qui est infiniment plus important à l'échelle du monde. C'est d'ailleurs le point de vue de Kissinger et de Brzezinski.

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